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Déficit public : la Cour des comptes suggère de supprimer 100 000 emplois dans les collectivités


La Cour des comptes, chargée d’identifier des pistes d’économies pour ramener le déficit public dans les clous européens, a dégainé mercredi 2 octobre une mesure choc : rétablir à leur niveau de 2010 les effectifs des collectivités, ce qui équivaudrait à une réduction de 100 000 emplois.

“Les dépenses de personnel, qui représentent un quart des dépenses des collectivités, connaissent une croissance soutenue, majoritairement portée par le ‘bloc communal'”, à savoir les communes et les intercommunalités, observe la Cour dans un rapport, à l’heure où le déficit public de la France devrait dépasser les 6 % du PIB en 2024. “Alors que les effectifs ont beaucoup augmenté jusqu’à récemment, malgré l’absence de nouveaux transferts de compétences, la maîtrise de leur évolution est un enjeu central”, soulignent les magistrats.

Les Sages de la rue Cambon précisent que la “hausse des effectifs (depuis 2011) a concerné principalement les intercommunalités”, qui se sont développées sur cette période, et “n’a pas été compensée par une baisse équivalente dans les communes”. Ils préconisent un “retour progressif des effectifs des collectivités”, qui emploient environ 2 millions de personnes, “à leur niveau du début des années 2010”, soit une “réduction de 100 000 emplois”, ce qui permettrait d’économiser 4,1 milliards d’euros par an dès 2030.

Cette proposition potentiellement explosive, dont les associations d’élus locaux contestent les motivations, fait écho à celle d’Emmanuel Macron qui envisageait en 2017 de supprimer 120 000 postes dans la fonction publique. “Le personnel territorial ne peut être réduit à une question comptable”, a estimé le président de l’Association des maires de France (AMF) David Lisnard dans sa réponse écrite, rappelant que les intercommunalités “se voient confier des compétences qui ne sont pas toujours préalablement exercées par les communes”.

Les magistrats de la Cour des comptes défendent un “schéma de mutualisation” entre les différents niveaux de collectivités locales qui “doivent permettre de faire mieux fonctionner les services publics”. Dans ses perspectives pour 2024, la Cour évalue à + 5,4 % la hausse des dépenses de fonctionnement des collectivités sur les huit premiers mois de l’année. Outre le personnel, elles sont tirées par des achats de biens et services dopés par l’inflation, ainsi que par des dépenses sociales liées à l’augmentation de la précarité. Les dépenses d’investissement accélèrent elles aussi du fait du “cycle électoral municipal”, qui voit logiquement aboutir les projets votés en début de mandat.

“Dérapage”

Les collectivités ne sont pourtant pas toutes en bonne santé, reconnaît le rapport. Comme en 2023, communes et intercommunalités tirent leur épingle du jeu, mais c’est moins le cas des régions, et encore moins des départements, largement plombés par la chute des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) prélevés sur les transactions immobilières.

Côté recettes, celles de TVA, qui remplacent la taxe d’habitation sur les résidences principales, ne seront pas si bonnes qu’espéré, si bien que la trajectoire financière des collectivités “dérape de plus en plus” par rapport à ce que prévoyait la loi de programmation des finances publiques 2023-2027, prévient la Cour.

Des propositions “brutales”

Alors que le Premier ministre Michel Barnier souhaite ramener le déficit public sous les 3 % du PIB d’ici 2029, la Cour imagine des pistes de “participation” des collectivités, rappelant que ces dernières représentaient 17,8 % des dépenses publiques en 2023. Le rapport préconise de “massifier et mutualiser les achats” entre collectivités, potentielle source de 5 milliards d’euros d’économies par an, et de recentrer leurs investissements sur la transition écologique.

Plutôt que d’encadrer les dépenses, ce à quoi s’opposent fermement les collectivités au nom du principe constitutionnel de libre administration, les magistrats tablent sur un “ralentissement de l’évolution des recettes”. Ce qui pourrait passer par la fin de “l’indexation sur l’inflation des valeurs locatives cadastrales des taxes foncières” ou “l’écrêtement d’une partie de la dynamique de TVA”, première recette des collectivités. “Nous ne pouvons souscrire à une proposition consistant à induire […] un effet de ciseau dans le budget des collectivités”, a répondu la présidente de France urbaine Johanna Rolland. L’AMF a elle dénoncé la “brutalité de ces propositions”, qui conduiraient selon elle “à un affaiblissement inédit de la capacité d’agir du bloc communal”.




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