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Charles Consigny : “Les Français cherchent une alternance que les macronistes refusent de leur donner”


Il n’avait pas sa robe d’avocat. Ni même son costume noir sur chemise blanche de chroniqueur chez BFM TV. Ce 10 juillet, lorsqu’il pousse les portes du café parisien dans lequel nous lui avons donné rendez-vous, c’est en tee-shirt et un brin en retard – “Désolé, j’ai un déj’ avec une sénatrice qui s’est éternisé” – que Charles Consigny, 35 ans ce 14 juillet – “ne m’en parlez pas, je sors un livre sur le sujet à la rentrée” – débarque, prêt, comme à son habitude, à répondre sans détour aux questions que nous lui posons sur l’erratique vie politique française de ces dernières semaines. Face à nous, jus d’oranges pressées à la main, un jeune homme de droite, orphelin d’un courant républicain longtemps dominant en France et qui a vu son électorat se réduire à peau de chagrin en l’espace d’une décennie. Mais qui ne désespère pas de voir revenir sur le devant de la scène une droite “à la fois gaulliste et libérale”.

Sévère avec LR, qui “n’arrive plus à dire ce qui les différencie du RN”, Charles Consigny s’est fait remarquer dans l’entre-deux tours – sa prise de position lui a valu quelques louanges sur les réseaux sociaux – pour avoir appelé à faire barrage au RN, quitte à envisager certaines alliances avec le Nouveau Front populaire. “Je préfère encore un pays gouverné par la gauche qu’un pays aux mains de l’extrême droite”, assume-t-il, même si le programme du NFP lui paraît à bien des égards “liberticide”. Pas tendre non plus avec Emmanuel Macron, en qui il avait placé quelques espoirs en 2017, Charles Consigny vilipende un président “qui manipule les Français et qui ne les aime pas”. Entretien.

L’Express : Que vous inspirent les résultats des législatives ?

Charles Consigny : L’enseignement majeur de cette élection, c’est sans conteste la survie du cordon sanitaire autour du Rassemblement national, c’est-à-dire ce niet très net que les Français ont posé. Contrairement sans doute à ce que les cadres du RN pensaient, sa dédiabolisation n’est pas du tout achevée. J’observe à ce propos que du côté des autres formations politiques, elle n’est pas achevée non plus, mais dans un but essentiellement tactique : elles ont vu leur intérêt à la diabolisation féroce du RN, lequel est pris dans sa propre rhétorique du bouc émissaire.

Comment ça ?

Là où depuis des années le RN construit son projet en se servant de l’étranger comme bouc émissaire, ennemi commun soudant le reste du pays et étant coupable de tous les maux, le voilà pris à son propre jeu et devenu bouc émissaire à son tour, bête noire bien commode pour les autres formations politiques. Dans la population, en revanche, je pense qu’il y a moins de cynisme et qu’en réalité, les Français ont exprimé un vrai souhait : ne pas donner le pouvoir à un parti d’extrême droite. Ils n’ont pas envie de se jeter dans les bras d’une formation qui utilise comme base de départ de son programme une animosité irrationnelle contre les étrangers et les musulmans.

Le rêve secret de Bardella, c’est d’être “le président de l’UMP”, à l’ancienne

Vous faites partie des rares personnalités de droite à avoir appelé à un barrage contre le RN, quitte à voter pour un candidat NFP. Cela vous a même valu quelques passes d’armes sur les plateaux télé. “Quand Consigny est le mec le plus raisonnable du plateau, ça fait peur”, a commenté un internaute…

Pour quelqu’un de droite, appeler à voter contre une formation, en l’occurrence le RN, c’est-à-dire en fait dans certains cas pour la gauche et parfois même l’extrême gauche, cela demande, disons, une certaine maturité politique. Car dans la hiérarchie des périls, je préfère encore un pays gouverné par la gauche, qui serait quand même plus respirable qu’un pays aux mains de l’extrême droite. Si je n’avais pas pris cette position, j’aurais eu le sentiment de m’être planqué, d’avoir manqué de courage.

Ce n’est pourtant pas le discours qui a prédominé chez LR…

Que les cadres de LR n’aient pas pris position est la suite logique de leurs innombrables erreurs ces dernières années. Ce n’est pas insulter les électeurs que de leur dire qu’en tant qu’héritiers de la famille gaulliste, nous ne pourrons jamais faire d’alliance avec l’extrême droite. C’est d’autant plus nécessaire pour la droite républicaine que le RN ne cherche en réalité qu’à la remplacer. Si le RN avait gagné ces législatives, il aurait tout simplement mangé les Républicains. Et à la fin, le patron de la droite aurait été Jordan Bardella. C’est d’ailleurs, je pense, son rêve secret, être “le président de l’UMP”, à l’ancienne.

