Le contraste est assez frappant dans le quartier Palisades de Los Angeles. D’un côté, des maisons réduites en cendres, de l’autre, le centre commercial, Palisades Village, qui abrite les plus grandes marques de luxe, complètement intact. Son propriétaire, Rick Caruso, a expliqué au New York Times avoir fait appel à une entreprise privée de pompiers de l’Etat d’Arizona pour sauver son commerce.
Au 20 janvier, la cité des anges comptait 27 victimes des feux et plus de 12 000 bâtiments détruits. Les rares structures qui ont résisté, comme le Palisades Village font presque tâche sur les collines de la ville. Pour le New York Times, l’intensité de ces feux soulève une question centrale : “La municipalité n’aurait-elle pas pu enrôler plus rapidement des pompiers supplémentaires, ce qui aurait limité la propagation des feux ?”
Certains, comme Rick Caruso, n’ont pas attendu que la ville prenne une décision et se sont donc tournés vers des services de pompiers privés chargés de surveiller les propriétés de particuliers. La Californie du Sud, une des régions les plus riches du pays, est celle où ces forces privées ont été le plus sollicitées. Selon le New York Times, des pompiers privés y supervisent la surveillance de villas, dont les propriétaires sont prêts à débourser 3 000 dollars par jour en fonction de l’entreprise pour s’assurer de la protection de leur bien, le montant peut s’élever à 10 000 dollars par jour pour une équipe de 20 pompiers de l’entreprise privée de lutte contre les incendies, Grayback Forestry.
“Les entreprises privées ne sont pas formées ni équipées pour cela”
Un phénomène qui alimente “de grandes questions éthiques”, selon la National Public Radio (NPR). D’après le Los Angeles Times, la colère des riverains est montée après une publication sur la plateforme X de Keith Wasserman, cofondateur d’une agence d’investissement immobilier de la région : “Quelqu’un a-t-il le contact d’une agence de pompiers privés ? […] Je peux payer n’importe quel prix.” Cité par le Los Angeles Times, David Torgerson, fondateur d’une entreprise privée de pompiers, affirme néanmoins que les contrats avec les particuliers restent minoritaires. La plupart des actions menées par ces entreprises privées – dont sont issus 45 % des pompiers aujourd’hui déployés aux Etats-Unis – se font en collaboration avec le gouvernement, selon le New York Times.
Le quotidien américain souligne que la demande pour des services privés de pompiers a fortement augmenté ces dernières décennies, à mesure que les feux de forêts se sont intensifiés. Les vives réactions des riverains californiens ont poussé l’Etat de Californie à adopter en 2018 une loi qui réglemente ce secteur et limite ses marges de manœuvre. Ainsi, ces entreprises n’ont plus le droit d’utiliser des gyrophares ou des insignes similaires à ceux des pompiers de la ville. Depuis l’adoption de cette loi, plusieurs entreprises comme Mt. Adams Wildfires ont arrêté de proposer leurs services à des particuliers.
La gestion de l’eau est un enjeu majeur de la crise que traverse la Californie et aussi l’un des principaux sujets de tension chez les riverains de Los Angeles. Comme nous l’explique le magazine Time, peu de temps après le début des feux le 7 janvier, les bouches d’incendies, auxquelles les pompiers de la ville ont accès, étaient à sec. “La demande extrême a entraîné un ralentissement du taux de remplissage de ces réservoirs, ce qui a créé un défi pour nos efforts de lutte contre les incendies”, a affirmé le 8 janvier sur X Erik Scott, responsable de la communication du service des incendies de Los Angeles. Les entreprises privées assurent, elles, qu’elles puisent de l’eau dans les lacs et les étangs à proximité, ou utilisent l’eau des piscines des résidents.
Dans une interview donnée au New York Times, Brian Rice, président de California Professional Firefighters, association professionnelle des pompiers de Californie, a déclaré : “Nous ne considérons pas ces groupes comme un atout […]. La lutte contre les incendies qui se déroule à Los Angeles en ce moment est une lutte contre des incendies urbains […]. Les entreprises privées ne sont pas formées ni équipées pour cela.” Malgré les critiques visant le recours à ces pompiers privés, David Torgerson affirme à la NPR : “Il est préférable d’avoir plus de ressources. Il est préférable que cela ne se fasse pas au détriment du contribuable ou de l’assuré. Il est préférable que davantage de structures survivent.”
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