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Friedrich Merz, le futur chancelier allemand ? La résurrection d’un has been


On le croyait prisonnier des années 1990. Mais “l’homme du passé”, comme l’ont longtemps surnommé les médias qui doutaient de ses capacités à renaître de ses cendres, a réussi son come-back, en se faisant réélire triomphalement à la présidence de l’Union chrétienne-démocrate (CDU), le 6 mai dernier. Un retour au premier plan qui n’a rien eu d’évident. “Bonjour, je m’appelle Friedrich Merz. Ça s’écrit avec un ‘e’ [NDLR : son nom se prononce comme le mois de mars, März]”, avait-il lâché, sourire en coin, le 31 octobre 2018, pour sa première conférence de presse… seize ans après avoir été évincé de l’Assemblée fédérale par Angela Merkel, son ennemie intime.

En plus de son image has been, il lui a aussi fallu effacer son profil de “requin de la finance” qui lui collait à la peau. Pour cela, Friedrich Merz a quitté discrètement, en 2018, la présidence du conseil de surveillance de BlackRock Allemagne, le leader mondial de gestion d’actifs dont la réputation ne fait pas bon ménage avec cette Allemagne très attachée à son système de protection sociale – et beaucoup moins libérale que dans les années 1970.

Avec des revenus de 1 million d’euros par an et deux avions privés, Merz s’était présenté aux électeurs comme un “citoyen de la classe moyenne”. Il a fini par abandonner son costume d’homme d’affaires pour reprendre – avec éloquence – son rôle de leader de l’opposition, abandonné en 2002. Avec un “programme fondateur”, voté début mai au congrès de Berlin, Friedrich Merz a redressé un parti laminé par la déroute électorale de 2021 et divisé entre les nostalgiques de la ligne humanitaire de Merkel et les ultraconservateurs partis à reconquête des électeurs d’extrême droite.

La Chancellerie en ligne de mire

Ses phrases sont plus courtes, plus tranchantes et taillées pour être reprises par la presse : “Vous dirigez l’Allemagne comme un plombier”, lance-t-il à Scholz à l’occasion de la crise budgétaire. Sur l’Ukraine, il accuse le chancelier de jouer “avec la peur des Allemands” et d’avoir “ruiné” les relations avec la France. Pour recadrer une CDU trop sociale à son goût, Friedrich Merz a mis un pied discret sur les plates-bandes de l’AfD (Alternative für Deutschland). “L’Allemagne n’est pas Kreuzberg [NDLR : quartier turc de Berlin], c’est Gillamoos [NDLR : fête de la bière en Bavière]”, déclare-t-il le 5 septembre 2023 à Abensberg, alors même que 25 % des Allemands sont issus de l’immigration.

A 68 ans, Merz poursuit sa croisade contre les réfugiés et les minima sociaux. Après avoir dénoncé le “tourisme social” des Ukrainiens et stigmatisé les jeunes des quartiers en les traitant de “petits pachas”, Merz s’est déchaîné contre les déboutés du droit d’asile qui se font “refaire gratuitement les dents quand les citoyens allemands n’obtiennent pas de rendez-vous chez leur dentiste”. “Il met de l’huile sur le feu, mais c’est l’AfD qui en profite”, prévient Ursula Münch, directrice de l’Académie de science politique de Tutzing en Bavière.

Friedrich Merz n’a encore aucune expérience du pouvoir, il n’a jamais été ministre, il n’a jamais mené de campagne électorale nationale. Mais il croit à la Chancellerie en 2025. “Nous allons gagner les élections”, a-t-il assuré aux délégués du congrès de mai. Dans ses voyages en Israël, en France ou à Bruxelles, il se comporte déjà comme un chef de gouvernement. Et il est accueilli comme tel par Emmanuel Macron ou Benyamin Netanyahou.

Pour l’instant, sa ligne “AfD light” a permis de maintenir la CDU à 30 % dans les intentions de vote, ce qui lui permet d’espérer une victoire. Mais sa candidature se décidera à l’issue des scrutins régionaux de septembre où l’extrême droite se prépare à un triomphe. Merz avait juré en 2019 de “diviser par deux les électeurs de l’AfD”. Aujourd’hui, ils sont deux fois plus nombreux.




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