Si la droite n’arrive plus à dire ce qui la différencie du RN, sur les questions de libertés publiques, mais aussi sur les questions économiques et sociales, elle sera complètement effacée par le RN, un parti qui, je le rappelle, est pour l’abrogation de la réforme des retraites. Or, pour moi, un parti de droite qui se respecte doit être en faveur de la retraite à 75 ans. J’exagère bien sûr.

Votre constat n’est-il pas contredit par le vote des électeurs ? Si l’on regarde les chiffres du second tour, une majorité d’électeurs LR se sont reportés sur le RN lorsqu’il y a eu un duel avec le NFP toutes tendances confondues.

En réalité, si on regarde en arrière, il y a toujours eu des appels de militants RPR, UMP ou LR à faire alliance avec l’extrême droite, parce qu’ils estiment que les électeurs des deux bords pensent la même chose sur beaucoup de sujets. Mais les patrons des partis ont toujours tenu bon là-dessus. D’abord, si on établit la filiation historique des choses, il ne peut pas y avoir d’alliance entre, d’un côté, les héritiers de De Gaulle et, de l’autre, ceux de Vichy. Ensuite, il y a des raisons stratégiques. S’ils commencent à faire des alliances, à la fin, comme je vous le disais, ils se feront bouffer par le plus extrême des deux. Les Républicains auraient tort de penser qu’ils pourraient maintenir l’équilibre. Regardez Eric Ciotti, il est passé de président des Républicains à second couteau du RN.

Le rôle des politiques n’est pas forcément de suivre aveuglément ce que demandent les militants et les électeurs. D’une façon générale, les cadres LR sont beaucoup trop, à mon sens, dans une politique de la demande au lieu d’être dans une politique de l’offre. Ils n’arrêtent pas de s’interroger sur ce qu’attendent les électeurs et donc ils leur donnent des discours de la sécurité qui finissent par ne plus avoir aucun sens, des discours sur l’immigration qui finissent par les faire ressembler à l’extrême droite, sans fournir un effort de créativité, d’intelligence, d’audace. Nicolas Sarkozy disait toujours qu’il fallait mener la bataille des idées et proposer des solutions.

Si les gens finissent par voter RN, c’est aussi parce qu’ils cherchent une alternance que Macron refuse de leur donner

Enfin, sur le plan de leur intégrité politique, LR est en faute, ils passent pour des gens qui, au fond, sont prêts à filer le pays à l’extrême droite sans que cela ne les angoisse plus que ça.

Emmanuel Macron doit-il nommer un Premier ministre NFP comme la gauche le presse de faire ?

Bien sûr. Il faut respecter le résultat des urnes. Ils sont en tête du scrutin, donc c’est à eux de prendre les manettes. Il faut laisser ce Nouveau Front populaire se faire violence pour aller chercher des gens d’accord avec eux dans ce Parlement. C’est ce qui va les amener à mettre de l’eau dans leur vin et à proposer des mesures un tout petit peu plus consensuelles que leur programme stalinien.

Et puis je considère qu’il faut une alternance. Il faut que la Macronie arrête de se comporter comme s’il n’y avait qu’un seul parti raisonnable. Il n’y aurait donc que ces gens du centre mou de raisonnables dans ce pays ? Je trouve cela confiscatoire d’un point de vue démocratique. Je pense à ce propos que si les gens finissent par voter pour le RN, c’est aussi parce qu’ils cherchent une alternance que Macron refuse de leur donner. Il persiste dans ses mauvaises pratiques en considérant que finalement il n’est lié par rien, il n’est soumis à aucune règle. Là, son bon plaisir, c’est de garder son gouvernement, d’attendre un peu, de laisser les JO pourrir la situation, d’essayer de faire en sorte que la gauche s’entredévore, de débaucher ce qu’il pourra débaucher à droite. Donc de continuer ce petit micmac. L’Élysée a communiqué sur le fait qu’il refusait la démission d’Attal “afin d’assurer la stabilité du pays”. On peut peut-être se calmer une seconde. Parler de stabilité des institutions à la limite, de continuité du gouvernement pourquoi pas, mais enfin… Macron aurait accepté la démission d’Attal, le pays ne se serait pas retrouvé non plus en situation de guerre civile ! Ils ont quand même “pris le melon”.

