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Dérapage du déficit public : pourquoi la commission d’enquête se déchire avant la remise de ses conclusions


C’est une sortie qui n’a pas plu à certains de ses collègues parlementaires. Le député Ensemble pour la République (EPR) Mathieu Lefèvre, co-rapporteur de la commission d’enquête sur le dérapage du déficit public, a suscité l’ire de plusieurs de ses collègues pour avoir donné son avis sur les causes de la situation budgétaire dégradée de la France. Lors d’une conférence de presse mardi 25 mars, l’élu a donc déclaré que ce contexte était le résultat d’une “erreur technique lourde” liée au calcul de la prévision des recettes par l’administration, et non pas d’une faute “politique”.

“Il n’y a aucun cadavre dans le placard budgétaire de la France”, a assuré Mathieu Lefèvre. “Il y a eu une erreur d’évaluation des recettes qui est majeure, de l’ordre de 60 milliards d’euros – 20 milliards d’euros en 2023, 40 milliards d’euros en 2024.” Un mauvais calcul imputable selon lui uniquement aux services de Bercy. “Ce n’est pas une erreur politique dans la mesure où la recette fiscale ne fait pas l’objet d’un arbitrage politique.” Cette vision est aussi celle défendue par l’ex-ministre de l’Economie Bruno Le Maire. En novembre, l’ancien responsable avait promis devant les sénateurs qu’aucune “dissimulation” n’avait eu lieu pour cacher l’état des finances françaises.

“Des méthodes de petit télégraphiste de la macronie”, dit Eric Ciotti

Le déficit public devrait atteindre 6 % du PIB en 2024, après un premier dérapage à 5,5 % l’année passée, selon les chiffres de l’Insee. Mathieu Lefèvre, qui a dit s’exprimer à titre personnel lors de sa prise de parole, juge que “la réaction politique des gouvernements qui se sont succédé en 2023 et 2024 a été (…) appropriée”. Sa préconisation ? Confier la mission du calcul de la prévision des recettes à un organisme indépendant, le Haut conseil des finances publiques. Au total, une trentaine d’auditions de responsables politiques et d’administrations de Bercy, dont Bruno Le Maire, ont été réalisées ces derniers mois par la commission d’enquête.

L’autre co-rapporteur de cette mission, Eric Ciotti, a fortement critiqué la démarche de Mathieu Lefèvre. Le député UDR reproche au macroniste d’avoir communiqué sa propre lecture des faits, alors que la commission d’enquête n’a pas encore rendu ses conclusions. “En publiant ses pseudo-conclusions du rapport de la commission d’enquête sur la dérive des comptes publics, Mathieu Lefèvre contrevient aux règles les plus élémentaires de notre Parlement”, a critiqué le député des Alpes-Maritimes sur son compte X. “Je condamne ces méthodes de petit télégraphiste de la macronie, qui ne cherchent qu’à minimiser les responsabilités de certains politiques.”

De l’autre côté de l’échiquier politique, le président de la commission des Finances à l’Assemblée nationale Eric Coquerel a lui aussi fustigé l’initiative de son collègue Mathieu Lefèvre. Ses propos “dévalorisent la commission d’enquête” sur le dérapage du déficit qui doit rendre ses conclusions le 9 ou le 10 avril, a regretté l’élu LFI de Seine-Saint-Denis, interrogé par l’AFP. “Ce n’est pas un usage, et on peut considérer qu’il y a des règles qui ont été bafouées.” Le député Charles de Courson (Liot), rapporteur de la commission des finances et également membre de la commission d’enquête, devait pour sa part présenter ce mercredi sa contribution aux travaux de la commission.




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