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Février 2026 : Israël pilonne l’Iran, la France prise dans l’engrenage

Qui aurait pu imaginer, en décembre 2021, l’invasion russe en Ukraine ? Un an auparavant, l’assaut du Capitole ? Pour parer aux menaces qui nous entourent, le ministère des Armées travaille depuis de nombreuses années sur des scénarios d’entrée en guerre de la France. Plusieurs structures – du centre de planification de conduite des opérations au centre de doctrine (CPCO) et d’enseignement du commandement (CDEC) sont même dévolues à ce travail de prospective. Depuis trois ans, les états-majors des armées financent aussi l’Observatoire des conflits futurs, qui rassemble un consortium de recherches sur les menaces d’ici à 2040, dirigé à la fois par la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) et l’Institut français des relations internationales (Ifri). La célèbre Red Team, composée de chercheurs et d’écrivains, prépare pour l’armée des réflexions d’anticipation à l’horizon 2060.

Alexandra Saviana, journaliste à L’Express, a passé un an auprès de ces stratèges chargés d’imaginer, les combinaisons les plus dévastatrices. Elle signe, ce 16 mai, Les Scénarios noirs de l’armée française (Robert Laffont), une plongée dans les 11 conflits catastrophes qui guettent les forces tricolores d’ici à 2030. Appuyés par les analyses de 106 experts, ces récits d’engrenages guerriers nous font découvrir les “chemins mentaux” des grandes puissances – l’expression est d’Antoine Bourguilleau, officier traitant à la cellule jeu de guerre du CDEC. Cet ouvrage fait suite à un dossier éponyme paru en mars 2023 dans L’Express, dans lesquels des scénarios avaient été élaborés d’après les suggestions de nos témoins, la loi de Murphy, ingénieur et militaire américain : “Tout ce qui est susceptible d’aller mal ira mal.” Russie, Chine, cyber, djihadisme… Comme dans le précédent dossier de L’Express, la majorité des onze hypothèses recoupent celles sur lesquelles se penchent les armées. Il ne s’agit aucunement de prévisions, mais d’un travail de prospective.

EPISODE 1 – 2025, des militaires algériens ciblent Toulon : les scénarios de guerre de l’armée française

Février 2026 – Le Moyen-Orient s’embrase

Le convoi du brigadier général Ismael Qaani, chef de la force Al‐Qods iranienne, file vers l’aéroport international de Damas. Il est en compagnie du chef de la Liwa Fatemiyoun, l’une des milices iraniennes, composée d’Afghans partis il y a plusieurs années combattre en Syrie en soutien de Bachar el‐Assad.

[…] Alors que le convoi arrive aux abords de l’aéroport, un drone américain MQ‐9 Reaper le prend en chasse. Outre‐Atlantique, l’ordre est donné de tirer. Les deux chefs sont tués, ainsi que cinq officiers iraniens et quatre miliciens. Washington explique l’assassinat en indiquant que la force Al‐Qods, menée par Qaani, aurait donné l’ordre aux Fatimides de faciliter le transit d’armes vers le Hezbollah libanais, afin de mener des attaques contre des cibles israéliennes et américaines.

“On se retrouverait dans un scénario similaire à celui que la région a déjà connu en janvier 2020”, se souvient Julien Nocetti, chercheur associé au Centre Russie‐Eurasie de l’Ifri et enseignant‐chercheur en cyber à Saint‐Cyr. “Un drone de l’armée américaine avait ciblé le convoi de Qassem Soleimani, alors chef de la force Al‐Qods, qui traversait l’Irak. On pourrait imaginer qu’une action de ce type pourrait bien avoir à nouveau lieu.”

[…] Entre mars et mai 2026, une vingtaine d’attaques frappent des cibles américaines et israéliennes dans la région. Elles sont non revendiquées, mais Washington les attribue à l’action de milices iraniennes. A Téhéran, l’opération porte pourtant bien un nom : l’opération Martyr Qaani.

