Il mène la charge contre l’État-major de son père. Yaïr Netanyahou, 32 ans, a ressorti son arme la plus redoutable : les réseaux sociaux. Hyperactif en ligne, le premier des fils de Benyamin Netanyahou monte systématiquement au front pour défendre son géniteur. Des accusations de fraude ou de corruption en 2020 aux dénonciations actuelles de sa mauvaise gestion de la guerre à Gaza, qui provoquent depuis des plusieurs semaines des manifestations réunissant des dizaines de milliers de personnes à Tel-Aviv.
Alors qu’il s’était fait discret depuis son départ précipité aux États-Unis, il y a un an et demi, l’héritier revient plus mordant que jamais avec une série d’attaques au grand jour contre plusieurs figures haut placées du gouvernement et de l’armée israélienne, accusés par son père, à cause de leurs échecs contre le Hamas, de déloyauté.
Samedi 15 juin, Yaïr Netanyahou s’en est pris, dans une vidéo postée sur Instagram, aux grands chefs de la sécurité israélienne, les qualifiant de “ratés mortels” ou d’”erreurs fatales”. Il s’agissait du chef d’état-major, Herzi Halevi, du chef du renseignement militaire, Aharon Haliva, et de celui du Shin Bet, Ronen Bar. Le lendemain, il dénonçait une “trahison” de plusieurs officiers le 7 octobre, sur le réseau social X, allant jusqu’à accuser la Cour suprême de les couvrir en ayant suspendu une enquête controversée sur d’éventuels manquements de l’armée lors de l’attaque du Hamas. “Qu’essaient-ils de cacher ?, interrogeait le jeune homme. S’il n’y a pas eu de trahison, pourquoi ont-ils si peur que des sources indépendantes et extérieures enquêtent sur ce qu’il s’est passé ?”
Et de poursuivre, plus accusateur que jamais : “Pourquoi les chefs de l’armée et des renseignements ont-ils toujours dit au Premier ministre que le Hamas était dissuadé d’attaquer Israël ? Où était l’armée de l’air le 7 octobre ?”. Les soutiens du pouvoir militaire dénonçaient dans l’enquête une initiative susceptible de porter atteinte aux capacités opérationnelles de l’armée israélienne en pleine guerre, et faisaient part de leurs craintes que la responsabilité des politiques ne soit pas abordée.
Offensive mordante contre l’armée israélienne
Le mois dernier, Yaïr Netanyahou avait publié une vidéo d’un réserviste, le visage masqué, jurant allégeance au Premier ministre en menaçant d’une mutinerie contre le chef de l’État-major et ministre de la Défense, Yoav Galant, si Tsahal devait renoncer а son objectif de “victoire complète” contre le Hamas. En décembre, selon le média Times of Israël, il avait également relayé “un post qui accusait Halevi d’avoir lancé de facto un coup d’Etat militaire le 7 octobre, affirmant que le chef de Tsahal avait été averti au préalable de l’assaut meurtrier du Hamas et qu’il n’avait pas transmis cette information au Premier ministre”.
Mardi 18 juin, c’est une vidéo du commentateur politique Yaakov Bardugo qui a été relayée sur son compte. La figure médiatique y accuse le général Halevi de soutenir en réalité la présence du Hamas au pouvoir à Gaza. Le post de trop pour Tsahal ? L’affirmation “selon laquelle le chef d’état-major soutient la préservation du régime du Hamas à Gaza, est un mensonge honteux et tout à fait infondé”, a répondu l’armée dans un communiqué. Sans citer le fils du Premier ministre, elle a aussi déploré “des allégations” récentes, qui viseraient “à causer du tort à l’armée et au chef d’état-major qui la dirige”.
Depuis des mois, le clan Netanyahou et l’armée israélienne s’affrontent sur la promesse faite par le Premier ministre d’éliminer complètement le Hamas. “L’idée de détruire le Hamas, c’est jeter du sable aux yeux du public israélien”, a ainsi répondu, mercredi 19 juin, le porte-parole de l’armée, le contre-amiral Daniel Hagari, face aux rumeurs attisées par Yaïr Netanyahou. “Le Hamas est une idée, le Hamas est un parti politique. Il est enraciné dans le cœur des gens. Quiconque pense que nous pouvons éliminer le Hamas se trompe”, a-t-il ajouté.
Un fils aussi embarrassant qu’efficace
Yaïr Netanyahou est connu pour être le chef de file des plus farouches supporters d’extrême droite de son père. Si bien que Benyamin lui-même a dû, à plusieurs reprises, se distancier de ses déclarations. Car son plus grand pouvoir réside dans ses prises de parole très suivies sur les réseaux sociaux, ainsi que sur les plateaux de télévisions. Après avoir accusé en mars 2023 les Etats-Unis de financer les opposant de son père afin de servir les intérêts de l’Iran, il a finalement été envoyé se réfugier à Miami, chez de fortunés amis de la famille.
Malgré tout, les sorties du fils restent utiles au père pour mener des batailles difficiles à assumer publiquement, comme celle qui se déroule actuellement avec sa propre armée. Depuis huit mois, le Premier ministre tente de se débarrasser de la responsabilité de l’écroulement du 7 octobre en la rejetant sur le commandement militaire, et commence désormais à leur attribuer les échecs de la campagne à Gaza.
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