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Incursion ukrainienne à Koursk : le Kremlin avait-il connaissance des plans de Kiev ?


Le 6 août dernier, l’Ukraine réussissait l’impossible. Ou tout du moins, ce qui était jusqu’alors qualifié d’impossible pour les troupes de Volodymyr Zelensky : une incursion sur le territoire russe. Soldats, chars et services de renseignement ont défié Moscou sur ses propres terres. Une opération inédite depuis la Seconde Guerre mondiale, laissant les partenaires occidentaux de Kiev bouche bée. Mais le Kremlin a-t-il réellement été pris au dépourvu par cette contre-offensive ? Des documents russes consultés par le quotidien britannique The Guardian révèlent que les soldats de Vladimir Poutine avaient anticipé l’incursion dans la région et la tentative d’occupation de la ville de Sudzha… et s’y étaient même préparés.

Une “possible percée à la frontière”

Face à l’offensive ukrainienne dans la région de Koursk, les Russes n’ont eu d’autre choix que de s’enfuir. Rapidement. Au point de ne pas veiller à détruire des documents confidentiels. Véritable oubli ou action réfléchie ? Une certitude : quelques heures après le départ de l’armée, ces preuves se trouvaient entre les mains des Ukrainiens. Parmi elles : des ordres distribués aux unités du 488e régiment de fusiliers motorisés de la Garde, ainsi que des journaux relayant des évènements ou des préoccupations. Tous, datés de la fin de l’année 2023 à fin juin, soit six semaines avant que l’Ukraine ne lance son incursion. Si le quotidien britannique n’a pas pu vérifier l’authenticité de ces documents, des symboles de la communication officielle de l’armée russe figurent bel et bien dessus.

La “possible percée à la frontière de l’Etat” par des groupes armés ukrainiens. Voici ce qu’évoque un document daté du 4 janvier dernier, ordonnant d’intensifier les entraînements russes pour contrer toute attaque. Plus d’un mois plus tard, le 19 février, les commandants des unités étaient avertis de la stratégie ukrainienne, et plus précisément d'”une poussée rapide dans la région de Sumy vers le territoire russe sur près de 80 kilomètres, afin d’établir un’corridor’de quatre jours”. Et ce, “avant l’arrivée des principales unités de l’armée ukrainienne à bord de véhicules blindés”.

Au fil des jours, le plan de Kiev se précise pour Moscou et les documents à l’attention des soldats russes se multiplient, jusqu’à la mi-juin. À cette date, un avertissement précis est envoyé : l’armée ukrainienne devrait bientôt être “dans la direction de Yunakivka-Sudzha, dans l’objectif de prendre le contrôle de Sudzha”, une ville russe de 5 000 habitants, située à 8 kilomètres de la frontière. Le 7 août, des drones frappaient le territoire. Le lendemain, les forces ukrainiennes s’emparaient de Sudzha, confirmant les informations préalables de l’armée russe.

Des soldats peu entraînés, au moral miné

Mais être au courant d’une opération est une chose, la contrer en est une autre. Et d’après les documents consultés par The Guardian, la Russie n’avait que de minces chances d’en sortir vainqueur. En cause, l’impuissance des soldats russes. En juin, l’armée de Moscou déplorait que les unités sur le front “ne soient remplies qu’à 60-70 % en moyenne, et qu’elles soient principalement composées de réservistes peu entraînés”. Des rangs affaiblis suite au tragique, mais bien trop ordinaire, évènement du 20 janvier. Jour où un conscrit s’est tiré une balle dans l’abdomen. Dans un rapport manuscrit retrouvé par les forces spéciales ukrainiennes, “l’enquête sur l’incident a déterminé que la cause du suicide et de la mort était une dépression nerveuse et psychologique, causée par un état dépressif prolongé dû à son service dans l’armée russe”.

Afin d’éviter de perdre davantage de soldats, une instruction avait été donnée aux commandants des unités : identifier les combattants qui “ne sont pas prêts mentalement à remplir leurs fonctions ou qui ont tendance à avoir un comportement déviant, et organiser leur réaffection et leur transfert vers des établissements médicaux militaires”. Outre cette consigne, un document non daté explique que les combattants doivent suivre 5 à 10 minutes par jour, d’enseignement politique. Une mesure imaginée pour “maintenir et élever l’état moral, psychologique et politique du personnel”. Efficace, ou non, l’armée de Moscou tentait une contre-offensive le 10 septembre dernier pour reconquérir les territoires perdus. En vain.




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