Bientôt le retour au centre du jeu pour Boris Johnson ? Deux ans après son départ forcé du 10 Downing Street, l’ancien Premier ministre britannique est pressenti pour prendre la direction du journal britannique The Daily Telegraph, rapporte la presse britannique en ce début de semaine. L’information, d’abord révélée par Sky News, a été confirmée par plusieurs autres titres de presse comme The Guardian, The Times et même le Telegraph lui-même.
Le très influent journal conservateur britannique, sorte d’équivalent du Figaro outre-Manche, est en vente depuis le défaut de paiement de la famille Barclay, qui le détenait depuis 2004. Une offre semblait tenir la corde pour reprendre le titre fondé en 1855 : celle d’un consortium mené par le vice-président des Emirats arabes unis, Sheikh Mansour. Mais celle-ci s’est finalement faite court-circuiter par une loi votée en avril dernier par l’ancienne majorité conservatrice, qui a interdit à un Etat étranger d’acquérir un journal ou un magazine.
Retour à zéro, donc. Et cette fois-ci, c’est l’ancien ministre des Finances de Boris Johnson, Nadhim Zahawi, qui semble au centre du jeu et aurait déjà contacté plusieurs riches investisseurs pour monter une offre à plus de 600 millions de livres sterling (plus de 702 millions d’euros) pour le Daily Telegraph, mais aussi pour le magazine The Spectator. Avec pour projet, notamment, de placer BoJo à la direction de la rédaction du Telegraph, perçu comme la courroie de transmission du Parti conservateur au Royaume-Uni, et qui a dépassé le million d’abonnements en août 2023. Aucun accord n’a jusqu’ici été conclu avec la figure du Brexit, et les discussions sont jusqu’ici restées informelles. Mais elles pourraient donner du poids à la candidature de Nadhim Zahawi pour prendre le contrôle du journal.
Ancien correspondant du journal
Cette nomination serait comme un retour aux sources pour BoJo. C’est en effet comme journaliste au Daily Telegraph que celui-ci s’est fait connaître du grand public, en étant notamment le correspondant du journal à Bruxelles de 1989 à 1994. Ses chroniques acerbes sur l’Union européenne et son fonctionnement, n’hésitant jamais à distordre les faits voire à en inventer pour amuser et servir ses récits, l’ont fait devenir très populaire au Royaume-Uni, notamment au sein des milieux conservateurs.
De quoi faire peu à peu infuser les arguments pour le Brexit, dont il deviendra l’une des figures de proue un peu plus de deux décennies plus tard. “Il était davantage perçu comme un bouffon haut en couleur. Mais nous n’avions pas réalisé qu’il allait donner le ton du débat britannique”, rapportait un ancien fonctionnaire du Royaume-Uni à Bruxelles au journal The Guardian en 2019.
Si depuis, les scandales à répétition ont largement entaché l’image et la réputation de BoJo, allant jusqu’à le forcer à la démission du poste de Premier ministre en 2022, ce dernier a tout de même gardé une influence dans le débat public britannique. Il rédige notamment une chronique hebdomadaire pour le très lu Daily Mail, “pour laquelle il percevrait un salaire à six chiffres”, affirme le Telegraph.
Un goût de vengeance sur les Tories ?
Mais c’est peut-être bien en retournant là où il s’est d’abord fait connaître que Boris Johnson pourrait redevenir une figure de premier plan au Royaume-Uni, en prenant la direction d’un titre très influent au sein des milieux conservateurs. Si l’ancien Premier ministre n’a pas répondu aux sollicitations des médias britanniques, “il garde une grande affection pour le Telegraph“, a assuré l’un de ses proches à Sky News.
Pour Boris Johnson, cette nomination pourrait également avoir un goût de vengeance sur le parti conservateur et sur Rishi Sunak, écrasés aux dernières élections législatives par les travaillistes. Banni par son propre camp du Parlement britannique en juin 2023 après les conclusions du rapport sur le Partygate – ces fêtes organisées au 10 Downing Street durant la pandémie de Covid-19 outrepassant toutes les restrictions sanitaires -, BoJo s’était fait très discret dans la campagne de son successeur Rishi Sunak, ne lui apportant son soutien que dans la dernière ligne droite du scrutin.
Prendre la direction de la courroie de transmission des Tories pourrait le replacer au centre du jeu dans son parti, et pourquoi pas lui permettre de régler certains comptes avec ceux qui avaient précipité sa chute. A l’image de sa carrière politique d’éternel outsider, Boris Johnson n’a jamais dit son dernier mot.
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