Le Moyen-Orient plonge dans l’inconnu. Israël a tué le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, dans une frappe près de Beyrouth vendredi, a confirmé samedi 28 septembre le Hezbollah. Un échec diplomatique pour les Etats-Unis, selon la presse étrangère, qui s’interroge sur une escalade en cas de réaction iranienne.
Si l’assassinat d’Hassan Nasrallah est “une mesure de justice”, selon le président américain Joe Biden, ce dernier continue toutefois à demander un “cessez-le-feu” au Liban. Les Etats-Unis et plusieurs de leurs alliés avaient déjà présenté une demande de cessez-le-feu temporaire de 21 jours cette semaine, qui avait été rejetée par Israël. A ce premier couac diplomatique s’est ajoutée vendredi une frappe dont les conséquences sont particulièrement craintes. “Les responsables israéliens n’ont pas prévenu leurs homologues américains de la frappe de vendredi, qui étaient déjà mécontents que Netanyahou ait balayé une proposition de cessez-le-feu de 21 jours faite par les Etats-Unis et la France”, relate ainsi le New York Times. “Aujourd’hui, les responsables américains craignent d’être confrontés à une guerre plus large qui pourrait engloutir la région, après près d’un an d’efforts de la part de Joe Biden pour éviter une telle escalade.”
“Pour Washington, il s’agit d’une humiliation diplomatique et d’une démonstration de son incapacité, ou de son refus, de contrôler son allié gênant”, écrit le quotidien britannique The Guardian. “D’une certaine manière, c’est l’aboutissement de près de 12 mois d’une stratégie américaine qui est aujourd’hui en ruine”, poursuit le journal qui note que Netanyahou a systématiquement ignoré Washington depuis le début de la guerre.
“Pour l’heure, à moins que l’Iran ne se montre plus décisif qu’il ne l’a été jusqu’à présent, c’est Netanyahou, le grand survivant, qui est aux commandes.” Un point de vue partagé par NBC News, selon qui la frappe montre à nouveau que c’est “Netanyahou et non Biden qui décide de l’ordre du jour au Moyen-Orient”.
“Le seuil d’une guerre totale a été franchi”
L’avenir de la région est donc particulièrement incertain, pointe la presse étrangère, qui s’interroge sur la réaction qu’aura Téhéran. “La mort d’Hassan Nasrallah est un séisme pour le Moyen-Orient, qui accroît le risque d’un conflit entre Israël et l’Iran qui serait dévastateur pour les civils et provoquerait des secousses bien au-delà de la région”, s’inquiète Tom Fletcher, un ancien ambassadeur du Royaume-Uni au Liban dans le Financial Times.
Firas Maskad, un expert du Liban interrogé par Middle East Eye, estime même que “la nature sans précédent de l’attaque, son ampleur et sa portée, répondent à la question que beaucoup d’entre nous attendaient, à savoir que le seuil d’une guerre totale a été franchi.” Le Guardian se veut plus mesuré. Selon le journal britannique, l’Iran est désormais contraint de faire un choix qu’il “a toujours cherché à éviter et que ses nouveaux dirigeants réformistes, en particulier, n’ont pas voulu faire.” : se contenter d’une condamnation, au risque de perdre en crédibilité, “accepter un cessez-le-feu qui n’entraînerait pas également un cessez-le-feu à Gaza, l’objectif déclaré du Hezbollah”, ou bien “lancer des représailles militaires directes contre Israël”.
“Tous les scénarios sont désormais sur la table”
Dans une déclaration samedi, le guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, a appelé les musulmans à “soutenir le peuple libanais et le fier Hezbollah par tous les moyens dont ils disposent et à les aider à faire face au […] méchant régime [d’Israël]”. Pour L’Orient Le jour, “tous les scénarios sont désormais sur la table” : “Le régime iranien, obsédé par sa survie, peut-il la mettre en péril pour éviter une défaite humiliante au Hezbollah ? Le communiqué du guide suprême Ali Khamenei samedi, affirmant qu’Israël ne pourra pas venir à bout du Hezbollah, peut être interprété de différentes manières. Comme un quasi-abandon, ou comme une façon de gagner du temps avant de préparer la riposte.”
Pour Ali Rizk, analyste politique et de sécurité, interrogé samedi par Al Jazeera, “l’Iran n’optera probablement pas pour une escalade totale”, mais continuera probablement à “combattre par l’intermédiaire de mandataires, y compris des alliés en Irak et au Yémen” plutôt que de s’engager dans une confrontation directe avec Israël.
Le journal iranien pro-régime Iran Daily estime pour sa part que l’assassinat de Nasrallah “ne devrait pas porter un coup fatal au Hezbollah”, même s’il a “laissé un vide au sein de la direction du groupe. […] Alors que le Hezbollah entame le processus de sélection d’un nouveau dirigeant, il sera confronté à une décision cruciale : la voie à suivre. Quel que soit son choix, les conséquences se répercuteront sur le Liban et l’ensemble de la région.”
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