Dans une lettre aux Français, Emmanuel Macron a appelé à une large coalition des forces républicaines, assurant au passage que “personne ne l’a emporté” à l’issue du scrutin…

En gros, il entend non seulement s’asseoir sur le verdict des Français mais en plus faire supporter par d’autres que lui le résultat catastrophique de cette dissolution. A mon sens, la logique démocratique est inverse. Il y a quand même un camp qui est en tête, à qui il revient de proposer un nom à Macron. Si le NFP lui proposait Mélenchon, il devrait accepter Mélenchon. Quitte à ce que ce nouveau Premier ministre se fasse renverser deux semaines plus tard ! C’est dans ce sens-là que cela doit se faire et pas de cette manière un peu royale que Macron souhaite. Or, ce qu’il est en train de nous dire, là, c’est qu’il faudrait faire barrage à la fois à l’extrême droite et à l’extrême gauche, dans laquelle il met aussi des écologistes et des gens de gauche modérée. Ce discours revient à dire qu’on ne peut plus voter que pour les macronistes finalement, c’est quand même du délire !

Comprenez-vous toutefois que des responsables politiques continuent de mettre un signe égal entre le RN et le NFP tendance LFI, aux prises avec des accusations d’antisémitisme ?

Il y a quand même des fous furieux à gauche et pas forcément seulement là-dessus. La gauche est gonflée de nous demander de voter pour elle contre l’extrême droite et de nous proposer un programme extrêmement liberticide en matière fiscale notamment. Je vous rappelle que François Ruffin et Delphine Batho, par exemple, avaient déposé une proposition de loi à l’Assemblée pour instaurer un quota limitant le nombre de trajets en avion qu’un Français pouvait faire chaque année. Et pendant qu’on fait ça, les Américains, les Chinois, les Brésiliens, tout le monde continue à polluer beaucoup plus que nous. C’est une mesure inutile en matière d’écologie, une mesure de pure inspiration autoritaire destinée à entraver la liberté.

Marine Le Pen pourrait être un personnage de Game of Thrones

Je pense que le barrage au RN aurait encore mieux fonctionné si la gauche avait été plus modérée. Sur le fond des programmes, c’est une gauche dangereuse et animée par cet étrange désir de faire du mal à son prochain, une gauche que je combats totalement. Quand j’entends des responsables politiques comme Jérôme Guedj, qui n’est pourtant pas LFI, j’ai l’impression d’entendre la vieille gauche obsédée par les impôts et par les vieilles lunes socialistes qui n’ont jamais fonctionné.

A droite, la révélation par la presse de dîners entre Edouard Philippe, Thierry Solère, Jordan Bardella et Marine Le Pen notamment a fait beaucoup de bruit…

Je ne suis pas choqué. Il est sain dans un système démocratique de pouvoir dialoguer les uns avec les autres. Si tout à coup il n’y a plus de dialogue possible, on va à l’affrontement. Quand vous faites une soirée électorale et que vous buvez un coup avec un député RN avant d’entrer en plateau, cela ne veut pas dire que vous partagez ses convictions ou que vous êtes un collabo, il ne faut pas exagérer ! En revanche, du point de vue d’Edouard Philippe qui a cette image de “sioux”, le moins que l’on puisse dire, c’est que ce n’est pas très prudent…

Ma conviction profonde, c’est que Marine Le Pen est un très gros objet de curiosité pour tous ces messieurs pleins de testostérone qui veulent devenir président de la République. Edouard Philippe n’a pas résisté à sa curiosité. Marine Le Pen est quand même très habile, elle ne vient pas du tout du même univers qu’eux, ils sont très curieux de cette femme, et je dirais même qu’ils ont tous une espèce d’admiration pour son sens politique et une certaine forme de résilience. Elle a un côté cheftaine bretonne, gauloise. Elle pourrait être un personnage de Game of Thrones, dans son château en Bretagne, devant les flots à fomenter sa conquête de Paris.

Après ces législatives, Jordan Bardella ne ressort-il pas plus affaibli que Marine Le Pen ?

