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Maud Bailly, DG de Sofitel : “Pour une femme, le pouvoir ne se demande pas, il se prend”

“Cela reste un monde assez masculin, l’hôtellerie !” lance Maud Bailly, un sourire malicieux aux lèvres. La sémillante directrice générale de Sofitel et MGallery en a fait une croisade personnelle : augmenter le nombre de femmes, mais aussi de profils plus divers, à des postes de top management dans les hôtels qu’elle dirige. “Il y a beaucoup de femmes à la tête des établissements économique et moyenne gamme, mais dès qu’il y a une responsabilité opérationnelle, et beaucoup d’argent en jeu, elles sont moins présentes”, regrette-t-elle. Lorsqu’elle a intégré l’entreprise il y a sept ans, seules deux femmes siégeaient au Comex (Comité exécutif). Aujourd’hui, elles sont… trois.

L’accession des femmes à des postes importants, direction d’hôtels ou comité de direction, nécessite l’activation de leviers “soft” et “hard”, assure la quadragénaire à l’énergie communicative. Elle cite l’importance du mentoring, du coaching, des conférences inspirantes, avec des témoignages de terrain : “Il faut faire sauter les verrous plus ou moins intégrés par les femmes, qui n’osent pas prendre le pouvoir, par exemple dans des contextes de pays où l’accès aux responsabilités revient à renoncer à la vie de famille.” Parmi les leviers plus structurels, Maud Bailly souligne l’importance des quotas : le groupe Accor vise à se doter de 40 % de femmes en 2025, dont 45 % dans les comités de direction, des engagements indexés aux bonus des dirigeants, condition indispensable de leur mise en œuvre. Les évolutions passent aussi par une bonne dose d’empowerment : “Les femmes ont du mal à demander le pouvoir. Or pour une femme, le pouvoir se prend, il ne se demande pas.”

Moderniser la marque Sofitel

Entrée chez Accor en 2017 en tant que Chief Digital Officer, cette normalienne et énarque est devenue en octobre 2020 directrice pour l’Europe du Sud – 1900 hôtels à sa charge, en pleine pandémie de Covid – avant d’être nommée à son poste actuel en janvier 2023. Sa mission est claire : moderniser la marque Sofitel, qui fête ses 60 ans cette année, et assumer un positionnement luxe à la française à l’échelle mondiale. En deux ans à la tête de ce secteur, il a fallu accélérer le changement, avec de nombreux arbitrages à faire. “Je ne vis jamais la décision comme quelque chose d’injuste, de cassant. Décider, en soi, c’est l’apanage du leader.” Son passage à la direction du pôle économique de Matignon de 2015 à 2016, sous la direction de Manuel Valls, lui a aussi appris à aller vite : “Tous les ministères venaient me voir et je passais une très grande partie de ma vie à arbitrer.”

Débutant dans l’audit en 2007 en tant qu’inspectrice des finances, Maud Bailly prend goût au management en devenant directrice adjointe puis directrice de la gare Montparnasse au début des années 2010. Un travail de modernisation intense l’attend. La dirigeante ressent alors le besoin d’avoir un ancrage dans le réel et de développer une véritable compréhension des différentes professions : “Pendant six mois, j’ai été formée dans l’anonymat le plus total aux métiers du ferroviaire. J’ai appris à accrocher, décrocher des wagons, conduire des trains, j’ai passé ma certification sécurité, je savais donner le départ d’un train, vendre des billets.”

Elle est directrice générale de Sofitel, MGallery et Emblems, elle insuffle son inventivité dans l’hôtellerie de luxe.

Réduire les échelons dans le management

Pour l’hôtellerie, même démarche : elle connaît le goût des cakes au chocolat, elle se préoccupe du mobilier, et elle s’attache à comprendre les problématiques des directeurs. Pour cela, elle a voulu réduire les échelons entre elle et le management dit intermédiaire. “Si l’on souhaite vraiment opérer une transformation culturelle, il faut le doter de toutes les compétences nécessaires. Sinon cet échelon du management intermédiaire peut vite devenir le plus grand ennemi des décideurs.”

Sa définition du manager ? “Le moins d’arrogance possible. On n’est pas des chirurgiens cardiaques ou des capitaines d’industrie. Moi, je suis cheffe d’orchestre et, ce que j’aime le plus, c’est identifier des gens. Au-delà de leurs qualités intrinsèques de fond, de forme et de personnalité, j’adore voir où je peux les emmener.” Une méthode qui peut elle aussi la porter loin : elle faisait partie fin novembre du palmarès du Next 40, qui désigne les femmes susceptibles de diriger une entreprise du CAC 40.




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