C’est un chiffre qui n’en finit plus de baisser : en Allemagne, l’inflation continue de refluer en septembre, jusqu’à atteindre son plus bas niveau depuis février 2021. Avec un indice des prix à la consommation de 1,6 % sur un an, le pays a vu pour la première fois depuis trois ans et demi cet indice passer sous la très symbolique barre des 2 % – soit l’objectif fixé par la banque centrale européenne (BCE) en 2021.
Une bonne nouvelle en principe, donc, permise par une importante baisse (6,9 %) des prix du carburant et de ceux de l’énergie (3,8 %), par rapport à l’an dernier.
En dépit de ces indicateurs positifs, l’économie allemande s’enfonce dans une dynamique morose. Ce contexte économique pourrait se traduire en 2024 par une deuxième année de récession : d’après les cinq grands instituts de conjoncture du pays (Berlin, Munich, Kiel, Halle et Essen), le pays devrait voir son activité économique encore se contracter de 0,1 % en 2024, après une récession de 0,3 % en 2023.
Une industrie en difficulté
Plusieurs facteurs viennent expliquer ce phénomène. L’état de l’industrie allemande – autrefois puissante et exportatrice –, qui peine à se relever des débuts de la guerre en Ukraine (et donc de la fin du gaz russe bon marché) et de la montée du protectionnisme chinois, qui a coupé court à ses exportations. Jusqu’ici, les chiffres du chômage sont stables (6 % environ), mais l’industrie automobile allemande pourrait bientôt se voir amputée de milliers d’emplois après la fermeture probable des sites de production Volkswagen, premier employeur industriel outre-Rhin.
L’industrie subit la forte concurrence de pays étrangers, à commencer par la Chine, devenue extrêmement puissante dans le secteur de l’automobile, notamment électrique. D’autres secteurs peinent à se relever de la hausse des prix de l’énergie : la chimie et la sidérurgie, qui subissent également la concurrence avec la Chine.
Consommation atone
Cette situation pourrait perdurer. Les entreprises, qui auraient le pouvoir d’améliorer la productivité et la compétitivité ne réalisent pas ou peu d’investissements, entraînant une baisse des commandes provenant de l’étranger. Côté Etat, le gouvernement n’agit guère plus : la coalition au pouvoir s’enferre dans une orthodoxie financière de plus en plus marquée, se refusant à toute forme d’investissement, elle aussi. La part de l’investissement public brut dans le PIB allemand était de 2,5 % entre 2018 et 2022, soit la plus faible parmi les pays à revenu élevé important, à l’exception de l’Espagne. Résultat : certains chantiers restent au point mort, à commencer par certaines routes et infrastructures télécoms qui deviennent de plus en plus vétustes.
La consommation des ménages ne risque pas non plus de relancer la croissance allemande : laminés par le choc énergétique et l’augmentation constante des prix du logement, ils peinent à reconquérir un pouvoir d’achat largement ébranlé depuis les débuts de la guerre en Ukraine, en dépit de quelques hausses de salaires et du ralentissement de l’inflation. Résultat, l’économie n’a quasiment pas progressé depuis 2019 et tout laisse penser que cette contraction devrait se poursuivre.
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