Un élément à charge de plus contre la Russie de Vladimir Poutine dans l’entreprise de déstabilisation qu’elle tente de mener à travers le globe. Selon des révélations du Wall Street Journal, le Kremlin aurait activement aidé les rebelles houthistes du Yémen dans leurs attaques contre le commerce international en mer Rouge. Moscou aurait en effet transmis des données satellites pour aider le groupe pro-iranien à cibler les navires occidentaux dans la région.
Une assistance qui est la bienvenue pour les Houthis. Car depuis octobre 2023 et leurs premières attaques au nom de leur soutien au Hamas contre Israël, la grande majorité des navires commerciaux faisant le choix de continuer à emprunter le détroit de Bab el-Mandeb, au large du Yémen, désactivent leur signal radio sur ce passage. De quoi rendre indétectables leurs déplacements… sauf avec l’aide d’un système satellite de haute qualité. Du matériel dont ne disposent pas les houthistes, contrairement à la Russie, qui leur a donc fourni ces informations par l’intermédiaire de l’Iran, comme l’ont affirmé une “personne au fait du dossier” et “deux responsables européens de la défense” auprès du WSJ.
Détourner l’attention et multiplier les fronts
Pour la Russie, cette aide logistique aux houthistes présente un double avantage. Tout d’abord, elle a permis d’attirer l’attention occidentale et notamment américaine loin de la guerre en Ukraine. Alors que les États-Unis ont mis en place une coalition maritime pour protéger le commerce international et ont frappé des cibles rebelles au Yémen, parfois avec l’aide du Royaume-Uni, toutes ces ressources engagées sont autant d’armes et de munitions qui ne figurent en fin de compte pas dans l’arsenal de Kiev.
Ainsi, toujours selon le Wall Street Journal, Washington avait déjà dépensé un milliard de dollars et de munitions en avril dernier pour éliminer les drones et les missiles des houthistes, et protéger la navigation en mer Rouge. “Pour la Russie, toute flambée est une bonne nouvelle, car elle détourne l’attention du monde de l’Ukraine et les États-Unis doivent engager des ressources – systèmes Patriot ou obus d’artillerie. Et avec le Moyen-Orient en jeu, la priorité des Etats-Unis est évidente”, assure auprès du média américain Alexander Gabuev, directeur du Carnegie Russia Eurasia Center, un groupe de réflexion basé à Berlin.
Cette aide finalement peu coûteuse ni engageante auprès des rebelles houthistes s’inscrit également dans l’entreprise de déstabilisation que Moscou cherche à mener à travers le monde. Propagation de fausses informations en Europe et aux Etats-Unis, soutien aux juntes militaires en Afrique, et donc déstabilisation du commerce international au Proche-Orient : tous les moyens sont bons pour la Russie pour affaiblir les démocraties occidentales. Le tout, en continuant à cultiver ses nouvelles alliances stratégiques, en particulier ici l’Iran.
Un engagement contrôlé
Malgré cela, la Russie reste jusqu’ici mesurée dans son soutien militaire aux houthistes. Reuters avait notamment révélé en septembre dernier que l’Iran avait servi d’intermédiaire dans des discussions secrètes entre le groupe rebelle yéménite et Moscou, dans l’optique de leur transférer des missiles antinavires russes. Des munitions plus sophistiquées et précises qui menaceraient encore davantage les intérêts occidentaux dans la région, mais que le Kremlin ne semble pas avoir fournies jusqu’ici.
Les médias américains affirment également que Viktor Bout, le tristement célèbre trafiquant d’armes russe libéré en décembre 2022 d’une prison américaine dans le cadre d’un échange de prisonniers avec la basketteuse Brittney Griner, tente de conclure un accord pour une vente d’armes automatiques de petit calibre pour près de 10 millions de dollars avec les houthistes. On ignore encore si le Kremlin est directement derrière cette transaction ou non, mais difficile d’imaginer que l’aval de Moscou n’ait pas été donné. Car le plus de chaos il y a, plus la Russie en tire profit.
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