Avec Mon soutien psy, qui fête ces jours-ci ses trois ans, la France a mis fin à une anomalie : l’absence totale de remboursement des consultations de psychologues. Mais pour l’instant, seuls les troubles “légers à modérés” (anxiété passagère, symptômes dépressifs, problèmes de sommeil) sont pris en charge. Les psychothérapies recommandées en cas de pathologie psychiatrique avérée, elles, ne bénéficient toujours pas d’un financement de la collectivité quand elles ont lieu avec un professionnel libéral. Un choix étonnant, y compris au regard de ceux faits par beaucoup d’autres pays européens, qui pour la plupart remboursent ces soins.
Ce n’est pas, loin de là, la seule différence entre la France et ses voisins. Statut, durée des études, autonomie par rapport aux médecins, accès direct ou sur prescription : sur bien d’autres points, notre pays se distingue. Chez la plupart de nos voisins, le recours à un accompagnement psychologique ou psychothérapeutique paraît bien plus encadré que dans l’Hexagone, corollaire d’un remboursement souvent élargi par rapport à Mon soutien psy.
De la Belgique aux Pays-Bas en passant par l’Italie, l’Espagne, le Royaume-Uni ou l’Allemagne, tous les pays couvrent les soins psychologiques pour les troubles légers à modérés. Les autorités belges remboursent par exemple jusqu’à 20 consultations individuelles (12 en France) et un nombre illimité de séances de groupe, avec un reste à charge minimal pour les patients (de 2,50 euros à 11 euros). En Angleterre, 20 séances sont également remboursées par an, tandis qu’en Allemagne, leur nombre n’est pas limité.
Etre ou ne pas être une profession de santé…
En France, les psychologues cliniciens (qui prennent en charge les troubles mentaux, contrairement aux psychologues du travail ou du développement par exemple) ne relèvent pas du code de la santé publique, et la plupart des organisations représentatives s’opposent vivement à leur intégration dans les professions de santé. Cette question, particulièrement épidermique chez nous, ne semble pas se poser dans la vaste majorité des autres pays du Vieux Continent : partout ou presque, la psychologie clinique fait partie intégrante du système de soins.
De même, l’accès aux psychologues n’est possible dans la plupart des cas que sur prescription médicale. Seule l’Angleterre autorise l’accès libre, pour “lever le frein que semblait constituer l’obligation de passer par un médecin généraliste pour une partie de la population”, notait l’inspection générale des affaires sociales dans un rapport paru en 2019. En France, les psychologues font de l’accès direct libre un casus belli. Ainsi, initialement, les patients français devaient impérativement obtenir une prescription d’un médecin pour bénéficier du remboursement prévu dans le cadre du dispositif Mon soutien psy. Mais les représentants de la profession se sont vivement opposés à cette mesure, et Gabriel Attal, quand il était Premier ministre, a fini par leur donner raison et revenir sur cette obligation.
La formation des psychologues cliniciens fait aussi l’objet d’intenses réflexions. Dans l’Hexagone, le cursus est construit avec une licence en trois ans et un master plus spécialisé en deux ans (psychopathologie, psychologie du développement, neuropsychologie…). Les étudiants doivent en parallèle réaliser un stage de 500 heures, soit un peu plus de trois mois, avant d’obtenir leur diplôme. Par la suite, ils peuvent poursuivre leur formation en passant des diplômes universitaires (DU) facultatifs, sur la base du volontariat. A l’étranger, des pays proposent des formations plus longues pour pouvoir exercer auprès de patients atteints de troubles psychologiques ou psychiatriques.
A l’étranger, des formations de psychologue clinicien plus longues
Aux Pays-Bas, la formation initiale se déroule en trois ans de licence plus un an de master, avec 560 heures de stage. Mais ensuite, les futurs “psychologues en santé” doivent entreprendre la deuxième étape de leur cursus, avec une formation spécialisée de 2 ans, combinant études et stages pratiques. Ils peuvent ensuite suivre une surspécialisation en psychologie clinique ou en neuropsychologie. En Allemagne, un master en psychologie ne suffit pas non plus à pouvoir pratiquer les psychothérapies, et la formation complémentaire obligatoire est particulièrement fournie, avec 600 heures d’enseignement théorique, 1 200 heures de pratique dans une institution psychiatrique et 600 heures équivalentes à un internat supervisé, rémunéré environ 1 000 euros par mois, selon un rapport du Manifeste psy, une association regroupant des psychologues opposés à Mon parcours psy.
En Belgique, enfin, la formation se fait en cinq ans comme en France mais elle est complétée d’une année minimum de “pratique supervisée” pour les futurs psychologues cliniciens. Pour exercer, ceux-ci doivent s’inscrire auprès de la “commission des psychologues”, organisme public indépendant qui délivre un numéro d’agrément et “veille au titre et à la déontologie”, selon ses statuts. Une alternative à la création d’un ordre, dont les représentants des psychologues français ne veulent pas non plus entendre parler ?
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