Au sommet de l’Etat, deux visions s’affrontent. D’un côté le gouvernement, qui a réaffirmé ce jeudi 31 octobre ne pas “souhaiter supprimer le Service national universel (SNU)”. De l’autre l’Assemblée et le Sénat, qui s’en prennent au dispositif expérimental voulu par Emmanuel Macron, dont ils jugent l’efficacité relative par rapport au tarif estimé. À l’Assemblée, c’est la gauche qui a eu le scalp du SNU, avec des mots durs. “Il est temps d’abandonner” ce “gadget présidentiel” qui “ne marche pas” et “coûte cher”, a jugé le député écologiste Jean-Claude Raux. Des propos approuvés par le socialiste Pierrick Courbon, pour qui cette “hérésie budgétaire” a “raté sa cible”.
Présents en nombre, les députés du Nouveau Front populaire ont fait adopter mercredi soir en commissions des Finances un amendement réaffectant au secteur du sport amateur la totalité des 128 millions d’euros fléchés vers le SNU en 2025. Une victoire symbolique due à la très faible présence des élus macronistes et de droite, comme l’a relevé le président LFI de la commission, Éric Coquerel. “Si ça passe aussi facilement (et) pas à une ou deux voix près, c’est parce qu’il y a une partie de la commission qui n’est pas là.”
Le Sénat a enfoncé le clou quelques heures plus tard. Réunie à huis clos, sa commission des Finances a en effet voté une baisse de 100 millions d’euros des crédits du SNU. Une décision prise à l’unanimité moins deux abstentions, a précisé à l’AFP le sénateur socialiste Éric Jeansannetas, rapporteur des crédits de la Jeunesse. Cet amendement sera à nouveau présenté en séance publique lors de l’examen du volet “dépenses” du budget par le Sénat, début décembre.
Des objectifs “qui font du surplace”
“Après cinq ans d’expérimentation, il n’apparaît pas que le SNU apporte une plus-value suffisante […] pour justifier la poursuite de son déploiement”, a indiqué Éric Jeansannetas dans son rapport présenté mercredi et consulté par l’AFP. “Pour la première fois depuis le début de l’expérimentation du SNU, les objectifs font du surplace”, a fait savoir l’élu de la Creuse, se demandant “si l’objectif de (sa) généralisation à l’ensemble d’une classe d’âge est encore d’actualité”.
Maud Bregeon, la porte-parole du gouvernement, a répondu ce jeudi que “la situation financière telle qu’elle est aujourd’hui ne permet pas la généralisation”, tout en précisant qu'”entre la suppression et la généralisation, il y a un chemin parce que c’est une expérience qui nous semble être très positive pour beaucoup de jeunes”. Des paroles qui font écho à celles du ministre des Sports et de la Jeunesse, Gil Avérous, qui avait reconnu, lundi 28 octobre sur Sud Radio, qu’il n’avait “pas les moyens pour une généralisation du SNU” dans son budget. “En 2025, il ne le sera pas, en 2026 j’imagine mal qu’il puisse l’être”, a-t-il admis. “Il n’est pas prévu de le supprimer”, a-t-il cependant souligné, appelant à “réinterroger” un dispositif “en panne”.
Une mixité sociale toujours absente
En septembre, la Cour des comptes avait relancé le débat sur l’utilité du SNU en dévoilant des coûts estimés situés entre 3,5 et 5 milliards d’euros par an. Et évoquant de nombreux ratés observés : encadrement défaillant, missions floues, absence de mixité sociale… “Les milieux d’origine des jeunes participants se caractérisent, depuis 2019, par une surreprésentation de jeunes dont les parents servent ou ont servi dans les corps en uniforme et de catégories socioprofessionnelles plus favorisées”, écrit la Cour.
Promesse de campagne du chef de l’Etat, le SNU, lancé en 2019, devait être généralisé à la rentrée 2026, selon les promesses de Gabriel Attal, ex-locataire de Matignon. Ce service national comporte une “mission d’intérêt général” et un “séjour de cohésion” comprenant des activités sportives, culturelles et intellectuelles, avec des journées qui débutent par la “levée des couleurs” (drapeau et hymne national) et port de l’uniforme.
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