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L’IA, un remède inattendu contre la pénurie de codeurs, par Robin Rivaton


Les 27 millions de développeurs que compte la planète sont les enfants chéris de la digitalisation. Alors que les besoins pour coder les logiciels de demain et entretenir ceux d’hier explosent, la sphère éducative ne suit pas. Et ce, malgré une progression de 42 % du nombre de formations dans le domaine en dix ans, selon Evans Data Corporation. Cette industrie vit heureusement une révolution : l’arrivée d’assistants à la programmation appuyés sur l’intelligence artificielle.

GitHub, le plus grand hébergeur de code source au monde, créé en 2008 et racheté dix ans plus tard par Microsoft pour 7,5 milliards de dollars, est l’outil essentiel des développeurs. On estime que 93 % d’entre eux l’utiliseraient. En juin 2022, cinq mois avant le lancement de ChatGPT, GitHub a annoncé le lancement de son assistant Copilot, basé sur Codex, un modèle d’OpenAI spécialisé dans la génération de code. Il compte aujourd’hui 1,5 million d’utilisateurs payants et générerait autour de 300 millions de dollars de revenus. L’outil a écrit près de la moitié – 46 % pour être exact – du code de ces utilisateurs et il a augmenté leur productivité de 55 %.

Un tiers de temps de travail gagné

Il ne s’agit pas seulement de chiffres brandis à des fins publicitaires. Une étude scientifique a cherché à évaluer les gains d’efficacité liés à l’utilisation de Copilot, en identifiant 15 tâches de développement logiciel. Les résultats indiquent des réductions de temps de travail significatives dans les missions des développeurs. Jusqu’à 50 % dans la documentation du code et la saisie semi-automatique. Entre 30 et 40 % dans les opérations de codage répétitives, la génération de tests unitaires, le débogage et la programmation en binôme. Au global, les auteurs prévoient une réduction de 33 à 36 % du temps nécessaire aux activités de codage.

Microsoft n’est pas le seul dans cette arène. Le DG d’Amazon, Andy Jassy, a révélé que leur assistant de développement informatique, Amazon Q, a permis à l’entreprise d’économiser 4 500 années de travail de développement. Soit un gain annualisé estimé à 260 millions de dollars. L’éditeur de code Cursor, qui intègre l’un des modèles de langage de l’entreprise américaine Anthropic, a reçu, lui, l’éloge appuyé d’un des cofondateurs d’OpenAI, Andrej Karpathy, sur le réseau social X : “La plupart de ma programmation consiste désormais à écrire en anglais, à demander puis à réviser et éditer les différences générées, et à faire un peu de demi-codage.”

Une dizaine de start-up planchent actuellement sur des assistants de développement informatique. Et la réussite économique de Copilot attise l’appétit des investisseurs pour ces entreprises. Au mois d’août, Anysphere, la start-up qui a développé Cursor, a levé plus de 60 millions de dollars auprès du fonds californien Andreessen Horowitz. Elle avait déjà levé 11 millions de dollars l’année dernière auprès du fonds de capital-risque d’OpenAI et de l’ancien DG de GitHub, Nat Friedman.

Des levées de fonds massives

Parmi les concurrents notables dans le domaine, on trouve Augment, Replit, Cognition, Poolside, Supermaven et Magic. Ce dernier, qui n’emploie qu’une vingtaine de personnes, serait en discussion pour lever 200 millions de dollars, quand Poolside en rechercherait 450 millions. En avril, Augment a levé 252 millions de dollars, tandis que Cognition, dont l’outil s’appelle Devin, en a obtenu 175 millions. Le secteur sera sans doute un marché à gagnants multiples, sans effet de captation par un leader unique. Les stratégies de développement diffèrent. Certains, comme Magic, Poolside, Augment et Supermaven, préentraînent leurs propres grands modèles d’IA en mettant, entre autres, l’accent sur le contexte et la latence. D’autres, comme Cursor, sont indépendants du modèle et se concentrent sur l’expérience du développeur, l’interface et les flux de travail.

Ces innovations à venir sont une excellente nouvelle. A l’aune de la pénurie actuelle, les développeurs ne risquent pas d’être remplacés. Nos enfants peuvent embrasser le métier sans s’inquiéter de leur employabilité, même si l’écart de productivité entre un très bon développeur et un moyen pourrait s’accentuer. L’autre bonne nouvelle ? Le stock croissant de code écrit dans des langages anciens comme le Cobol, qui se périme alors qu’il fait tourner des systèmes essentiels de nos sociétés – des hôpitaux aux banques -, va pouvoir être mis à jour bien plus facilement. On respire.

Robin Rivaton est directeur général de Stonal et membre du conseil scientifique de la Fondation pour l’innovation politique (Fondapol)




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