Ce sont des chiffres qui viennent à contre-courant de ce qui est parfois sous-entendu, d’une Union européenne rejetée par une majorité de citoyens et dominée par les eurosceptiques. Selon une étude publiée ce mardi 28 mai, les Européens partisans d’une sortie de leur pays de l’UE ou de la monnaie unique sont en réalité très largement minoritaires, y compris parmi les électeurs des partis d’extrême droite.
Selon cette enquête, réalisée par l’institut Ipsos pour la Fondapol dans les 27 pays de l’UE, seuls 13 % des électeurs souhaiteraient ainsi voir leur pays quitter l’Union européenne. Les pays dans lesquels le poids des électeurs voulant quitter l’UE est le plus important sont la Bulgarie (22 %), la République tchèque (20 %), l’Autriche (19 %), mais aussi la France (18 %). A l’inverse, seuls 3 % des Portugais, 5 % des Lituaniens ou 5 % des Espagnols veulent sortir de l’Union européenne.
Une large partie d’électeurs se trouve néanmoins dans un entre-deux : s’ils se déclarent défavorables à l’Union européenne, ils ne souhaitent pas pour autant voir leur pays la quitter. C’est le cas de 18 % des citoyens à travers les Etats-membres de l’UE. Mais aussi de près de 25 % des électeurs en France ou aux Pays-Bas, de 23 % d’entre eux en Hongrie, ou encore de 15 % de répondants en Allemagne.
Pour les pays ayant adopté l’euro, seuls 8 % veulent revenir à leur monnaie nationale. Le chiffre le plus élevé est en Croatie (14 %), dernier pays à avoir adopté la monnaie unique, et le plus faible là encore au Portugal (3 %). Il est de 10 % en France.
Une vraie bascule des extrêmes droite européennes ?
Autre conclusion non négligeable de cette étude : les électeurs des partis d’extrême droite européens semblent également eux aussi très majoritairement… favorables à rester dans l’UE. C’est le cas de 66 % des électeurs qui ont l’intention de voter pour un parti membre du groupe Identité et Démocratie (ID) au Parlement européen, le groupe auquel appartient le Rassemblement national. Le chiffre est encore plus élevé (80 %) pour les électeurs d’un parti membre du groupe des Conservateurs et réformistes européens (CRE) dont est membre la formation de la Première ministre italienne Giorgia Meloni, le parti postfasciste Fratelli d’Italia.
Il en va de même pour l’euro, auquel sont favorables 78 % des électeurs du groupe ID et 90 % du groupe CRE. “Les électeurs populistes sont massivement favorables à l’euro, amenant les leaders populistes à se convertir à l’idée d’une monnaie européenne sinon à perdre leurs électeurs”, détaille la Fondapol. “Les partis anti-européens se trompent lourdement s’ils pensent pouvoir convaincre les peuples de proclamer leur souveraineté en renonçant à l’Union européenne”, conclut le groupe de réflexion libéral.
Une stratégie qui se retrouve dans l’évolution du programme politique de ces partis, qui semblent avoir adopté ce pragmatisme électoral. En France, le Rassemblement national semble par exemple avoir abandonné l’idée d’une sortie de l’UE ou de la monnaie unique, qu’il défendait encore dans son programme lors de l’élection présidentielle 2017, au profit de mesures plus floues sur son rapport aux institutions européennes.
En Italie, après avoir été dans sa campagne très critique de l’UE, la Première ministre Georgia Meloni semble avoir privilégié une stratégie de compromis avec Bruxelles, à l’image de son soutien absolu au Pacte asile et migration, pourtant largement rejeté par d’autres partis d’extrême droite au sein de l’UE.
Les institutions européennes en net gain de confiance
Cet attachement à l’Union européenne se retrouve également à travers le seul exemple d’un Etat membre ayant fait le choix de la quitter : le Brexit. Ainsi, selon l’étude, seuls 21 % des Européens jugent que le Royaume-Uni “s’en sort mieux hors de l’UE”, et 77 % d’entre eux se déclarent même favorables au retour des Britanniques dans l’UE. Sur cette question, Ipsos a aussi sondé les Britanniques, qui seraient de leur côté aujourd’hui près de 68 % à vouloir revenir dans l’UE.
Selon la Fondapol, “le soutien des citoyens à l’Union européenne se vérifie aussi dans la confiance qu’ils accordent à la Commission européenne (57 %) et au Parlement européen (57 %)”. Des chiffres en hausse de 10 % par rapport à la dernière enquête, menée il y a seulement trois ans. Mais qui sont surtout “nettement supérieurs à la confiance que les citoyens accordent à leurs institutions politiques nationales, qu’il s’agisse du gouvernement de leur pays (44 %) ou de leur parlement national (51 %)”, détaille le groupe de réflexion.
L’enquête met enfin en lumière les conséquences de la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine. Un tiers des répondants (32 %) la citent en premier ou en deuxième raison de leur vote au scrutin du 9 juin prochain. Un chiffre qui frôle ou dépasse les 50 % dans les pays Baltes et la Pologne, mais atteint aussi 41 % en Allemagne, alors qu’il n’est que de 26 % en France. Des raisons différentes de soutenir l’Union européenne, mais un soutien qui reste majoritaire : de quoi susciter de l’espoir à quelques jours des élections européennes.
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