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Surprise en Roumanie : un candidat prorusse en tête au premier tour de la présidentielle


Séisme électoral en Roumanie. Le quotidien britannique The Guardian parle même d’un “choc”. Le candidat prorusse Calin Georgescu s’est hissé en tête du premier tour de l’élection présidentielle, dimanche 24 novembre. Alors que personne ne l’attendait, ce candidat “arrivé de nulle part”, selon le site Politico, a damné le pion au Premier ministre pro-européen Marcel Ciolacu. Favori du scrutin, ce dernier est en passe d’être éliminé, selon les résultats quasi finaux publiés ce lundi matin par la Commission électorale. Après le dépouillement de plus de 99 % des bulletins, il a été rétrogradé en troisième position avec 19,16 % des suffrages exprimés, juste derrière Elena Lasconi, maire centre-droit d’une petite ville, avec quelque 700 voix d’écart. Calin Georgescu est lui crédité de 22,94 % des voix.

Donné favori à l’extrême droite avant le scrutin, George Simion du parti AUR (Alliance pour l’unité des Roumains) doit pour sa part se contenter de la quatrième place, à 13,94 %. Ce dernier a félicité son adversaire, se réjouissant qu’un “souverainiste” se retrouve au second tour. Avec son discours passionné teinté de conspirationnisme, George Simion, 38 ans, grand fan du futur président américain Donald Trump, n’a pas su capitaliser sur la détresse d’une partie de la population appauvrie par la forte inflation.

À l’inverse, Calin Georgescu, très religieux et nationaliste, a séduit dans les derniers jours avec une campagne TikTok devenue virale, focalisée sur la nécessité de stopper l’aide à l’Ukraine et la nécessité de réduire la dépendance de la Roumanie aux importations. “L’incertitude économique imposée au peuple roumain depuis 35 ans est devenue aujourd’hui une incertitude pour les partis politiques”, a déclaré Calin Georgescu dans sa première réaction après la clôture des élections. Il a qualifié le résultat de “réveil étonnant” des électeurs roumains.

Le second tour est prévu le 8 décembre, avec entre-temps des législatives le 1er décembre. Quelle que soit l’issue du scrutin, “l’extrême droite est de loin la grande gagnante de cette élection”, avec plus de 35 % des suffrages, a commenté pour l’AFP le politologue Cristian Pirvulescu. Le discours du sexagénaire a profité d’un climat social et géopolitique tendu dans ce loyal Etat membre de l’UE et de l’Otan, situé aux portes de l’Ukraine.

À noter que Calin Georgescu est très critique envers ses alliés occidentaux, qualifiant le bouclier antimissile balistique de l’Otan de “honte de la diplomatie”. Le candidat d’extrême droite a répété que l’UE et l’Otan ne représentaient pas correctement les intérêts roumains et que la guerre menée par la Russie en Ukraine, un voisin roumain, était manipulée par des sociétés militaires américaines. Pour Calin Georgescu, Vladimir Poutine est “un homme qui aime son pays”.

“Un tremblement de terre politique”

C’est un bouleversement pour ce pays de 19 millions d’habitants qui a jusqu’ici résisté aux postures nationalistes, se démarquant de ses voisins tels que la Hongrie ou de la Slovaquie. Il s’agit d’un “tremblement de terre politique en Roumanie”, résume le site américain Bloomberg qui rappelle que le pays a “aidé à armer Kiev, notamment avec des systèmes de défense antimissile Patriot, depuis l’invasion à grande échelle de la Russie en 2022.”

Le président de la République roumaine occupe une fonction essentiellement protocolaire mais exerce un magistère moral important. Après dix ans au pouvoir de Klaus Iohannis, fervent soutien de Kiev devenu très impopulaire à cause notamment de ses coûteux voyages à l’étranger financés avec l’argent public, les Roumains ont donc porté leur dévolu sur les candidats antisystème, sur fond de montée des mouvements ultra-conservateurs en Europe.

La Roumanie, partageant une frontière de 650 kilomètres avec l’Ukraine et bordée par la mer Noire, joue un rôle stratégique “vital”, rappelle dans une étude le groupe de réflexion New Strategy Center. Tant pour l’Otan, dont elle abrite plus de 5 000 soldats, que pour le transit des céréales ukrainiennes. Fort de ces bons scores à la présidentielle, l’extrême droite devrait bénéficier d'”un effet de contagion” aux élections législatives du 1er décembre, pronostique Cristian Pirvulescu. Ce qui augure de négociations difficiles pour former une coalition. Les sociaux-démocrates, héritiers de l’ancien parti communiste structurant la vie politique du pays depuis plus de trois décennies, gouvernent actuellement en coalition avec les libéraux du PNL.




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