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Michel Barnier, LR et les macronistes : ce gouvernement qui ne se fera pas de cadeau


Ils se méprisent, parfois. Ne se comprennent pas, souvent. Ainsi va la relation tumultueuse des macronistes et des Républicains (LR) depuis 2017. Deux camps concurrents, en raison d’une évidente proximité idéologique. Deux familles aux électorats proches, s’observant comme une proie à dévorer. Et pourtant… Les armes sont aujourd’hui remisées au placard.

Un gouvernement de coalition entre le bloc central et la droite verra bien le jour, au terme de la réunion organisée, jeudi 19 septembre, à Matignon par Michel Barnier avec les représentants de ces familles politiques. Nicolas Sarkozy peut sourire : son vieux rêve a été exaucé à la faveur de l’arrivée de Michel Barnier à Matignon. Voilà la droite et les macronistes embarqués dans une aventure pleine d’incertitudes.

Que ce fut laborieux ! Chaque camp a mis en scène la défense de ses exigences pour conserver sa pureté doctrinale. Le patron des députés de la Droite Républicaine (DR) Laurent Wauquiez a réclamé avec emphase un politique de droite, loin du “En même temps” honni. Les députés macronistes, emmenés par leur chef Gabriel Attal, exigeaient une clarification de la ligne politique défendue par le nouveau Premier ministre pour s’engager. Michel Barnier a rassuré ce jeudi son socle parlementaire en dévoilant trois axes d’action : la “vie quotidienne des Français”, les sujets régaliens et la maîtrise des finances publiques.

“On a les mêmes électeurs”

Les mauvaises langues ironiseront sur ces objets politiques consensuels, guère précis. En apparence, chacun s’en contente. Chacun se contente, surtout, de l’architecture gouvernementale dévoilée par Michel Barnier. Ensemble pour la République devrait récupérer sept ministères, quand Les Républicains en auront trois. Point de droite hégémonique, il y en a pour tout le monde ! La paix est scellée, l’aventure peut commencer.

Pouvait-il en être autrement ? En coulisses, négociations et coups de boutoirs étaient toujours accompagnés d’une analyse laconique. “Nous sommes contraints.” Oui, la droite et le bloc central n’avaient d’autre choix que de s’entendre. Ici, nulle pression d’un président tout-puissant. Plutôt celle du peuple de droite et du centre. “On a les mêmes électeurs. Ils ne nous pardonneraient pas d’être à l’origine de cet échec, confiait mercredi une cadre Renaissance. Personne n’a le choix, il faut que cela marche.” “Personne ne peut renverser la table, cela serait trop coûteux pour tout le monde”, abonde un proche du chef de l’Etat.

La réside le paradoxe de la relation entre la droite et la macronie. Leur proximité politique nourrit une concurrence féroce. Mais cette convergence leur a lié les mains, après la nomination de Michel Barnier à Matignon. Chacun peut tirer sur l’élastique, mais personne ne peut le casser. Gare au responsable d’un échec de la coalition. “Ceux qui tirent contre Barnier sont dans le perdant-perdant, note un cadre LR. C’est de la politique de la terre brûlée.”

“Ce sera notre responsabilité de peser”

Il faut faire bonne figure. “Ce n’est pas facile de travailler ensemble pour des gens qui se sont combattus pendant sept ans”, constate le sage Gérard Larcher. Sourire sur la photo de famille. Chaque camp doit apprivoiser l’autre. Les griefs sont partagés. La droite s’est sentie humiliée par ce “nouveau monde” conquérant, elle qui pensait que l’élection présidentielle de 2017 lui était promise. Emmanuel Macron n’a eu de cesse de dépecer ce rival, à coups de débauchages individuels. Le camp présidentiel peste, lui, contre ce partenaire guère fiable à l’Assemblée, responsable du déclenchement du 49.3 lors de la réforme des retraites de 2023. Et que dire de ces attaques continues contre le macronisme, empreintes de condescendance intellectuelle ? “On ne peut pas avoir un ministre de l’Economie qui tape demain sur le bilan économique des sept dernières années tout en demandant aux députés EPR de lever la main quand c’est nécessaire”, prévient une députée de l’aile droite.

La vie ne sera pas rose. La concurrence entre ces deux familles ne s’éteint pas à la faveur d’une coalition de circonstances. Laurent Wauquiez, qui n’entrera pas au gouvernement, a appelé jeudi devant ses troupes à une “rupture avec les années écoulées”. “Ce sera notre responsabilité de peser”, précise-t-il. Le ton est donné. “A l’Assemblée, Wauquiez pourra épouser les mouvements de l’opinion envers Barnier”, anticipe déjà un dirigeant LR. Le Premier ministre ne doit s’attendre à aucun cadeau du bloc central. Certes, personne n’aura la folie de le censurer. Mais le chef du gouvernement est à la merci d’une démobilisation de députés macronistes lors de votes stratégiques ou d’amendements piégeux. Le mariage est sur le point d’être célébré. Certains pensent déjà aux Noces d’argent, tant il pourrait constituer la première pierre d’un rassemblement de la droite et du centre en 2027. D’autres pensent déjà au divorce. Pour l’heure, place au voyage de noces.




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