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Emeutes en Nouvelle-Calédonie : la stratégie de Macron pour reprendre la main


L’échange est resté fameux. Le 28 avril 1988, la Nouvelle-Calédonie s’invite dans le débat de l’entre-deux-tours de l’élection présidentielle entre François Mitterrand, président sortant, et son Premier ministre, Jacques Chirac, au bout de seulement une demi-heure. Le premier appelle au “dialogue” et reproche au gouvernement la “brutalité”. Le chef du gouvernement contre-attaque : “J’y suis allé 11 fois.” Le ton monte violemment, jusqu’à cette réplique restée fameuse de Mitterrand : “La façon dont vous disiez ‘L’ordre règne’ me faisait penser à une phrase fameuse, il s’agissait de Varsovie, je m’arrête là.”

Cette année-là déjà, des gendarmes, ils étaient quatre, avaient trouvé la mort dans une prise d’otages. Mercredi, un gendarme a succombé à ses blessures quelques minutes après qu’Emmanuel Macron a décrété l’état d’urgence sur l’archipel. Quatre décès en quelques heures, le retour à l’ordre, donc, d’abord, au moment où l’autorité de l’Etat, ici comme là-bas, est chaque jour défiée de plus en plus ouvertement. L’état d’urgence permet des mesures dérogatoires au droit commun, comme l’assignation à résidence, il fait aussi de l’infraction au couvre-feu une infraction pénale, c’est pourquoi le chef de l’Etat a demandé au gouvernement de le décréter.

L’Elysée considère que la violence qui s’est répandue ces derniers jours n’appelle pas d’abord une réponse politique, dans la mesure où elle aurait “une dimension désinhibée et crapuleuse”. Même le Front de libération nationale kanak et socialiste n’a pas vraiment de prise sur les agissements de la Cellule de coordination des actions de terrain, estime l’exécutif, pour qui ce mouvement n’est pas l’expression d’une revendication d’indépendance. “La violence qui s’exprime n’a rien à voir avec la politique”, a insisté le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, devant les sénateurs mercredi après-midi.

C’est ensuite que la politique pourrait reprendre ses droits. Avec un défi quasi existentiel, qu’avait résumé Emmanuel Macron en 2023, lorsqu’il avait évoqué la nécessité de “trouver des chemins d’avenir […] de façon consensuelle”. Autrement dit, ni l’indépendance, ni le statu quo. Ce qui suppose que les indépendantistes acceptent de tourner la page de ce combat qui fut leur raison d’être depuis des décennies. Les trois derniers référendums furent autant de défaites pour eux – s’ils ont boycotté le dernier, c’est parce qu’ils savaient qu’ils allaient le perdre.

Le temps est compté

Comment alors réussir dans le climat actuel, électrisé par les déclarations tonitruantes dans l’Hexagone, à remettre tout le monde autour de la table ? Maintenant que le projet de loi constitutionnel sur le dégel du corps électoral a été adopté aussi bien par l’Assemblée nationale que par le Sénat, l’Elysée veut se servir du calendrier comme d’un moyen de pression, tout en sachant que le temps est compté et que les prochaines élections provinciales ne peuvent être indéfiniment repoussées. Là se situe la quadrature du cercle.

Avant son premier déplacement en Nouvelle-Calédonie comme président, Emmanuel Macron avait été surpris de constater qu’il ne pouvait pas faire d’annonces dans de nombreux domaines, parce qu’ils relevaient de la compétence du territoire et non de l’Etat. Cette fois, le gouvernement a proposé, en vain, un pacte nickel. Sa marge de manœuvre est étroite.

Trouver les gestes pour ramener la concorde est donc un exercice périlleux. Gabriel Attal, qui s’était tenu jusqu’à présent éloigné du dossier, devrait recevoir l’ensemble des responsables calédoniens s’ils acceptent de venir ensemble prochainement à Paris. Dans la foulée serait organisée une rencontre avec Emmanuel Macron. Mais à une condition, déjà fixée par l’Elysée : qu’il s’agisse d’un “aboutissement” et non d’une simple “chorégraphie”.




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