Cela peut être une espèce d’aubaine pour Marine Le Pen vis-à-vis de Jordan Bardella. Le résultat de ce second tour a cassé son image de surhomme politique. On avait quand même des gens qui commençaient à nous expliquer que Bardella était un cyborg qui n’avait quasiment pas besoin de manger ni de s’hydrater. C’est un garçon agile en plateau, sur les réseaux sociaux et dans le parti, mais il a des lacunes, comme on dit à l’école. Un des nœuds du problème pour le RN, je crois, c’est que Marine Le Pen n’a pas envie, à titre personnel, d’être présidente de la République. Tous les gens qui la connaissent un peu expliquent que c’est quelqu’un qui aime s’amuser, se reposer. Et je pense que la charge lui fait peur et l’épuise d’avance. Cette espèce de refus d’obstacle chez elle irrigue tout le parti.

La campagne des européennes de LR a été décevante

Deuxièmement, c’est un parti qui a besoin de son vieux fond de sauce un peu raciste pour garder quelques militants excités qui font vivre la flamme. Voilà pourquoi ils sont toujours dans une forme d’ambiguïté par rapport à cela. Enfin, ils constituent un ennemi tellement commode pour tous les autres partis. Le RN se retrouve toujours avec le même phénomène contre lui au dernier moment : une majorité de Français ne veulent pas lui donner les clés du pays. Tout cela me fait dire qu’ils n’obtiendront jamais le pouvoir. Mais il ne faut jamais se hasarder à des pronostics en politique !

Seuls 9 % des électeurs de votre âge ont voté LR. Comment l’expliquez-vous ? Vous sentez-vous orphelin d’une droite classique de gouvernement ?

Je ne donne pas la droite républicaine pour morte. Il y a encore un écho dans le pays, un espace politique, un électorat pour un vote de droite traditionnel et sécurisant pour les gens, c’est-à-dire moins de fiscalité, plus de fermeté pénale, plus d’ordre et une prime à la vitalité économique. Ce que je vous décris là est aujourd’hui préempté sur la droite par l’extrême droite et vers le centre par les macronistes, ce qui n’est rendu possible que par le défaut de politique de l’offre de LR. Ce parti a un énorme défaut de renouvellement des visages, de renouvellement des élus, de renouvellement du discours. Quand je vois qu’ils sont en train d’organiser encore un nouveau parti entre tous ceux qui ont toujours été là, sans du tout aller chercher des nouvelles têtes, ils persévèrent dans l’erreur. Contrairement à ce que certains prétendent, leur campagne des européennes a été, à mon sens, décevante. Commencer la campagne à 7 % dans les sondages et la finir à 7 % des voix, je suis désolé mais ça veut dire qu’ils n’ont pas fait une bonne campagne.

Javier Milei se présenterait en France, il aurait mon vote !

Qui est le mieux placé pour prendre le leadership chez LR ?

Le leader naturel, c’est Wauquiez. J’observe toutefois qu’il est de plus en plus contesté, notamment par David Lisnard. Je note qu’il y a des jeunes quinquas intéressants chez LR. Comme Agnès Evren [NDLR : sénatrice de Paris], qui a une forme de modernité intéressante. Aurélien Pradié a quelque chose. Philippe Juvin est un homme d’excellent niveau. La direction de LR devrait quand même faire l’effort, comme Nicolas Sarkozy en son temps, d’aller chercher des profils dans la société civile. C’était aussi la démarche de Macron en 2017, je l’avais soutenue. C’était une démarche saine d’ouvrir le champ et d’essayer de renouveler le Parlement.

Vous sembliez d’ailleurs séduit à l’époque par le candidat Macron. Quel regard portez-vous sur sa présidence aujourd’hui ?

Ce qu’on a vu chez lui avec cette dissolution, c’est une forme de méchanceté vis-à-vis de ses propres troupes. Il ne les aime pas, sinon il ne les aurait pas détruites comme ça d’un claquement de doigts. C’est en cela, je crois, un point de bascule. Il continue à montrer l’image de quelqu’un qui manipule les choses en coulisses, qui ne respecte pas le résultat des urnes, qui donc en fait se fout de ce que pensent les Français. Ça commence à faire beaucoup. Ce qu’on pressentait depuis longtemps, à savoir que c’est un mec malin, mais qui ne nous aime pas, prend désormais forme de réalité.

