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Dérapage budgétaire : trois questions sur la commission d’enquête en passe de voir le jour


L’heure des comptes approche. La Conférence des présidents de l’Assemblée a ouvert la voie, mardi 15 octobre, à une transformation de la Commission des Finances (chargée du suivi du budget de l’Etat), en commission d’enquête sur le dérapage des finances publiques. Réclamée par les oppositions de droite comme de gauche et adoubée par le Premier ministre Michel Barnier qui a dit souhaiter qu’il en sorte “la vérité”, elle devrait permettre de comprendre quelles sont les causes de la dégradation inattendue du déficit public.

Qui réclame cette commission d’enquête ?

Le président du groupe parlementaire de l’Union des droites pour la République (UDR), Éric Ciotti, avait annoncé la semaine dernière son souhait d’utiliser le “droit de tirage” de son groupe pour créer une commission d’enquête sur la “dérive des finances publiques”.

Dans la foulée, l’Insoumis Éric Coquerel a fait connaître son intention de solliciter pour la commission des Finances – qu’il préside – des pouvoirs d’enquête “afin d’étudier les causes de la variabilité des prévisions fiscales et budgétaires et de l’évolution des déficits publics ces dernières années”. Deux initiatives concurrentes que la Conférence des présidents de l’Assemblée a décidé mardi matin de “joindre”, avec l’accord de l’UDR moyennant un poste de co-rapporteur.

Le vice-président de la commission des finances, le député socialiste Philippe Brun, avait également formulé cette demande, vendredi 11 octobre, accusant l’ancien gouvernement d’avoir voulu “volontairement cacher” la situation. Même accusation du côté de Charles de Courson : “Il est clair que le gouvernement a essayé de dissimuler l’état réel des comptes, en début d’année, parce que les élections européennes arrivaient”, a déclaré le rapporteur général du budget à l’Assemblée nationale auprès du Monde.

Pour faire quoi ?

La commission des Finances se prononcera donc ce mercredi 16 octobre en fin d’après-midi sur son souhait de se transformer en commission d’enquête, et ce, alors que débute à l’Assemblée nationale l’examen du très politique budget de l’État pour l’année 2025. Une telle situation est rare mais pas inédite : en 2018, la commission des Lois, alors présidée par Yaël Braun-Pivet, avait sollicité des pouvoirs d’enquête (convocation avec obligation pour la personne de l’honorer, pouvoir d’investigation, risque de poursuites en cas de faux témoignage…), pour se pencher sur l’affaire Benalla.

Cette fois, l’enquête devra faire la lumière sur le dérapage inattendu du déficit public, sur lequel des notes internes de Bercy alertaient pourtant déjà dès l’automne 2023, comme l’a récemment révélé France 2. Le déficit devrait ainsi atteindre 6,1 % du PIB cette année, soit 50 milliards d’euros de plus que les 4,4 % votés l’an dernier, selon les derniers chiffres officiels de Bercy. C’est un chiffre largement supérieur aux 5,1 % annoncés par l’ancien gouvernement, et bien sûr au seuil des 3 % fixé par l’Union européenne.

Habituel aiguillon du gouvernement, le Sénat ne sera pas en reste, et va relancer mercredi sa mission d’information sur la dégradation des comptes publics. Cette instance, qui s’était illustrée en début d’année en effectuant un contrôle à Bercy, prévoit un nouveau cycle d’auditions dans les prochaines semaines au sein de la commission des Finances de la chambre haute.

Qu’en disent le gouvernement et l’ex-majorité ?

D’un point de vue procédural, la décision de la Commission des Finances de l’Assemblée peut être contestée par le gouvernement, un président de groupe politique ou un président de commission, selon le règlement de l’Assemblée nationale. L’exécutif ne semble cependant pas s’y opposer, Michel Barnier ayant estimé mardi dans l’hémicycle que cette commission d’enquête devrait “déterminer les chiffres, les faits, la vérité et la dire aux Français”. Interrogé par Éric Ciotti lors de la séance de questions au gouvernement, le Premier ministre en a profité pour livrer son analyse : “Il y a eu un emballement” à cause de l’épidémie de Covid, de la guerre en Ukraine et de l’inflation, a-t-il reconnu, puis “on a mal maîtrisé la sortie de crise”. Manière de justifier l’effort affiché de 60 milliards – dont 20 de hausses d’impôts et 40 de réduction des dépenses – pour redresser les comptes, tout en renvoyant la patate chaude à ses prédécesseurs.

Sur France Inter lundi, l’ex-Premier ministre et actuel député Renaissance Gabriel Attal avait également accueilli favorablement cette perspective, jugeant “toujours positif quand le Parlement fait son travail d’évaluation”. Plusieurs de ses collègues de Renaissance ont néanmoins estimé que “tout est transparent” et qu'”il ne faut pas s’attendre à grand-chose” avec la commission d’enquête, préférant encourager le gouvernement à se saisir de mesures pour atténuer le déficit 2024, comme l’introduction dans le budget 2025 de mesures rétroactives.

Premier visé, l’ex-ministre de l’Économie Bruno Le Maire s’est refusé ces derniers jours à répondre aux questions des journalistes, après avoir assuré à France 2 que “la vérité apparaîtrait plus tard”. “Une commission d’enquête parlementaire sur les finances publiques a été mise en place. Je me tiens naturellement à sa totale disposition. Je répondrai à toutes ses questions en toute transparence”, a-t-il tout de même déclaré sur X mardi soir.




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