Sciences Po Paris, prestigieuse “école des élites” vivement secouée au printemps par des polémiques liées aux mobilisations d’étudiants propalestiniens, annonce en cette rentrée des mesures pour éviter une réplique, en plein processus de nomination d’un nouveau directeur.
“L’année a été compliquée avec le départ du directeur Mathias Vicherat et les conséquences du conflit israélo-palestinien”, a admis ce mercredi 4 septembre Jean Bassères, administrateur provisoire de l’école depuis fin mars, lors de la conférence de presse de rentrée de l’école.
L’établissement est sans directeur depuis la démission en mars de Mathias Vicherat, renvoyé devant la justice dans un dossier de violences conjugales, et dans la tourmente en raison de polémiques liées aux mobilisations d’étudiants propalestiniens. Enièmes problèmes pour une école qui cumule déboires et scandales autour de ses dirigeants depuis une dizaine d’années.
L’occupation le 12 mars d’un amphithéâtre par des étudiants, qui avait donné lieu à des accusations d’antisémitisme, avait attisé les controverses et ému jusqu’au sommet de l’Etat, avec la venue du Premier ministre Gabriel Attal, ex-étudiant de l’établissement. Plusieurs mobilisations d’étudiants propalestiniens, en écho à des mobilisations dans des universités américaines, suivies d’interventions de la police, s’étaient ensuite déroulées au printemps, enflammant le débat politique.
La direction avait décidé fin mai de renvoyer huit étudiants devant la section disciplinaire, après l’occupation de cet amphithéâtre. Jean Bassères a précisé mercredi que “25 autres étudiants des campus de Paris, Reims et Menton ont également été renvoyés devant cette même section après avoir bloqué la tenue des examens”.
Afin de “mieux former” ses étudiants sur le conflit israélo-palestinien, Sciences Po a présenté plusieurs mesures. Dès septembre, “un cours sur la liberté d’expression va être donné aux élèves de première et deuxième années”, a dit Jean Bassères. Objectif ? “Replacer la culture et l’éthique du débat au sein de notre institution. Ça passe par indiquer aux étudiants les règles en France de la liberté d’expression, et au-delà, on va avoir un enseignement avec douze cours magistraux qui vont être donnés sur le conflit au Moyen-Orient, au Proche-Orient, ses origines historiques et ses différentes configurations”, a détaillé l’administrateur provisoire Par ailleurs, “nous allons renforcer nos dispositifs de lutte contre les discriminations, l’antisémitisme et le racisme vis-à-vis desquels on a bien évidemment une tolérance zéro, avec un module obligatoire pour sensibiliser les étudiants à ces questions”, a-t-il ajouté, évoquant également “des expérimentations pour régler de manière amiable les conflits”.
Au moins six candidats
L’objectif est “qu’on apprenne à nouveau à mieux dialoguer, débattre” : “Une mission est en cours” et un rapport attendu en octobre, selon Jean Bassères. L’autre sujet brûlant concerne la nomination d’un nouveau directeur, attendue le 20 septembre. Interrogé sur le processus en cours, Jean Bassères a assuré n’avoir “aucune information”. Selon un décompte de l’AFP, au moins six candidats ont été retenus pour être auditionnés en cette fin de semaine, jeudi et vendredi.
Sont en lice l’ex-directeur de l’Institut d’études politiques de Lille (Sciences Po Lille), Pierre Mathiot ; l’ancienne secrétaire d’Etat Juliette Méadel ; le directeur de Sciences Po Aix, Rostane Mehdi ; Arancha Gonzalez, doyenne de l’Ecole des affaires internationales de Paris à Sciences Po et ancienne ministre espagnole des Affaires étrangères ; Luis Vassy, directeur de cabinet du ministre des Affaires étrangères Stéphane Séjourné et ancien camarade de promotion d’Emmanuel Macron à l’ENA ; l’historien et anthropologue François-Xavier Petit, ancien conseiller ministériel de Michel Sapin et François Rebsamen.
L’école devrait communiquer vendredi les noms des candidats retenus dans une “short list” à l’issue de ces auditions. Ces derniers devront être départagés par les conseils de gouvernance de l’institution : le conseil de l’Institut d’études politiques (IEP), qui se réunira le 19 septembre, et le conseil d’administration de la Fondation nationale des sciences politiques (FNSP, qui chapeaute l’école) lors d’une réunion le 20. En cas d’accord, les deux conseils transmettront leur proposition au ministre de l’Enseignement supérieur, qui doit la valider. La désignation du nouveau dirigeant devra ensuite être officialisée par un décret du président de la République. Un calendrier arrêté toutefois avant l’été, avant la dissolution et la démission du gouvernement de Gabriel Attal.
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