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Placements : les réflexes à adopter avant d’investir dans l’art


La diversification du patrimoine est le credo de tous les gestionnaires de fortune et, parmi les supports de placement recommandés, l’achat d’œuvres d’art est souvent cité. Il est vrai que certaines cessions font rêver. En 1997, un amateur fortuné achète pour 31,9 millions de dollars Les Femmes d’Alger (Version O), de Picasso. Elle réapparaît chez Christie’s en 2015 et atteint le montant astronomique de… 179,3 millions de dollars, soit un gain de 147 millions de dollars en l’espace de dix-huit ans ! On ne peut mieux comme retour sur investissement.

Bien évidemment, ces résultats sont ceux d’artistes mondialement connus déjà très chers à l’achat. Sans viser de telles valorisations, un particulier aux moyens plus modestes peut cependant réaliser de belles acquisitions et espérer les revendre à bon prix, d’autant que la fiscalité sur la revente d’objets d’art est favorable. Vous supportez une taxe de 6,5 % sur le prix de cession, avec une possibilité d’opter pour le régime des plus-values sur biens meubles si ce dernier vous est plus favorable. Le taux d’impôt sur le gain est alors de 36,2 %, mais un abattement de 5 % par année de détention au-delà de la deuxième aboutit à une exonération complète au-delà de vingt-deux ans.

Pour débuter dans l’art, l’improvisation est à fuir. Comptez plusieurs années pour devenir un amateur averti. Comme en Bourse, où l’on investit mieux dans les secteurs que l’on apprécie, il faut se lancer en déterminant vos centres d’intérêt. Evidemment, on aime souvent plusieurs mouvements artistiques, mais, sauf à disposer des moyens financiers d’un Rothschild, vous ne pourrez pas tout posséder. Vous devez donc vous limiter à deux ou trois secteurs.

A moins de vous reposer sur des conseillers en art dont la compétence est souvent sujette à caution ou de faire appel aux services spécialisés proposés par certaines banques haut de gamme à leurs clients fortunés, il est impératif d’acquérir le plus de connaissances possible. Pour cela, il est indispensable de fréquenter les musées, les salles de ventes, les galeries, les grands salons et les brocantes, sans oublier de lire magazines et ouvrages d’art. Pour aller plus loin, vous pouvez vous inscrire comme auditeur libre à l’Ecole du Louvre à Paris ou en faculté d’histoire de l’art.

Pensez aux livres anciens

Avant d’acheter, vous devez également déterminer votre budget annuel de dépenses et votre profil d’investisseur. Selon les gestionnaires de patrimoine, il ne faut pas y consacrer plus de 10 % de son revenu. Avec un petit budget, vous opterez pour des domaines peu spéculatifs, hors des modes actuelles, mais dont le potentiel de hausse est réel à long terme. C’est le cas par exemple des livres anciens ou de la verrerie Art nouveau. Si, en revanche, vos disponibilités sont plus importantes et que vous aimez jouer, l’art contemporain est fait pour vous.

Pour vos premières transactions, ne cherchez pas à obtenir les plus beaux objets ou tableaux. Contentez-vous de pièces classiques, à prix accessible, et adressez-vous exclusivement à des antiquaires et à des brocanteurs qui vous aideront dans vos achats, surtout s’ils décèlent en vous un amateur assidu. N’oubliez pas de leur demander un certificat d’authenticité qui engage leur responsabilité en cas de problème (faux, restaurations trop importantes…). Une fois sûr de votre œil, vous pourrez fréquenter les salles de ventes aux enchères où les marchands sont très présents. Il vous faudra maîtriser les codes de ce milieu et participer aux enchères qui se font par palier de prix, par exemple de 200 euros en 200 euros pour un objet dont la vente commence à 1 000 euros.

Attention toutefois à ne pas vous laisser emporter par l’enthousiasme, ce qui vous conduirait à surpayer l’objet convoité. Sachez aussi que les estimations des maisons de ventes et des experts (une fourchette de prix) sont indicatives. Le prix définitif peut donc être plus élevé. Vous devrez y ajouter les frais de ventes perçus par le commissaire-priseur, de l’ordre de 20 % à 30 %.

