Le Premier ministre hongrois Viktor Orban s’est rendu en Ukraine pour sa première visite depuis le début de l’invasion russe, a annoncé Budapest, malgré les fortes tensions liées à sa proximité avec Moscou et son opposition à l’aide pour Kiev.
Le dirigeant “est arrivé à Kiev pour des discussions avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky”, a déclaré son attaché de pressé Bertalan Havasi, cité par l’agence de presse nationale MTI. Il s’agit avant tout d’évoquer “la possibilité de parvenir à la paix”, a-t-il ajouté.
“Un cessez-le-feu rapidement”
Depuis Kiev, le Premier ministre hongrois a exhorté le président Volodymyr Zelensky à envisager au plus vite “un cessez-le-feu” afin de parvenir à la paix. “J’ai demandé au président de considérer la possibilité d’un cessez-le-feu rapidement”, qui serait “limité dans le temps et permettrait d’accélérer les négociations de paix”, a déclaré le dirigeant nationaliste.
De son côté, Volodymyr Zelensky a insisté sur l’importance d’une “paix juste” dans son pays. Le président ukrainien a affirmé que la visite du dirigeant hongrois illustrait les “priorités européennes communes, à quel point il est important d’apporter une paix juste à l’Ukraine et à l’ensemble de l’Europe”. “Il est également très important pour nous tous en Europe que le soutien de l’Europe à l’Ukraine reste à un niveau suffisant, y compris notre défense contre la terreur russe”, a également exhorté Volodymyr Zelensky.
Il se démarque sur l’Ukraine
Viktor Orban, dont le pays vient de prendre la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne pour six mois, se démarque nettement des autres dirigeants occidentaux sur l’Ukraine. Il bloque par exemple régulièrement l’aide militaire à l’Ukraine, extrêmement précieuse pour Kiev, et ne cesse d’appeler à un cessez-le-feu.
En début d’année, il avait mis son veto à une enveloppe de 50 milliards d’euros. Celle-ci avait finalement été validée, mais avec un retard dénoncé par les responsables ukrainiens.
Le dirigeant eurosceptique, au pouvoir sans interruption depuis 2010, s’était aussi farouchement opposé à toute discussion d’adhésion à l’UE pour l’Ukraine, jugeant que ce pays n’était pas prêt. Il avait finalement accepté de quitter la table du sommet des dirigeants des Vingt-Sept en décembre dernier, le temps que ses 26 homologues décident d’ouvrir les négociations d’adhésion avec Kiev.
Lundi, le président Zelensky a adressé ses “félicitations” à la Hongrie pour le début de sa présidence de l’UE. Il a dit espérer que le pays promouvrait les “valeurs, objectifs et intérêts européens communs”.
Querelle ancienne
Viktor Orban est resté proche de la Russie et de son président Vladimir Poutine, avec qui les Occidentaux ont coupé les ponts depuis le début de la guerre en Ukraine. A contre-courant, lui renforce les liens politiques et économiques de son pays avec le Kremlin. La Russie reste une source clé pour les besoins énergétiques du pays d’Europe centrale.
Le dirigeant hongrois désapprouve par ailleurs les sanctions européennes votées contre la Russie et tente de les adoucir, sans toutefois les bloquer entièrement. Il a qualifié à plusieurs reprises l’invasion russe de l’Ukraine d'”opération militaire”, reprenant un euphémisme imposé par le Kremlin afin d’éviter de parler de guerre.
Viktor Orban a d’ailleurs rencontré Vladimir Poutine à Pékin en octobre 2023, afin de discuter de coopération énergétique. A l’inverse, ses relations avec Volodymyr Zelensky sont très fraîches. Le Premier ministre hongrois avait même classé le dirigeant ukrainien parmi ses “opposants” lors d’un discours après sa réélection en 2022.
Volodymyr Zelensky, de son côté, avait dénoncé dans les premiers jours de la guerre le manque de soutien de Viktor Orban. Ils se sont néanmoins rencontrés à plusieurs reprises, notamment fin juin, lors d’un sommet du Conseil européen à Bruxelles. En décembre, les deux avaient aussi eu un échange très scruté lors de l’investiture du président argentin Javier Milei. Des images, publiées en ligne, montraient ce qui semblait être une conversation tendue. Volodymyr Zelensky avait lui qualifié l’échange de “franc”.
Une réunion entre les deux dirigeants était en discussion depuis plusieurs mois, selon des déclarations de responsables ukrainiens. Leurs ministres des Affaires étrangères respectifs s’étaient ainsi rencontrés fin janvier afin de préparer une entrevue entre leurs dirigeants.
Des mesures controversées
La querelle entre les deux pays n’est pas nouvelle et les relations diplomatiques s’étaient déjà envenimées avant l’invasion, parce que l’Ukraine a adopté depuis 2017 une série de mesures controversées, notamment sur l’enseignement de la langue ukrainienne.
Plus de 100 000 Magyars vivent en Transcarpatie, région de l’extrême ouest de l’Ukraine qui était sous contrôle de Budapest jusqu’à la Première Guerre mondiale.
La Hongrie, qui partage une frontière avec l’Ukraine, a par ailleurs accueilli bien moins de réfugiés que la plupart des membres de l’UE.
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