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Présidence de l’Assemblée nationale : une élection plus stratégique que jamais


Elle est, pour ainsi dire, aussi crainte qu’attendue. L’élection du prochain président de l’Assemblée nationale se tiendra ce jeudi 18 juillet dans l’hémicycle du Palais Bourbon. Dans les starting blocs, six candidats, dont trois sont issus des trois principaux blocs : la présidente sortante Yael Braun-Pivet pour Renaissance, le communiste André Chassaigne pour le Nouveau Front populaire (NFP), le vice-président sortant Sébastien Chenu pour le Rassemblement national (RN).

Mais Les Républicains (LR), le groupe centriste Liot et les députés Horizons présentent eux aussi leur champion. Il faut dire que l’échéance est cruciale, tant le prochain locataire de l’Hôtel de Lassay est promis à un rôle politique de premier plan. “Bien plus stratégique que n’importe quel autre de ses prédécesseurs”, confie à L’Express une huile parlementaire. Et ce, pour plusieurs raisons.

Un rôle politique dopé par l’absence de majorité présidentielle

Tout d’abord, “la théâtralisation de son élection lui conférera mécaniquement beaucoup plus d’importance,” explique le politologue et historien Jean Garrigues. Aussi, contrairement aux précédentes législatures, sa victoire est loin d’être acquise. Car jusqu’à présent, le quatrième personnage de l’Etat était à coup sûr issu des rangs du groupe majoritaire. Il n’est ainsi pas inenvisageable que pour la première fois depuis 1958, un membre d’un groupe minoritaire siège au perchoir.

Autre point : pour la première fois, Emmanuel Macron ne dispose d’aucune majorité, même relative. “Le maître des horloges n’a plus entre ses mains de groupe suffisamment puissant pour s’imposer, et le président de l’Assemblée nationale ne restera pas le petit doigt sur la couture du pantalon à exécuter le calendrier présidentiel. Sa capacité d’arbitrage sera donc considérable, en particulier dans l’établissement des priorités législatives”, explique Guillaume Drago, professeur de droit public à l’université Panthéon-Assas Paris II.

D’autant que les institutions confèrent au président de l’Assemblée nationale de larges pouvoirs en matière institutionnelle : convocation et présidence des séances publiques, organisation du travail parlementaire et des débats en séances publiques. Le président de la chambre basse peut également saisir le Conseil constitutionnel avant le vote d’un projet de loi afin d’en vérifier la légalité. Il pourrait par exemple être “un frein” à l’exécution de tel ou tel programme.

L’heure de la véritable “clarification” ?

A nuancer toutefois, car il doit avant tout assurer stabilité de la chambre basse. “Sans pour autant étouffer les débats”, tempère Guillaume Drago. Ainsi doit-il veiller à l’harmonie dans l’hémicycle, à la manière d’un “chef d’orchestre”. Une formule héritée de Jacques Chaban-Delmas, président de l’Assemblée nationale seize années durant. “Il faut savoir comprendre les débats, leur laisser le temps quand ils le méritent, les raccourcir quand ils s’éternisent, bref, tout un art”, sourit Jean-Jacques Urvoas, ancien député, garde des Sceaux et actuel professeur de droit public à l’université de Bretagne-Occidentale. Et d’abonder : “Ce qu’avait compris Philippe Seguin, qui avait tenu à présider au début de son mandat toutes les séances”.

Mais avant même que les députés ne ferraillent dans l’hémicycle, l’élection pourrait être la “clarification”, appelée de ses vœux par Emmanuel Macron au soir du 9 juin. Et pour cause, le ou la présidente de la chambre basse “donnera la coloration politique de l’Assemblée”. Les groupes parlementaires pourront ainsi acter leur appartenance ou non à l’opposition. Car la configuration politique sortie des urnes le 7 juillet dernier rendait difficile l’établissement d’une frontière entre majorité et opposition.

Par ailleurs, Emmanuel Macron qui enjoint les différentes forces politiques à trouver un accord en vue de former un gouvernement, pourrait s’appuyer sur le résultat de ce jeudi pour choisir le successeur de Gabriel Attal. “Si Yaël Braun-Pivet est élue, cela pourrait être un argument pour ne pas nommer le candidat du NFP, si candidat il y a”, raille un profil capé. Et la coalition de gauche formée à la hâte au lendemain de la dissolution l’a bien compris. Raison pour laquelle le NFP, qui s’écharpe depuis plus d’une semaine sur le choix d’un Premier ministre, est parvenu à la surprise générale à tomber d’accord sur le nom d’un candidat pour le perchoir à la veille du scrutin. A croire que la gauche ne sait accorder ses violons que dans l’urgence.




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