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Russie : la nouvelle tournée diplomatique anti-occidentale du Kremlin en Afrique


La Guinée, le Congo, le Burkina Faso, et enfin le Tchad. Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov s’est engagé depuis ce lundi 3 juin dans une nouvelle tournée diplomatique en Afrique, aux habituels relents anti-occidentaux.

Le Kremlin a largement accéléré ces dernières années sa campagne d’influence sur le continent africain, bien accompagné par des putschs militaires chassant les régimes proches de l’Occident et de la France, en particulier dans la lutte antidjihadiste.

Mais si certains pays africains semblent avoir déjà très clairement adhéré au narratif russe, que ce soit le régime d’Assimi Goïta au Mali ou encore la junte militaire au pouvoir depuis septembre 2023 au Niger, le choix de ces quatre pays pour cette nouvelle tournée n’a rien d’un hasard. Que ce soit la Guinée, le Tchad ou le Congo-Brazzaville, et dans une moindre mesure le Burkina Faso, les gouvernements à la tête de ces pays ne figurent pas parmi les plus vindicatifs à l’égard de Paris, malgré un début de bascule de plus en plus net opéré vers Moscou.

Des alliés pour son conflit en Ukraine

Le Kremlin l’a bien compris, et cette nouvelle tournée africaine de Sergueï Lavrov s’est de nouveau voulue particulièrement agressive à l’égard de l’Occident. En visite au Congo ce mardi, le chef de la diplomatie russe a ainsi assuré le président Denis Sassou Nguesso de son soutien pour son initiative d’une conférence de réconciliation en Libye, pays toujours fracturé en deux administrations rivales. L’occasion surtout de charger ses rivaux occidentaux. “La même chose s’est passée en Irak et en Afghanistan, où l’Occident a voulu imposer son mode de démocratie. Le plus important aujourd’hui est de trouver une approche qui assurera le rétablissement du pays”, a lancé Sergueï Lavrov.

Mais le sujet libyen est également un prétexte parfait pour en arriver au cœur de la venue du ministre russe : la guerre en Ukraine. Pour Lavrov, l’idée est de fustiger le parallèle entre le désordre créé par l’Occident dans le monde, particulièrement en Afrique, et le soutien occidental au régime de Kiev. Ainsi “le président Sassou a fait preuve de compréhension”, vis-à-vis “de nos actions” en Ukraine, a déclaré Sergueï Lavrov. “Il comprend bien que l’Ukraine est l’instrument de l’Occident, dont l’objectif est d’infliger une défaite stratégique à la Russie”, a-t-il estimé.

Avec derrière ces mots, un objectif également très précis : poursuivre la campagne russe de déstabilisation et de dénigrement autour de la conférence sur la paix en Ukraine, prévue le 15 et le 16 juin en Suisse, et à laquelle la Russie n’a pas été invitée. Ainsi, selon Lavrov, le président congolais, “comme d’autres leaders du monde”, serait persuadé que cet événement “n’a aucun sens” sans la participation de Moscou. De son côté, le président ukrainien Volodymyr Zelenskyrevendiquait en début de semaine 106 pays participants, et dénonçait des tentatives de pression de la Russie et de la Chine pour empêcher des Etats de se rendre en Suisse.

L’influence russe au Sahel

Au-delà du dossier ukrainien et de la recherche de nouveaux alliés dans sa guerre en Ukraine, Sergueï Lavrov a également profité de cette tournée pour assurer du soutien durable de Moscou dans le Sahel. C’est notamment le cas au Burkina Faso, qui a déjà assez largement tourné le dos à la France pour se tourner vers la Russie. Et ce, notamment depuis l’arrivée au pouvoir du capitaine Ibrahim Traoré à la suite d’un putsch, en septembre 2022.

En visite à Ouagadougou ce mercredi, le chef de la diplomatie russe a ainsi annoncé que le nombre d’instructeurs russes au Burkina Faso allait “augmenter”. “En parallèle, nous formons en Russie des représentants des forces armées et des forces de l’ordre du Burkina Faso. Ce type de partenariat est donc très concret et a beaucoup progressé. […] Nous entretenons des relations de longue date avec le Burkina Faso, et avec l’arrivée du président Traoré au pouvoir, ces relations ont reçu une nouvelle impulsion”, a poursuivi Sergueï Lavrov.

Le Burkina Faso est notamment confronté depuis près de dix ans à des violences djihadistes qui ont fait des milliers de morts et plus de deux millions de déplacés internes. Un combat contre lequel la France s’était particulièrement engagée cette dernière décennie, avant de se voir assez largement supplantée dans la région par la Russie et ses milices Wagner. “Je n’ai aucun doute que grâce à cette coopération, les poches de terrorisme qui restent au Burkina Faso seront détruites”, a prédit Sergueï Lavrov.

Le Tchad, dernière puissance convoitée

Pour conclure sa tournée, Sergueï Lavrov est arrivé ce mercredi après-midi au Tchad. Dernier allié de la France au Sahel, où l’armée dispose encore d’un contingent d’un peu plus de mille soldats, la Russie fait là aussi les yeux doux au général Mahamat Idriss Déby Itno, à la tête d’une junte militaire depuis 2021 et réélu président il y a quelques semaines.

“La Russie a une présence militaire dans quatre des six pays frontaliers du Tchad et a tout intérêt à faire basculer cet Etat pour bâtir une alliance antioccidentale”, notait auprès de L’Express il y a quelques semaines Cameron Hudson, chercheur au Center for Strategic and International Studies. “Au cœur de cette guerre d’influence, Déby veut jouer sur les deux tableaux pour assurer au mieux son avenir. Il s’est d’abord appuyé sur la bénédiction de la France pour accéder au pouvoir, mais veut diversifier ses soutiens et voit bien que la rupture avec les Occidentaux est un argument populaire chez les jeunes citadins”.




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