6 septembre. Il est temps que la pause estivale se termine. Au Rassemblement national, on l’aime longue et silencieuse. Alors que le tout Paris s’agitait l’été durant autour de la nomination d’un Premier ministre par Emmanuel Macron, les élus du parti d’extrême droite et ses chefs de file, eux, coulaient des jours heureux loin du tumulte médiatique.
Il a bien fallu rentrer. De façon anticipée, d’ailleurs, pour Marine Le Pen et Jordan Bardella, invités par Emmanuel Macron dans le cadre de ses consultations. Ecartés des négociations jusqu’alors, les lepénistes s’étaient retranchés derrière leur costume préféré : celui de l’antisystème. En deux mots : camper une opposition franche en refusant, publiquement, de s’associer à des discussions considérées comme des “tambouilles électorales” dont ils souhaiteraient rester à l’écart.
Mais comme souvent chez les frontistes, il y a la théorie et la pratique. Car, dans les faits, la tambouille électorale, Marine Le Pen adore ça. La stratégie politique, les négociations, aussi. Encore plus depuis qu’elle est à la tête d’un groupe conséquent de députés et en capacité de nuire concrètement à la majorité présidentielle. Voici donc la cheffe de file de l’extrême droite sondée de toutes parts par le camp présidentiel. Quel profil de Premier ministre pourrait lui convenir ? Quelles seraient ses conditions ? Bernard Cazeneuve, Xavier Bertrand, c’est carton rouge. Michel Barnier, en revanche… Pourquoi pas, à voir. Pas de censure a priori en tout cas, assure Marine Le Pen. Et une forte marge de négociation.
“Un bouquet de mesures” réclamé à Michel Barnier
En quelques jours, les frontistes virent de bord, revêtissent à nouveau leur costume de l’opposition responsable. Censurera ou pas ? Le RN attendra le discours de politique générale prononcé par Michel Barnier pour prendre sa décision. Mais la conciliation a un prix. Celui d’un “bouquet de mesures” que Marine Le Pen et ses troupes aimeraient voir mis en place par le nouveau locataire de Matignon. Retour sur le tapis d’un projet réclamé de longue date par le parti lepéniste : la mise en place de la proportionnelle. Mais pas seulement. Trois autres thématiques ont été identifiées : “l’immigration, l’insécurité, et le pouvoir d’achat”, indiquait Marine Le Pen le jour de la nomination de Michel Barnier.
S’agissant du dernier thème, le RN ressort de son chapeau une de ses propositions : la baisse de la TVA à 5,5 % sur l’énergie, portée par Marine Le Pen lors de l’élection présidentielle de 2022, et par le RN lors de la campagne des élections législatives du mois de juillet dernier.
Sur les sujets migratoires et sécuritaires, aucune proposition précise n’a encore été formulée, mais l’entourage de Marine Le Pen indique qu’elles pourraient être tirées des “mesures d’urgence” brandies par Jordan Bardella dans le cadre de la campagne législative. A savoir, sur l’insécurité : la mise en place de peines planchers et la suppression des allocations familiales pour les parents de mineurs délinquants ; et, concernant l’immigration : la suppression du droit du sol, ainsi que celle de l’Aide médicale d’Etat, qui serait remplacée par un fonds spécifique “destiné aux urgences vitales”.
Des lignes rouges à définir
Sur Franceinfo, ce vendredi, la députée RN du Var, Laure Lavalette, a indiqué que les représentants du RN (sans préciser s’il s’agirait de Marine Le Pen ou de Jordan Bardella) se rendraient à la rencontre de Michel Barnier. Les contours de ce “bouquet de mesures” restent à définir, comme les lignes rouges sur lesquelles le RN refuserait de transiger, et les cadres frontistes ne sont pas encore tout à fait alignés sur la position à tenir. Laure Lavalette indiquait par exemple qu’une “hausse d’impôt qui pèserait sur les classes moyennes” constituerait une ligne rouge. “Elle a parlé de ligne rouge ?”, questionnait en privé un stratège lepéniste, sceptique. Une mise au point devrait intervenir dans les prochains jours.
Marine Le Pen, jeudi, a d’ores et déjà pris le temps de briefer ses troupes sur la nouvelle ligne à tenir. Les députés frontistes, pour leur part, en ont retenu une information essentielle : après un été de mise à l’écart, ils sont de retour au centre du jeu politique.
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