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Avec Raffaele Fitto, Giorgia Meloni installe l’extrême droite italienne à Bruxelles


“On ne pourra pas ignorer l’Italie”, rétorquait Giorgia Meloni à ses détracteurs qui fustigeaient son refus de soutenir la réélection d’Ursula von der Leyen à la présidente de la Commission européenne. Une décision lourde de conséquences qui faisait craindre une marginalisation de l’Italie au sein des futures institutions bruxelloises. Il n’en sera rien si on en croit le quotidien allemand Die Welt qui cite des diplomates européens et des sources informées au sein de la Commission. Raffaele Fitto, le candidat de Giorgia Meloni comme futur commissaire italien, serait nommé au poste de vice-président exécutif chargé de l’économie.

Une décision qu’avait anticipée la semaine dernière Manfred Weber en déplacement à Rome. Le chef des eurodéputés conservateurs du PPE, le premier groupe au Parlement de Strasbourg qui doit donner son aval à toutes les nominations de commissaire, se déclarait “favorable à l’attribution d’un rôle fort à l’Italie”. “C’est l’un des pays les plus importants de l’UE, avait-il poursuivi. Giorgia Meloni et Antonio Tajani (leader de Forza Italia) ont reçu un soutien considérable lors des élections européennes, contrairement à Emmanuel Macron et Olaf Scholz, qui ont été les grands perdants.”

Transformisme politique

Raffaele Fitto, actuel ministre italien des Affaires européennes en charge du plan de relance, sera le premier membre d’un parti populiste d’extrême droite à devenir vice-président exécutif de la Commission, s’inquiètent les médias allemands. “C’est au contraire le visage présentable de Fratelli d’Italia (le parti de Giorgia Meloni) nuance le politologue Mattia Diletti. Il est tout sauf radical. C’est un notable du sud de l’Italie pour qui le transformisme politique est une seconde nature. Il était issu d’une longue tradition familiale démocrate-chrétienne avant de rallier Silvio Berlusconi puis Giorgia Meloni. Il est connu à Bruxelles pour son pragmatisme, son sérieux, et c’est une personnalité avec laquelle on peut travailler”.

Un avis partagé également à Rome y compris au sein de l’opposition à Giorgia Meloni dont Raffaele Fitto, 55 ans, est l’un des plus proches collaborateurs. Et surtout l’un de ses, rares, ministres compétents alors que la présidente du conseil manque cruellement d’une classe dirigeante sur laquelle s’appuyer. Raffaele Fitto devient en 2000 le plus jeune président de la région des Pouilles. Proche de Silvio Berlusconi, il intègre son gouvernement en 2008, alors que la justice poursuit Fitto notamment dans des affaires de corruption, faux et financement illégal de partis politiques. La prescription des faits sauve sa carrière, qui prend un nouvel essor à la suite de son ralliement à Giorgia Meloni. La dirigeante de Fratelli d’Italia lui confie la délicate mission de mettre en œuvre le plan de relance européen dont l’Italie est le principal pays bénéficiaire. Son départ laisse un grand vide au sein du gouvernement italien. La présidente du conseil ne dispose pas d’une personnalité de son envergure pour le remplacer.

Le choix de Raffaele Fitto s’est pourtant imposé comme une évidence. Giorgia Meloni n’avait aucun autre nom sérieux à soumettre à Ursula von der Leyen. Le futur commissaire italien ne sera pas dépaysé à Bruxelles où il a noué de nombreux contacts. Il siégeait en effet au Parlement européen jusqu’aux dernières élections législatives italiennes de 2022, occupant le poste de coprésident du groupe d’extrême droite ECR dirigé par Giorgia Meloni.

“C’était la meilleure solution qui soit, estime Fulvio Lorefice, analyste politique auprès de FB & Associati. C’est un grand travailleur, bon négociateur, qui connaît parfaitement les arcanes des institutions européennes. Il sera à la fois capable de protéger les intérêts de l’Italie sans entrer en conflit avec la Commission. Sa nomination est une victoire de prestige pour Giorgia Meloni mais reste à savoir ce qu’il pourra effectivement faire. Cela dépendra à la fois du portefeuille que lui octroiera Ursula von der Leyen mais aussi de l’identité du prochain président américain, qui aura des conséquences sur la politique de l’UE.”




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