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Finances publiques : et si la technologie était la solution à la crise ?


La technologie peut-elle aider l’Etat à dépenser moins ? Alors que la France plonge vers un déficit public abyssal de plus de 6 %, la question de la modernisation des services publics est sur toutes les lèvres. Sur l’année écoulée, 54 % des créations nettes d’emploi sont imputables à la sphère publique. La qualité de service perçue a-t-elle pour autant augmenté ? Non, le ressenti est même plutôt inverse. Il est donc urgent de questionner la productivité de cette sphère. La production publique directe englobe des domaines aussi variés qu’importants. Près de 40 % recouvrent la fourniture de services régaliens – défense, sécurité, justice, administration générale. Un quart, l’enseignement dans les établissements publics. Et 16 %, les soins dans les hôpitaux publics.

Mais comment est calculée la valeur de cette production non marchande ? Par définition, elle ne peut pas être déterminée par le produit des ventes. Elle est, en fait, évaluée par la somme des coûts de production, c’est-à-dire les salaires versés aux personnels publics ainsi que les coûts des autres intrants et l’amortissement du capital. Sans ventes, la productivité doit être mesurée par rapport à des éléments non financiers, à savoir le temps de traitement et les volumes de dossiers traités. Alors comment augmenter cette productivité ? Un management plus efficace peut certes aider. Mais le gros des gains de productivité repose en réalité sur de meilleurs logiciels.

C’est là que le bât blesse. L’équipement software de l’administration française n’est pas à la hauteur de nos exigences vis-à-vis du service public. Certes, des services en lien avec le citoyen ont été améliorés. Le remarquable Justif’Adresse permet, par exemple, d’obtenir sa carte nationale d’identité ou son passeport sans produire de justificatif de domicile – il procède à une comparaison automatique avec les bases des fournisseurs d’énergie. Mais ces avancées détournent l’attention d’un autre problème, celui des outils à destination des fonctionnaires et des contractuels.

Des transitions numériques souvent brutales

En novembre 2021, plus de 3 000 magistrats ont signé une tribune dans Le Monde sur le déploiement de Cassiopée, pour Chaîne applicative supportant le système d’information orienté procédure pénale et enfants. Mal conçu, cet outil – qui s’ajoute à six autres applicatifs différents ! – génère un énorme surtravail pour les personnels de justice, au lieu de leur faire gagner du temps. L’expérience des usagers en sort, elle aussi, dégradée.

Il faut améliorer la manière dont les transitions numériques sont menées dans la sphère publique. Elles sont souvent trop brutales. Cassiopée a peu à peu remplacé un logiciel baptisé Winstru, mais les dossiers fermés sur l’ancien programme n’ont jamais été transférés sur le nouveau. Les serveurs qui faisaient fonctionner Winstru étant déjà hors d’état, des informations ont été irrémédiablement perdues. Certains grands projets confiés à des entreprises de service numérique ont également accusé de multiples retards et se sont transformés en gouffres financiers. C’est notamment le cas du logiciel Louvois qui gérait la paie des militaires.

Plus grave encore : certains processus essentiels dans la sphère publique dépendent de logiciels ou de bases de données vieillissants, développés par des entreprises ou des associations de très petite taille dont l’avenir n’est pas assuré. Service du Premier ministre, la direction interministérielle du Numérique (Dinum), créée en 2019, a pour mission d’élaborer la stratégie numérique de l’Etat et de piloter sa mise en œuvre. Devenue plus politique et moins technique, elle réalise un travail remarquable mais qu’il faut renforcer.

Le développement de scale-up d’Etat, des structures agiles, capables de produire du code et d’acheter des solutions plus performantes que les outils existants, est une urgence absolue. L’intelligence artificielle générative appliquée à la fonction publique est également un champ vierge dont devrait se saisir Guillaume Kasbarian, le nouveau ministre de la Fonction publique, de la Simplification et de la Transformation de l’action publique. Le rythme de diffusion de l’IA dans l’éducation est encore bien trop lent, alors que la personnalisation de l’enseignement permise par ces outils est une belle chance à saisir.




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