Sous-marins en état d’alerte

[…] Le 31 mai, l’opération Chariots de Dieu est lancée. 55 F‐35 israéliens décollent de la base aérienne de Ramon, dans le désert du Néguev, au sud de Jérusalem. Se fondant sur les informations du Mossad et de la CIA, les avions de chasse s’envolent vers plusieurs sites d’enrichissement d’uranium, dont chacun tombe dans le radius de combat des avions israéliens : celui de Natanz, au cœur de l’Iran, d’Ispahan, à quelques kilomètres, et enfin de Fordo, à 150 kilomètres de Téhéran. Dans le même temps, plus de 1 500 soldats sont positionnés le long de la frontière libanaise, alors que 2 000 sont envoyés en Cisjordanie. Tous les sous‐marins du pays présents en Méditerranée sont en état d’alerte.

3802 cover scenarios proche orient

“Tsahal n’a aucune envie de retomber dans le piège qui l’avait opposée au Hezbollah libanais en 2006, où la guerre s’était terminée sans qu’Israël ait atteint ses objectifs déclarés. En cas de nouveau conflit, l’armée israélienne déploierait sans doute une puissance de feu sans précédent pour essayer de faire un maximum de dégâts en très peu de temps, analyse Didier Leroy, chercheur auprès de l’Institut royal supérieur de défense en Belgique. Ils ont annoncé la couleur depuis longtemps : ils n’auraient aucun intérêt à laisser le conflit s’enliser.”

[…] Plusieurs centaines de morts sont à déplorer. Une grande partie de la communauté internationale exprime son indignation face à cette décision d’Israël. Chine et Russie appellent au calme. L’ONU, paralysée, ne prend aucune décision.

[…] Un commando du Hezbollah tente de traverser la frontière, et une très violente altercation éclate. On dénombre 18 morts, dont six civils. “Au sein de ce montage milicien pro‐iranien, la pièce maîtresse est incontestablement le Hezbollah. C’est de loin l’acteur le plus robuste, le plus entraîné et le mieux équipé, rappelle Didier Leroy. Le front nord est la bête noire de Tsahal, un front voué à s’embraser à nouveau à l’avenir. Ce jour-là, les troupes de la Finul présentes au Sud-Liban, comprenant des effectifs français, se retrouveront prises dans un conflit de très haute intensité.” Les 700 militaires français présents dans le dispositif des Casques bleus de l’ONU ne sont pas censés s’interposer, mais sont vite dépassés par l’ampleur du conflit.

Déluge de feu

Dans les vingt‐quatre heures qui suivent, le déluge de feu qui s’abat sur le sud du Liban et sur la frontière nord israélienne entraîne la mort de 220 civils libanais, 16 Israéliens, 14 militaires de la Force intermédiaire des Nations unies au Liban (Finul), dont quatre soldats français. […]

A la mi-juin, quatre otages dont un Français, deux Britanniques, un Américain sont accusés d’avoir espionné l’Iran pour le compte de l’Occident, puis menacés d’être condamnés à mort. Dans le même temps, des cyberattaques d’une rare intensité ont lieu un peu partout en Occident. En France, des problèmes de feux de la circulation dans plusieurs quartiers de Toulouse et de Marseille entraînent des accidents. “Téhéran mènerait une guerre asymétrique, qui serait dans une logique très iranienne : vous mettez le feu chez nous, on le met chez vous”, poursuit Elie Tenenbaum. […]

Au bout de trois mois de négociations, un cessez-le-feu est entendu entre Tel‐Aviv et Téhéran. Malgré la signature à Oman, on attribue en grande partie à Mohammed ben Salmane [NDLR : le Premier ministre de l’Arabie saoudite] – qui a beaucoup œuvré en coulisses – le mérite de ce temps de paix. Cet homme, qui avait du sang sur les mains pour avoir ordonné l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi, est désormais célébré comme le grand faiseur de paix du Moyen‐Orient. […] La voix saoudienne compte désormais bien plus que celle de Paris dans la région – et au-delà.

Les scénarios noirs de l’armée française. Comprendre les menaces qui nous attendent, par Alexandra Saviana. Robert Laffont, 240 p., 19 €.




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