Le principal inconvénient des maisons de ventes est que vous devez prendre l’objet en l’état. Soyez vigilant ! Dans la mesure où vous avez pu l’examiner préalablement, aucune réclamation n’est possible après l’acquisition sauf s’il s’agit d’un faux présenté comme authentique. Parallèlement, fréquentez les galeries réputées et les grands salons internationaux (Art Basel pour l’art contemporain, la Brafa de Bruxelles, la Tefaf de Maastricht ou Fine Arts La Biennale Paris pour les antiquités…). Les prix y sont élevés, mais négociables.

Gardez vos acquisitions au moins cinq à dix ans

Au fur et à mesure que votre collection s’étoffe, suivez le marché avec régularité et consultez La Gazette Drouot (par abonnement annuel de 115 euros sur Internet et en version papier), qui affiche les résultats de toutes les ventes. Il s’agit d’un indicateur très utile qui vous permettra de suivre la courbe ascendante ou descendante de vos objets. Vous pourrez alors décider de vous en séparer au meilleur moment. Si vous souhaitez avoir une vision très précise de la cote d’un artiste, abonnez-vous à Artprice. Ce site stocke plus de 30 millions de résultats d’adjudications dans le monde de près de 850 000 artistes et publie de nombreuses analyses et études sur différents mouvements et secteurs du marché. Tous les professionnels l’utilisent et un simple particulier peut faire de même.

N’ayez pas peur de vous tromper. Tous les collectionneurs vous avoueront qu’ils ont parfois fait de très mauvais achats. Ces expériences, bien que désagréables, leur ont permis de devenir, au fil du temps, de fins connaisseurs et d’éviter de nouvelles embûches.

Enfin, indépendamment d’une assurance contre le vol, pensez à la conservation de vos objets, surtout lorsque ceux-ci nécessitent des restaurations : tableaux à rentoiler, commodes avec des manques de marqueterie, dessins humidifiés ou insolés, porcelaines ébréchées, bronzes à la patine défraîchie… Le budget à prévoir n’est pas négligeable, mais ces dépenses sont indispensables pour espérer revendre avec profit sa collection.

Quoi qu’il en soit, ne pensez pas à céder rapidement vos acquisitions. En dehors de l’art contemporain où elle est fréquente, la spéculation est mal vue dans les autres domaines de l’art. Il est donc recommandé de garder ses objets au moins cinq à dix ans avant d’envisager de s’en séparer.

Comment assurer sa collection

Il est souhaitable, mais non obligatoire, d’assurer sa collection. Trois solutions sont envisageables. La moins coûteuse consiste à souscrire un contrat multirisque habitation en valeur déclarée. Vous estimez seul la valeur globale de vos œuvres d’art sans intervention d’expert et de la compagnie d’assurances. En cas de vol, vous ne serez indemnisé qu’à la condition de fournir des preuves de la détention, de l’état et de la valeur des objets volés.

Pour une meilleure protection, il faut opter pour un contrat en valeur agréée. Celle-ci est fixée en concertation avec l’assureur avec l’aide d’experts ou d’un commissaire-priseur. Un inventaire est dressé et votre prime, plus élevée qu’en valeur déclarée. A chaque renouvellement du contrat, vous pouvez rectifier vos garanties en fonction de l’évolution du marché et de votre collection. En cas de vol, la compagnie rembourse sur la base de la valeur figurant sur le contrat et vous ne supportez pas la charge de la preuve. Des contrats de la sorte adaptés à des actifs artistiques d’au moins 150 000 euros sont proposés par de nombreuses compagnies.

Toutefois, le nec plus ultra pour d’importantes collections reste le contrat réservé aux seules œuvres d’art. Du sur-mesure à primes élevées proposé par des compagnies comme Generali, AXA Art, Allianz ou Hiscox.

Un article du dossier spécial “Les meilleurs placements de la rentrée”, publié dans L’Express du 19 septembre.




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