“Dans trois ans, j’irai me baigner dans la Seine devant témoins pour prouver qu’elle est un fleuve propre.” Heureusement, Jacques Chirac a su ne pas persévérer. Mais le macronisme n’est pas un chiraquisme, il est une volonté. Tenace. Organiser les Jeux olympiques de Paris 2024 sans épreuve dans le fleuve parisien sous prétexte qu’y barboteraient quelques bactéries ? Impensable, pour Emmanuel Macron. Grandioses seront ces JO. “Bien sûr que j’irai [me baigner dans la Seine]”, avait-il déclaré en février 2024 devant la presse. A la mairie de Paris, on est du même avis. “Je vous le dis : oui, on va nager. Oui, on va le faire”, jurait Anne Hidalgo en janvier. La rivalité, en politique, fait des merveilles. Mais se révèle relativement inutile pour combattre les Escherichia coli.
Tandis que la Seine (et la Marne), depuis des mois, bénéficie de traitements d’assainissement, les derniers prélèvements indiquent toujours une présence trop importante de bactéries, la faute, notamment, à la météo qui maintient la température de l’eau sous les 22 degrés nécessaires à la disparition de ces organismes. Le 23 juin, date espérée par Anne Hidalgo pour une première démonstration de “son petit crawl”, selon ses mots, les Escherichia coli pourraient être encore trop nombreuses, empêchant ainsi un plongeon. Scénario le plus probable à ce stade : un report des festivités le 30 juin. Et si ce monde sous-marin effrayant et “le débit encore trop puissant” de l’eau, dixit les conseillers de l’Hôtel de ville, constituaient la plus grande chance de la nageuse parisienne ?
Car, selon nos informations, le courrier officiel adressé par la maire de la capitale le 23 mai dernier à Emmanuel Macron, afin de lui proposer de faire bain commun, demeure à ce jour sans réponse. A l’Elysée, on confirme la réception de la missive, l’absence de réponse, mais on se garde bien de préciser la date de la démonstration de nage papillon du chef de l’Etat. L’agenda présidentiel est si mouvant…
“C’est une affaire de maire, pas de président”
Un silence qui pourrait suggérer, imagine-t-on dans l’entourage d’Anne Hidalgo, que le spectacle de natation synchronisée organisé par la mairie – et pour lequel la maire a déjà choisi sa “combinaison couvrant le haut des cuisses et le haut des bras, car l’eau sera froide !” – soit remplacé avant l’heure par un solo du nageur élyséen. En clair : que le chef de l’Etat coupe l’herbe sous la palme de la maire en inaugurant la Seine avant, seul. Ses conseillers ne confirment ni ne démentent.
“Je ne sais pas quel signe il voudrait donner en faisant cela, observe, placide, Anne Hidalgo. Je ne pense pas qu’il ait l’inélégance d’un plongeon solitaire. Chirac était maire de Paris quand il a fait sa promesse… C’est une affaire de maire, pas de président.” Et la même de réitérer son invitation : “Il est le bienvenu, je partage la photo !” Autour d’elle, la foi en l’être humain, surtout quand il s’appelle Emmanuel Macron, paraît moins tenace : on parie plutôt sur l’apparition soudaine sur les réseaux sociaux d’un cliché léché et brumeux, en noir et blanc, signé de la photographe officielle Soazig de la Moissonnière, représentant le chef de l’Etat goûtant l’eau, avant tout le monde. Un bain pour finir d’assécher les relations. Peu commun.
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