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Le RN fixe son cap pour l’année à venir : “Laissons à Jean-Luc Mélenchon les outrances…”


Une fois n’est pas coutume. Ce samedi matin, au sous-sol de l’Assemblée nationale, Jordan Bardella se fait attendre. Le président du Rassemblement national, qui fêtait la veille ses 29 ans, rejoint, avec quelques minutes de retard, Marine Le Pen qui fait face à plus d’une centaine d’élus. Cette année, le parti d’extrême droite fait sa rentrée en plein cœur du Palais Bourbon. “Il y a 26 mois, nous étions six”, se félicite, en guise d’introduction, la députée du Pas-de-Calais, couvant du regard la trentaine de parlementaires européens et les quelque 120 députés nationaux.

Au programme, pas d’inventaire public sur les dysfonctionnements identifiés pendant la campagne des élections législatives, ou des candidats épinglés pour des propos racistes, complotistes ou antisémites. Un bilan de ces dernières semaines a bien été réalisé, mais au RN, les affaires de parti se gèrent en privé. Le sort de plusieurs candidats “défaillants” sera remis entre les mains de la commission des conflits, comme ceux de plusieurs délégués départementaux remplacés en toute discrétion. D’autres ont eu droit à des promotions internes, comme les députés Julien Odoul et Thomas Ménagé, nommés directeurs de campagne des prochaines élections législatives (qui, selon Marine Le Pen, interviendront dans moins d’un an), l’ancien maire de Beaucaire, Julien Sanchez, promu directeur de campagne des élections municipales, ou le député de Moselle Alexandre Loubet, désormais conseiller spécial auprès de Jordan Bardella.

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Les législatives, crash-test pour le parti

Aux nouveaux venus, on rappelle les règles en vigueur dans les rangs lepénistes. “Laissons à Jean-Luc Mélenchon les hurlements et les outrances […], nous devons montrer le visage de la raison et de la compétence”, répète Jordan Bardella. “On vous a parlé de nos attentes lors de la dernière réunion, a poursuivi Marine Le Pen. Le sérieux, la rigueur, l’humilité, l’exemplarité, la camaraderie, la cohésion et le travail. Convaincre, se former, développer ses réseaux. Tout cela c’est du savoir-faire, et du faire savoir.” Plus que jamais, la patronne du groupe entend faire de l’Assemblée nationale la vitrine du parti alors qu’elle envisage les prochains mois comme une année de campagne.

Elle l’assure en privé, les élections législatives ont fait office de “crash-test” permettant de relever plusieurs défaillances, en partie dues, selon elle, au fait que le parti et ses fédérations aient été délaissés pendant les deux années où la focale s’est concentrée sur le groupe à l’Assemblée. “Un parti, c’est une structure humaine qu’il faut solliciter en permanence, faire des réglages permanents”, a-t-elle assuré à ses proches. Mention passable, donc, et copie à revoir pour les mois à venir.

Plus de droit à l’erreur

Reste désormais à perfectionner ses troupes. Car les dernières semaines ont aussi laissé apparaître des failles, y compris parmi ses lieutenants les mieux capés. Pendant la campagne législative, Sébastien Chenu s’était emmêlé les pinceaux concernant le programme frontiste à l’encontre des binationaux. Jean-Philippe Tanguy, encore, a provoqué l’agacement de la cheffe en qualifiant Michel Barnier de “stupide” avant de se dédire. “Il n’y a pas de baronnie dans les circonscriptions, toutes seront étudiées par la Commission nationale d’investiture”, a d’ailleurs prévenu Marine Le Pen. En clair : que personne ne s’attende à un traitement de faveur, tout élu pourrait se retrouver sur la sellette en cas de faux pas.

Comprendre, donc : pas de relâchement, au moment où le parti s’apprête à plancher sur un “plan Matignon 2” qui devrait être terminé au mois de mars, pour enchaîner sur une session de formations des élus en devenir. Edwige Diaz, députée de Gironde, est nommée responsable de cette question. Les plus novices devraient bénéficier des conseils d’un coach pour la prise de parole en public, et des formations théoriques et pratiques portant notamment sur les mesures proposées par le RN devraient être mises en place. Ce samedi, déjà, le programme économique du parti, mis en musique par le député de la Somme Jean-Philippe Tanguy, a été présenté aux élus, fortement incités à aller porter la bonne parole auprès de leur “réseau local”.

Réalignement entre Jordan Bardella et Marine Le Pen

Car c’est aussi un nouvel électorat que le parti frontiste entend bichonner dans les prochains mois. “Le RN a progressé dans le vote de la France qui travaille et dépasse désormais les 30 % chez les retraités”, s’est réjoui Jordan Bardella. L’occasion, pour Marine Le Pen, de tester devant ses troupes sa nouvelle doctrine, mise au point pendant l’été et qui s’appuie sur un nouveau triptyque. “Que sommes-nous ? Un parti central, dont la doctrine nationale est aussi centrale, cette dernière peut s’appuyer sur un triptyque : celui de l’ordre, de la justice et du progrès.”

En clair, le parti d’extrême droite entend camper le parti de l’autorité, de l’ordre régalien, espérant jouer du contraste avec le camp présidentiel et la gauche qui deviendraient les représentants du désordre. Rien de nouveau de ce côté-là, l’élément de langage du “parti de l’ordre” fait déjà partie des meubles au Rassemblement national et est régulièrement distillé par Jordan Bardella. Mais c’est aussi l’occasion pour le binôme dirigeant d’afficher ostensiblement un réalignement. Dans son discours introductif, Marine Le Pen a pioché dans les thématiques chères à son dauphin, comme la question de la “puissance”, ou du “progrès par la science”. Façon aussi de faire taire les quelques voix qui voudraient faire porter le chapeau du score décevant du mois de juillet à Jordan Bardella, qui a toutefois reconnu une “défaite personnelle”.

“Merci à Marine Le Pen pour son indéfectible soutien, et cette relation de confiance si forte”, a répété le président du parti devant ses troupes, tout en les incitant à ne pas croire les “bêtises” colportées par la presse. “On me dit souvent que l’intégralité de ce que je ressens se voit sur mon visage, a abondé Marine Le Pen. Si jamais ça se passait mal avec Jordan, ça se verrait, donc ça se passe vraiment très bien. Et dans notre situation, une relation d’une aussi bonne qualité est un fait politique, pas seulement un fait personnel.” Que les élus en prennent bonne note.





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