Annoncée comme “temporaire” par le gouvernement, la contribution des plus aisés le sera-t-elle vraiment ? Les députés ont profité de leur première journée d’examen du budget 2025, mercredi 16 octobre, pour remanier en commission la copie du gouvernement, en étendant la contribution des foyers à hauts revenus, l’une des mesures-phares de ce texte avec lequel le gouvernement Barnier joue déjà son avenir.
Censée aider au rééquilibrage des finances publiques en rapportant 2 milliards d’euros en 2025, la disposition contenue dans le projet de loi finances 2025 (PLF) revient à mettre en place un taux minimal d’imposition de 20 %, et ce pendant trois ans. Mais la commission a fait retirer toute limite de temps. Tous les votes en commission devront toutefois être renouvelés dans l’hémicycle, où les députés repartiront de la version initiale du projet de loi.
Dans le détail, le gouvernement propose que les ménages les plus aisés, dont le revenu fiscal dépasse 250 000 euros pour les célibataires, veufs, divorcés, et 500 000 euros pour les couples, payent davantage que la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus déjà en place. 62 500 foyers entraient théoriquement dans le champ, mais une étude préalable publiée sur le site du ministère du Budget estime que 24 300 foyers en seraient effectivement redevables.
Mais des députés d’opposition, le rapporteur général du budget Charles de Courson (groupe Liot) en tête, ont accueilli avec circonspection l’article, et son dispositif jugé trop complexe. A l’initiative de Charles de Courson, ils ont adopté une réécriture destinée selon lui à limiter les recours de contribuables à des avantages fiscaux ou des crédits d’impôts, dans le but de réduire la facture. “Il y a moins de possibilités d’optimisation fiscale dans mon amendement que dans le texte gouvernemental”, a-t-il résumé, sans convaincre à ce stade les membres de la coalition gouvernementale, inquiets des effets de bords de sa réécriture. “Ce ne serait pas sérieux de se prononcer à l’aveugle”, a estimé Eric Woerth (Ensemble pour la République, ex-groupe Renaissance).
Hausse de la “flat tax”
La mesure vise à abonder les économies substantielles que le gouvernement espère faire : 60 milliards d’euros dont 20 milliards de nouvelles recettes. La difficile équation sera à l’agenda de la commission jusqu’à samedi, avant les débats dans l’hémicycle lundi.
Après une longue discussion mercredi, les députés ont aussi choisi de faire passer le taux du Prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30 à 33 %, pour “rééquilibrer la participation du revenu du capital par rapport aux revenus du travail qui contribuent plus au budget de l’Etat”, selon l’auteur de l’amendement Jean-Paul Mattei (MoDem). Surnommé “flat tax”, le PFU a été instauré en 2018 après la suppression de l’ISF, avec l’objectif de pousser les contribuables les plus aisés à investir dans l’économie. Et dans la foulée les députés ont ressuscité et approuvé l’idée d’une taxe sur les superdividendes.
Retour à zéro dans l’hémicycle
Les députés ont aussi adopté plusieurs amendements sur l’immobilier, dont un du groupe PS pour essayer d’empêcher l’évitement d’une taxe sur les plus-values. Un autre, de Jean-Paul Mattei, prévoit en 2026 et 2027 une refonte de la taxation des plus-values immobilières, avec des suppressions de critères de durée de détention d’un bien pour bénéficier d’abattements, afin de ne plus inciter des personnes à le garder longtemps hors du marché dans le but d’échapper à une taxe. Plusieurs mesures de lutte contre l’évasion fiscale ont aussi été adoptées en commission, mais elles devront là encore être votées dans l’hémicycle, puis survivre à la navette avec le Sénat et au probable 49.3.
Les débats sont teintés de méfiance sur les causes du dérapage du déficit qui pourrait atteindre 6,1 % du PIB. La commission des Finances de l’Assemblée a officiellement demandé mercredi à obtenir les pouvoirs d’une commission d’enquête pour se pencher sur ce sujet, quand son homologue du Sénat a relancé une mission d’information sur la dégradation des comptes publics. La commission reprendra ses travaux ce jeudi matin, avec à l’horizon un débat houleux sur des hausses des tarifs d’électricité, combattues y compris chez les soutiens du gouvernement.
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