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En Russie, les dénonciations contre les “ennemis” du pays se multiplient


C’est une affaire parmi d’autres en Russie, mais elle a fait plus de bruit que les précédentes. Mi-novembre, une médecin chevronnée a été accusée par la mère d’un patient d’avoir tenu des propos favorables à l’Ukraine. Résultat : la pédiatre a été condamnée à cinq ans et demi de prison par la justice russe. Elle est loin d’être la seule. En septembre, c’est une coiffeuse de 46 ans qui a été accusée par son voisin de diffusion de fausses informations sur l’armée russe. D’autres peuvent être poursuivis pour avoir “discrédité l’utilisation des forces armées russes”.

Ces cas reflètent un climat de plus en plus tendu en Russie : les dénonciations se multiplient parmi la population pour démasquer les opposants à la guerre en Ukraine, ou des adversaires politiques en désaccord avec le discours de propagande alimentée par le président Vladimir Poutine. Certains vont chercher des bénéfices personnels en échange de leurs services, quand d’autres pensent que leurs actes de surveillance vont contribuer au bien public. Cette vague de dénonciations aide le gouvernement à réprimer la dissidence et à mieux identifier les “ennemis” du pays. À noter que les milieux culturels sont particulièrement visés, selon Le Monde : théâtres et opéras se retrouvent obligés de se censurer “pour respecter le moule narratif du Kremlin”.

Le groupe russe de défense des droits OVD-Info a enregistré 21 poursuites pénales dans des affaires à motivation politique basées sur des dénonciations depuis l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie en 2022, a indiqué à Reuters Eva Levenberg, avocate du groupe. Cette dernière, qui vit en Allemagne, a dévoilé qu’OVD-Info connaissait 175 autres personnes qui avaient fait l’objet d’accusations administratives pour avoir “discrédité” l’armée russe, à la suite de des dénonciations au cours de la même période. Parmi elles, 79 individus ont été condamnés à une amende à plusieurs milliers de roubles. Reuters n’a pas été en mesure de confirmer de manière indépendante les chiffres fournis par Eva Levenberg.

Plus de 20 000 personnes arrêtées

De son côté, le discours de Vladimir Poutine est clair : il assume que le pays est engagé dans une guerre par procuration avec l’Occident et que les citoyens doivent contribuer à éliminer les ennemis internes. Depuis le début de l’invasion en Ukraine, toujours selon OVD-Info, les autorités ont arrêté plus de 20 000 personnes pour diverses formes de déclarations ou de manifestations contre la guerre, et ont engagé des poursuites pénales contre 1 094 d’entre elles.

“La liberté d’expression en Russie était déjà menacée, mais quelques jours après l’invasion de l’Ukraine en février 2022, Vladimir Poutine l’a portée à un tout autre niveau”, rappelle la BBC. Résultat : le gendarme de l’internet russe, Roskomnadzor, a ainsi affirmé avoir reçu 145 000 signalements émanant de citoyens sur le premier semestre 2022.

Dans la foulée, le chef du Kremlin a promulgué une loi répressive destinée à faire taire ou punir les critiques tout en martelant que le peuple russe “sera toujours capable de distinguer les vrais patriotes des racailles et des traîtres, et de les recracher comme un moucheron qui s’envole accidentellement dans leur bouche”. Les derniers russes dissidents sont prévenus.




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