Volodymyr Zelensky, en poste depuis 2019, endosse le difficile rôle de diriger une nation, dont l’existence est continuellement menacée par les agissements de son voisin russe. Voilà deux années et demie que l’Ukraine se défend face à l’agression de l’armée de Vladimir Poutine, une éternité qui a transformé l’ancien comédien. Zelensky a troqué les costumes pour un t-shirt kaki et la barbe a progressivement envahi ses joues autrefois glabres. Son calendrier est désormais rythmé par les rencontres à l’international, lors desquelles il ne cesse de plaider la cause de son pays. Le président ukrainien a d’ailleurs bien saisi l’importance de la communication dans ce conflit du XXIe siècle, devenant le principal porte-voix de la cause ukrainienne. C’est tout naturellement qu’il s’est chargé de révéler la mise en service d’un armement nouveau, de fabrication ukrainienne et capable de frapper en profondeur le territoire ennemi.
Jusqu’alors, les puissances occidentales limitent l’emploi par l’Ukraine des missiles qu’elles lui fournissent. En mai, elles s’étaient tout de même résolues à autoriser l’armée de Zelensky à cibler Belgorod – située à 30 kilomètres de la frontière – et ses alentours. De fait, les possibilités d’atteindre dans la profondeur le complexe militaro-industriel de Vladimir Poutine demeurent restreintes. Mais les débuts d’une solution s’esquissent pour l’Ukraine. Son nom : “Palianytsia”. En français, cela veut dire “petit pain”. Il désigne le nouveau missile de croisière made in Ukraine. L’appellation est un pied de nez aux russophones car il s’avère difficilement prononçable pour eux. Son arrivée sur le champ de bataille, annoncée sur les réseaux sociaux par Volodymyr Zelensky, s’est faite le dimanche 25 août. Cependant, aucune communication officielle ne mentionne les résultats de son opération.
Sur X (anciennement Twitter), l’on peut voir des vidéos de ce que le président ukrainien qualifie de “drone fusée”. Il s’agit d’un engin propulsé par un turboréacteur sur lequel une paire d’ailes est accrochée. Toujours selon les mots du président, il a été développé “pour détruire le potentiel offensif” de l’ennemi. Dans une vidéo partagée avec l’annonce de l’arrivée des palianytsia, Kiev explique que sa stratégie est de frapper les aérodromes russes depuis lesquels sont lancés les quelque 43 000 bombes, missiles et autres drones qui ont frappé le territoire ukrainien depuis le début du conflit. Avec l’arrivée de ce drone, l’Ukraine assure avoir à portée de tir, “deux douzaines d’aérodromes russes”.
Le drone missile lors du décollage :https://t.co/H6sAXt178V https://t.co/oOr71LPgC9 pic.twitter.com/BGlO0dLpYk
— Antoine ???????? (@thetoitoi) August 24, 2024
Une industrie de l’armement naissante
“La présence physique de nos forces dans la région de Koursk”, ainsi que les frappes menées sur le sol russe, “sont des moyens de compenser [notre] manque de capacités à longue portée”, justifiait sur X, le 26 août, le président Zelensky. Le lendemain, l’Ukraine renforçait un peu plus sa palette d’action en annonçant – encore une fois par la voix de son dirigeant – “le test réussi” d’un missile balistique, lui aussi de fabrication ukrainienne. En se dotant de missiles balistiques, les Ukrainiens s’offrent “une capacité d’emport de la charge militaire” plus importante que celle d’un drone, explique à L’Express le général Dominique Trinquand. “Là où avec un drone vous emporter 40 kilogrammes de charge, avec un missile vous pouvez monter jusqu’à 100”, estime-t-il.
Par conséquent, pas besoin d’être aussi précis. “Avec 40 kilogrammes de charge, il faut tomber à moins de dix mètres de votre objectif”, éclaire l’ancien chef de la mission militaire française auprès de l’ONU. D’autant plus que les Russes réussissent davantage à brouiller le guidage des drones”, poursuit l’expert militaire. De plus, les missiles balistiques “volent plus haut et plus vite que les drones”, ce qui les rend plus difficiles à intercepter. Concernant la question du guidage, le général Trinquand estime que c’est une technologie sur laquelle les industriels ukrainiens auraient pu travailler conjointement avec les Occidentaux.
Volodymyr Zelensky a profité de l’annonce de ce test réussi pour “féliciter son industrie de l’armement”, rapporte l’AFP. Par ailleurs, la capacité de créer un modèle comme celui du palianytsia, en un an et demi, relève d’une petite prouesse. “D’habitude, ce genre de projet met au moins deux ans à voir le jour”, assure un ingénieur ayant travaillé sur le projet dans une interview publiée sur United 24, la plateforme de donation gérée par le gouvernement ukrainien. Le général Trinquand souligne d’ailleurs que l’Ukraine est un pays historiquement “avec beaucoup d’ingénieurs” et que, du temps de l’Union soviétique, “20 % de son arsenal provenait d’Ukraine”.
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