Les leçons de morale sur les discriminations conduisent à la xénophobie

Quant à l’espace macronien au sens du centre, il ne mène à rien. On ne prend que des demi-décisions et à force on finit par être un demi-pays. En revanche, un ressort puissant sur lequel peut indéfiniment s’appuyer ce centre, c’est la peur énorme qui existe chez tout bourgeois devant l’inconnu. L’idée qu’on va vers quelque chose qu’on ne maîtrise pas, qu’on ne connaît pas, ça le tétanise. Le candidat qui gagne à la fin est presque toujours le candidat de la bourgeoisie. Par conséquent, le vote bourgeois peut rester indéfiniment acquis à ce centre qui a toujours beau jeu de dénoncer les autres partis comme étant des extrêmes. C’est pour cela d’ailleurs que tout l’effort de la droite, toute la difficulté qu’elle va avoir, c’est à la fois d’être suffisamment radicale pour incarner une forme de changement et en même temps de ne pas effrayer les bourgeois. Personnellement, je ne suis pas représentatif, Javier Milei se présenterait en France il aurait mon vote, je suis prêt à des votes complètement déraisonnables (rires).

Vous semblez très préoccupé par la question de la dette publique. Pensez-vous que ce discours de réduction des déficits passe vraiment auprès des Français ?

C’est vrai que ça ne parle pas à grand monde. Mais ça, pour le coup, c’est la responsabilité des gouvernants. Il leur revient d’expliquer aux gens que si la dette devient trop importante, on emprunte plus cher, et que donc il peut y avoir un effet exponentiel sur la dette et à la fin, la seule solution c’est d’augmenter les impôts puisque nos dirigeants ne savent pas réduire les dépenses publiques. Et en augmentant les impôts, on asphyxie l’économie. Les classes moyennes supérieures, celles-là mêmes qui sont ciblées par le programme du NFP, sont humiliées en réalité par cette incurie politique : elles sont devenues les vaches à lait de tout un système. Macron parlait des premiers de cordée, eh bien ce serait rendre justice à tous ces cadres, ces entrepreneurs, que d’arrêter de les tondre comme si le fruit de leur travail ne leur appartenait pas.

Pour beaucoup d’internautes, vous êtes bourré de paradoxes. Un jour vous dénoncez le retour de la xénophobie en France. Un autre vous vous emportez en plateau contre Thomas Piketty et ses “leçons de morale sur la discrimination”…

Je pense justement que ce sont les leçons de morale sur les discriminations qui conduisent à la xénophobie. On vit en France ce qu’ont vécu les Américains avec l’arrivée de Trump, c’est-à-dire un système médiatique qui les bassine toute la journée avec des sujets qui ne sont pas les leurs : les discriminations, l’antiracisme, une approche très liberticide de l’écologie, etc. Je veux parler de ces Français qui ne font pas partie de la diversité, qui ne sont pas la cible électorale de la gauche, les Français qui gagnent plutôt normalement leur vie et qui aimeraient bien que leur pays fonctionne à peu près. Tout à coup, surgit quelqu’un qui arrive et qui leur dit : mon projet, c’est de réinstaller des usines pour redonner du boulot aux gens, leur laisser faire un barbecue tranquille chez eux le week-end, ne pas les surtaxer, en somme quelqu’un qui leur dit “mon programme, c’est de vous rendre votre mode de vie”. Il ne faut pas s’étonner que les peuples choisissent ce candidat-là. Ça a été le cas pour Trump. Et je pense que c’est pareil pour Bardella et Marine Le Pen. La force en plus du RN, c’est d’avoir pris en compte la sauvegarde de l’État-providence, qui fait partie du mode de vie souhaité par les Français.

Plus vous mettez du politiquement correct à la télé, plus vous avez un vote en réaction à ce politiquement correct. Les gens sentent que c’est une propagande, que l’on essaie de les contraindre à quelque chose. Par exemple, le cinéma français est devenu de la pure propagande. Ce sont des œuvres comme on en faisait à l’époque soviétique. Des films qui plaisent au régime. Si votre film ne parle pas de l’avortement ou d’un migrant qui se cache dans un camion et qui atterrit chez Vincent Lindon dans le VIe arrondissement de Paris, il ne trouve pas son financement. Vincent Lindon [NDLR : Charles Consigny fait référence au long-métrage Comme un fils sorti en 2024]qui est professeur au collège et qui, bien qu’il gagne 2 000 euros par mois, habite dans le film un appartement de 250 mètres carrés au jardin du Luxembourg. Au bout d’un moment, les gens en ont ras-le-bol des leçons et de l’hypocrisie de nos élites en lévitation.




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