Si vous comptiez vous rendre dans votre pharmacie habituelle ce jeudi, le résultat risque bien d’être le même, où que vous soyez en France : un rideau tiré et une officine fermée. A l’appel des principaux syndicats, les pharmaciens sont appelés à la grève pendant 24 heures, et manifesteront également à travers le pays. 90 à 95 % des 20 000 officines devraient être fermés, affirment les organisations syndicales, dans une mobilisation qui devrait atteindre des niveaux inédits depuis plus de dix ans.
“Les pharmaciens d’officine sont en colère et comptent bien le faire savoir !”, affirme l’Union de syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) dans son communiqué. Dans leur collimateur, des problématiques financières, et une volonté de mettre en exergue les difficultés économiques du secteur. Les pharmaciens réclament notamment une revalorisation de leurs honoraires et de leurs aides, selon eux indispensable pour faire face à l’explosion des charges en raison de l’inflation.
Une revalorisation d’1 milliard d’euros réclamée
Alors que les syndicats espéraient une revalorisation de près d’1 milliard d’euros par rapport à 2019, le montant proposé par l’Assurance maladie lors des négociations conventionnelles, ouvertes fin 2023, serait loin du compte à leurs yeux. “Le budget qui est sur la table ne permet pas de financer toutes les officines”, assure le président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), Philippe Besset, rappelant que 46 pharmacies ont fermé depuis janvier, après 330 fermetures en 2023.
Ce que l’assurance maladie propose “ne peut pas suffire surtout quand on met en regard de ces propositions” les sommes en cours de négociations pour les médecins, avance quant à lui, auprès de l’AFP, Pierre-Olivier Variot, président de l’USPO. Un budget jugé d’autant plus insuffisant alors qu’il est demandé au secteur “d’effectuer des missions supplémentaires de santé publique”, comme des vaccinations ou des dépistages, estime l’organisation syndicale.
Pénuries et ventes en ligne
Autre forte revendication des pharmaciens : des solutions face aux pénuries de médicaments, qui “complexifient la prise en charge des patients et alourdissent la gestion quotidienne de notre exercice”, détaille la FSPF. Ces problèmes d’approvisionnement avaient encore explosé de plus de 30,9 % en 2023, avait détaillé en début d’année l’Agence de sécurité du médicament (ANSM). En volume, cela représente près de 5 000 signalements de ruptures de stocks ou de risques de ruptures, qui viennent alourdir les journées des pharmaciens, à la recherche de solutions alternatives pour leurs clients.
Si une loi a été votée en mars dernier à l’Assemblée nationale à ce sujet, imposant des stocks planchers aux industriels, la réponse ne semble pas avoir pleinement convaincu le secteur. D’autant plus que les syndicats sont également vent debout contre un autre projet politique : la possible libéralisation de la vente en ligne de médicaments, une piste avancée par l’exécutif en début d’année. Les organisations dénoncent un “risque supplémentaire de déstabilisation du réseau officinal”, avec la possible entrée sur le marché de géants comme Amazon et une concurrence jugée déloyale. “Les plateformes avec des stocks déportés, ça s’appelle Amazon. Donc c’est la mort de la pharmacie”, a prévenu Pierre-Olivier Variot.
“Pour ouvrir les yeux du gouvernement sur les conséquences des politiques menées depuis de trop nombreuses années, nous n’avons, dans l’immédiat, d’autre choix que de baisser le rideau et attendons de l’Assurance maladie les moyens indispensables à la survie du réseau officinal”, conclut la FSPF dans son communiqué.
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