Les électeurs vont-ils se mobiliser les 30 juin et 7 juillet prochains ? C’est une des grandes inconnues de ces élections législatives. Plus d’un million de procurations ont déjà été validées d’après le ministère de l’Intérieur, et la participation pourrait atteindre 63 %, selon un sondage de l’Ifop pour Le JDD publié dimanche 16 juin. Soit 15 points de plus qu’en 2022. Un tel chiffre serait le signe d’un intérêt revitalisé des Français pour ces élections historiques, mais pourrait aussi augmenter le nombre de triangulaires au second tour.
Pour remporter une élection législative dès le premier tour, il faut obtenir 50 % des suffrages exprimés et 25 % des électeurs inscrits sur les listes électorales. Sinon, un second tour s’impose, avec les deux candidats arrivés en tête. Mais un troisième prétendant peut se maintenir s’il a reçu le vote de 12,5 % des inscrits.
C’est sur ce point que la participation joue un rôle crucial. Si elle est faible, il est alors plus difficile pour un candidat d’atteindre ce seuil. Mais si elle est élevée, le candidat arrivé en troisième place a toutes ses chances de le franchir. “C’est mathématique. Avec 60 % de participation, les candidats doivent dépasser 20,8 % des suffrages exprimés. Donc plus la participation est importante, plus il y a de triangulaires”, explique le politologue Jean-Yves Dormagen au Nouvel Obs.
Peu de candidats cette année
Ces dernières années, de moins en moins d’électeurs se sont rendus aux urnes pour les législatives. En 2022 comme en 2017, ils étaient moins de 50 % à s’être déplacés. Ce qui a fait inévitablement baisser le nombre de triangulaires : une seule en 2017 et huit il y a deux ans. Bien loin du record de 1997. Lors de ces élections anticipées suivant (déjà) une dissolution de l’Assemblée nationale, 79 triangulaires avaient eu lieu, dont 76 avec des candidats du Front national. La participation était alors de 68 % !
Autre facteur à prendre compte : le nombre de candidats. Cette année, avec l’union de la gauche en Nouveau Front Populaire, les alliances entre des candidats des Républicains et le Rassemblement national, et la décision du camp présidentiel de n’investir personne face à certains députés sortants, il y a beaucoup moins de prétendants que lors des précédentes élections. Le délai très court pour déposer sa candidature a aussi empêché certains partis de proposer des candidats, comme le Parti animaliste. Tous ces paramètres font que les votes ne seront pas dispersés entre une foule de partis, et qu’il sera donc plus facile de réunir 12,5 % des inscrits.
Le désistement, question épineuse
Toutefois, une question reste en suspens. Un candidat qui parvient à se maintenir au second tour devrait-il se désister pour faire barrage au Rassemblement national ? Historiquement, c’est ce parti qui bénéficie des triangulaires, car les voix de ses opposants s’éparpillent sur deux autres candidats. A gauche, tous les responsables politiques bottent en touche. Seul l’eurodéputé Raphaël Glucksmann a pris clairement position dès le vendredi 14 juin sur France Inter. “Ce à quoi j’appelle, en mon nom personnel, c’est à se ranger derrière le candidat qui est démocrate et qui sera le mieux placé pour faire face au RN et lui barrer la route”, a-t-il affirmé.
L’ancien président François Hollande, candidat surprise en Corrèze, partage cet avis. “Au second tour, le désistement républicain doit s’appliquer dans toute sa rigueur” en faveur de “tout candidat qui s’est mis hors de tout rapport avec l’extrême droite”, a-t-il précisé à BFMTV.
Mais les positions des autres partis sont floues, y compris à Renaissance. Certains, comme le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, pratiqueront le “ni-ni” : “ni Rassemblement national, ni LFI”. D’autres, comme Olivia Grégoire, opteront pour le vote blanc, “sauf si c’est un socialiste modéré” à gauche. Clément Beaune, de son côté, est un des rares à dire qu’il votera même pour un candidat insoumis pour faire barrage au RN.
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