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Guerre en Ukraine : la colère de Kiev face au rapprochement entre la Russie et la Chine


Volodymyr Zelensky durcit assez drastiquement le ton contre la Chine. Le président ukrainien a accusé dimanche Pékin de “faire pression” sur des pays afin qu’ils ne se rendent pas au sommet sur la paix, organisé en Suisse, qui doit se tenir du 15 au 16 juin. Cette grande conférence, à laquelle 106 pays ont déjà confirmé leur participation selon le président ukrainien, ne verra pas de représentant russe y participer, le pays n’ayant pas été invité à la demande de l’Ukraine. Mais il ne devrait également pas y avoir de représentant chinois, Pékin ayant fustigé la non-participation de la Russie, confirmant leur rapprochement toujours plus fort.

Pourtant, jusqu’ici, la posture de l’Ukraine vis-à-vis de la Chine se voulait surtout pragmatique. N’ignorant rien des liens intenses liant les deux pays, Volodymyr Zelensky souhaitait avant tout arrondir les angles avec Pékin, notamment avec l’espoir que la Chine contribue le moins possible à l’effort de guerre du Kremlin. Le président ukrainien se gardait même de tacler directement son homologue chinois Xi Jinping, même lorsque ce dernier mettait en scène de façon toujours plus ostensible son “amitié” avec Vladimir Poutine. Un jeu diplomatique probablement perdu d’avance, alors que les liens commerciaux entre la Russie et la Chine ont plus que doublé ces trois dernières années, dépassant les 240 milliards de dollars en 2023 selon les douanes chinoises, et que Poutine et Xi Jinping ne cessent de mettre en avant leur convergence de vue sur l’état du monde, notamment leur rejet du modèle occidental.

De son côté, la Chine tenait surtout à vouloir apparaître aux yeux du monde comme une force de paix et de médiation en Ukraine. Même si son narratif de la guerre se calquait surtout sur celui de Moscou, n’ayant jamais officiellement condamné l’invasion russe, qualifiant régulièrement le soutien occidental à Kiev d'”escalade”, et appelant au “respect des préoccupations de sécurité russes”, les mêmes mots que ceux utilisés par la propagande de Moscou.

Un appui diplomatique chinois à la Russie

Mais ce très fin équilibre diplomatique entre la Chine et l’Ukraine, déjà souvent mis à rude épreuve, aura semble-t-il définitivement cédé à l’approche du sommet sur la paix organisé en Suisse. Pour Volodymyr Zelensky, cet événement doit représenter l’occasion de réunir le plus large nombre de pays dans le monde autour de la cause ukrainienne, et contre le régime de Vladimir Poutine. Avec notamment trois sujets qui devraient être au coeur des discussions, a-t-il déclaré : la sécurité nucléaire, la sécurité alimentaire, et la libération des prisonniers de guerre ainsi que des enfants ukrainiens enlevés par la Russie.

De son côté, la Russie multiplie les déclarations pour délégitimer cet événement et convaincre des pays de ne pas s’y rendre. Une tentative de déstabilisation à laquelle prendrait donc également part la Chine, a assuré ce week-end Volodymyr Zelensky. “Ce que la Russie est en train de faire, c’est qu’elle parcourt de nombreux pays dans le monde et les menace de bloquer les produits agricoles, les produits alimentaires, elle menace d’augmenter les prix de l’énergie. De ce fait, elle pousse les pays du monde entier à ne pas participer au sommet”, a fustigé le président ukrainien, ajoutant qu’il disposait bien d’informations selon lesquelles certains pays l’assisteraient dans ce sens. Et se servirait en particulier de “l’influence chinoise” et de “diplomates chinois” pour “perturber le sommet”.

Un soutien militaire en question

La charge de Zelensky sur l’appui chinois à la Russie ne s’arrête pas là. Sur l’épineux sujet du soutien militaire de Pékin à Moscou, le président ukrainien a là aussi prononcé des accusations très fermes. “[Xi Xinping] m’avait promis que la Chine se tiendrait à l’écart et qu’elle ne soutiendrait pas la Russie avec des armes. Aujourd’hui, des preuves provenant de notre renseignement indiquent que, d’une manière ou d’une autre, des choses arrivent sur les marchés russes via la Chine. Des éléments de l’armement russe proviennent de Chine”, a-t-il assuré ce week-end. Une “ligne rouge” fixée par les Etats-Unis, qui assuraient encore ces dernières semaines ne pas avoir de preuve de la moindre livraison d’armes entre les deux pays.

De son côté, Pékin s’est de nouveau défendue de cette accusation. La Chine “n’a fourni d’armes à aucun des deux camps, et exerce un contrôle strict sur les exportations de biens à double usage (les biens d’origine à vocation civile, mais pouvant avoir une utilisation militaire, NDLR)”, a déclaré un porte-parole du ministre des Affaires étrangères. “Nous nous tenons fermement du côté de la paix et du dialogue”, a t-il complété.

De façon plus globale, Pékin a démenti toutes les accusations de pressions mises pour détricoter le sommet en Suisse. “Utiliser la politique de la force n’est pas le style de la diplomatie chinoise, […] la position de la Chine est ouverte et transparente, et en aucun cas nous ne faisons pression sur d’autres pays”, a déclaré le ministère chinois des Affaires étrangères. Celui-ci a également ajouté “espérer sincèrement que cette conférence de paix ne deviendra pas une plateforme pour créer de la confrontation entre camps”, et que “ne pas participer à la conférence ne veut pas dire que l’on ne soutient pas la paix”.

Depuis maintenant plusieurs mois, la Chine presse la Russie et l’Ukraine à aboutir à un accord de paix… aux conditions russes, en particulier concernant le maintien des gains territoriaux du Kremlin. Des arguments forcément inaudibles pour la présidence ukrainienne, comme l’a encore répété Volodymyr Zelensky ce week-end. “Ce sont les Ukrainiens qui sont morts et les Russes ont violé nos femmes. Ils ont volé des dizaines de milliers de nos enfants. Personne d’autre n’a le droit de dicter comment cette guerre doit se terminer.”




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