“Manque de professionnalisme” des ministres et des journalistes, “délitement du débat public”… Pressé de répondre aux critiques après des propos rapportés sur la création de l’Etat d’Israël qui lui ont valu des réprimandes du Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou et du président du Sénat Gérard Larcher, Emmanuel Macron a violemment riposté jeudi 17 octobre.
“Je voudrais me permettre de rappeler quelques règles”, a lancé le chef de l’Etat, très remonté, en préambule de sa conférence de presse à l’issue d’un sommet européen à Bruxelles. “Je dois vous dire combien j’ai été stupéfait de lire tant de commentaires, de commentaires de commentaires, de réactions, y compris de responsables politiques, étrangers ou français, devant des propos que j’aurais tenus sans se poser la question de savoir […] ce que j’aurais exactement dit”, a-t-il dit.
Des propos rapportés par des “ventriloques”
Cette polémique trouve son origine dans les déclarations du chef de l’Etat rapportées par des participants au Conseil des ministres, mardi 15 octobre. Alors qu’était abordée la guerre à Gaza et au Liban, Emmanuel Macron aurait ainsi déclaré que “Monsieur Netanyahou ne doit pas oublier que son pays a été créé par une décision de l’ONU”, selon ces sources, en réponse au non-respect israélien des résolutions des Nations unies. Il exhortait ainsi le Premier ministre israélien, avec lequel il a multiplié les passes d’armes ces derniers jours, à ne pas “s’affranchir des décisions de l’ONU”, selon ces mêmes participants.
Au-delà de la réponse indignée du Premier ministre israélien, ces propos présidentiels ont déclenché de vives interrogations de la part des soutiens français à l’action d’Israël au Proche-Orient, jusqu’à un rappel à l’ordre du troisième personnage de l’Etat, Gérard Larcher : “Mettre en doute l’existence d’Israël touche pour moi à des questions fondamentales”, a déclaré le président du Sénat, ciblant frontalement le président en lui reprochant une “méconnaissance de l’histoire de la naissance d’Israël”.
Prenant le contrepied de ces accusations, Emmanuel Macron s’en est pris tout à la fois aux “ministres”, aux “journalistes” et aux “commentateurs”, en démentant ses propos “tels qu’ils ont été rapportés”. “Je crois que je dis suffisamment sur la situation au Proche-Orient pour ne pas avoir besoin de ventriloque”, a-t-il fustigé.
Une critique de la couverture médiatique
Il a également sommé les ministres de “se montrer respectueux des règles et des fonctions pour ne pas faire circuler des informations fausses” et les journalistes “de traiter les propos rapportés avec les précautions qui s’imposent”. “Il n’y a pas d’ambiguïté”, la France n’a “jamais fait défaut” à l’Etat d’Israël, a insisté Emmanuel Macron.
Les invectives à répétition avec Benyamin Netanyahou, déclenchées par l’appel du dirigeant français à cesser de fournir à Israël des armes servant à pilonner Gaza et le Liban, ont aussi trouvé de nombreux échos dans la communauté juive et dans la classe politique française, y compris au sein du camp macroniste à l’Assemblée nationale. Après la mise au point d’Emmanuel Macron, des députés de l’ex-majorité présidentielle ont aussitôt salué la démarche du chef de l’Etat à un moment où il apparaît de plus en plus isolé après le séisme de la dissolution. “La voix de la France dans le monde mérite mieux que le travestissement de la vérité”, a répliqué Mathieu Lefèvre, ancien président du groupe d’amitié France-Israël à l’Assemblée, sur le réseau social X.
Plus ironique, le porte-parole du groupe Ecologiste et social à l’Assemblée, Benjamin Lucas, s’est interrogé : “C’est vrai ça les journalistes, pourquoi ne reprenez-vous pas simplement et bêtement les communiqués officiels ?”. L’Association de la Presse Présidentielle (APP) a pour sa part estimé que le président mettait “gravement en cause la déontologie de la presse. […] Notre travail ne peut se résumer à reprendre les déclarations officielles”, a-t-elle pointé sur X.
Source