Les tractations s’éternisent au Parlement européen. Ursula von der Leyen doit définir les profils et les attributions des commissaires, un par Etat, qui composeront ce nouvel exécutif pour la période 2024-2029. La répartition des plus grands portefeuilles va envoyer un signal quant au poids de chaque Etat membre et de chaque groupe politique et donnera une indication sur les grandes orientations qu’entend impulser la Commission, trois mois après des élections européennes marquées par une poussée de l’extrême droite.
La présentation de la nouvelle équipe de commissaires européens qui doit entourer la présidente Ursula von der Leyen, réélue en juillet, était attendue mercredi 11 septembre à Bruxelles. Elle a été reportée à mardi 17 septembre à Strasbourg, mais reste incertaine du fait de nombreux soubresauts dans les nominations.
Thierry Breton démissionnaire
À commencer par la démission fracassante du français Thierry Breton, jusqu’alors commissaire européen au Marché intérieur. Il a claqué la porte de la Commission européenne ce lundi 16 septembre au matin, se disant désavoué par la présidente Ursula von der Leyen, en pleines tractations sur la composition de la nouvelle équipe. “Je démissionne de mon poste de commissaire européen, avec effet immédiat”, a annoncé Thierry Breton dans une lettre à Ursula von der Leyen publiée dans la matinée sur le réseau social X.
Officiellement candidat d’Emmanuel Macron, il a expliqué que la cheffe de l’exécutif européen, en train de former son équipe pour un nouveau mandat de cinq ans, avait “demandé à la France de retirer (s) on nom”. “Il y a quelques jours, dans la toute dernière ligne droite des négociations sur la composition du futur Collège, vous avez demandé à la France de retirer mon nom – pour des raisons personnelles qu’en aucun cas vous n’avez discutées directement avec moi – et proposé, en guise de compromis politique, un portefeuille prétendument plus influent pour la France au sein du futur Collège” des commissaires, écrit Thierry Breton. C’est finalement Stéphane Séjourné, ministre démissionnaire des Affaires étrangères, qui a été proposé à la mi-journée par Emmanuel Macron.
Les relations entre la dirigeante allemande et Thierry Breton étaient notoirement tendues depuis que ce dernier avait pris la tête au printemps d’une fronde au sein de l’exécutif bruxellois pour contester le style de direction de la présidente, jugé peu collectif.
Blocage en Slovénie
Avant le retrait de Thierry Breton, la situation était déjà incertaine en raison d’un blocage du côté de la Slovénie, où l’approbation de la nouvelle candidate Marta Kos par le Parlement national se fait attendre. Sans avoir de nom de commissaire pour le pays, la Commission a pour l’instant confirmé le calendrier d’annonce, fixée à mardi 17 septembre. “Il reste beaucoup de temps avant mardi matin, non ?”, a réagi le porte-parole Eric Mamer, au cours du point de presse quotidien à Bruxelles. “24 heures, c’est une éternité en politique […] donc l’objectif reste pour la présidente (von der Leyen)” de dévoiler son casting mardi.
Le chef du comité parlementaire de Slovénie Franc Breznik dit ne pas pouvoir, faute des documents nécessaires, procéder à l’audition de la nouvelle candidate, choisie après le retrait du premier choix Tomaz Vesel. “Nous disposons d’informations selon lesquelles il n’a pas retiré sa candidature de son propre chef mais après l’envoi par Ursula von der Leyen d’une lettre” au gouvernement, réclamant la nomination d’une femme pour rééquilibrer la composition de son équipe. Le Premier ministre libéral Robert Golob a fustigé “des manœuvres de l’opposition pour retarder le processus”, rappelant qu’il n’était de toute façon pas légalement tenu de respecter la décision du comité parlementaire.
La nomination d’un ministre de Meloni comme vice-président
Même si elle s’est estompée depuis, l’opposition à l’octroi d’une vice-présidence exécutive de la Commission européenne au ministre italien Raffaele Fitto (Fratelli d’Italia) a été rude. Alors que la présentation de la nouvelle Commission européenne a été retardée, la médiation s’est poursuivie ces derniers jours entre Ursula von der Leyen et les groupes formant la majorité pro-UE du Parlement — PPE, S & D, Renew, Verts. Ces trois derniers ont exprimé leur opposition au projet d’Ursula von der Leyen (CDU, PPE) de donner à un membre du groupe des Conservateurs et Réformistes européens (CRE) une vice-présidence exécutive de la Commission, Raffaele Fitto appartenant à Fratelli d’Italia, le parti d’extrême droite de la Première ministre italienne Giorgia Meloni.
Parmi les eurodéputés italiens, les Verts et le Mouvement 5 étoiles (groupe de La Gauche au Parlement européen) ont annoncé leur opposition catégorique à l’octroi d’une vice-présidence exécutive au candidat italien. Ce qui donne encore un peu plus de fil à retordre à la présidente de la Commission Ursula von der Leyen. “Le refus des sociaux-démocrates et des Verts à un candidat issu des Conservateurs et réformistes [CRE, droite/extrême droite], parti qui a voté contre l’élection de la présidente de la Commission, tombe à point nommé”, rapporte le journal italien Corriere della Serra. “Il complique la nomination du ministre Fratelli d’Italia (FDI) Raffaele Fitto à un poste de vice-président de la Commission”. Néanmoins, les difficultés de nomination de Raffaele Fitto par Ursula von der Leyen “confirme que les répercussions négatives du vote de Meloni et du CRE contre la nouvelle Commission ont été sous-estimées”, conclut le quotidien italien.
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