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Trois ans après l’invasion de Vladimir Poutine en Ukraine, la démocratie version “Zelensky” mise à l’épreuve


En temps de guerre, est-il plus simple de diriger une dictature ou une démocratie ? Volodymyr Zelensky a certainement son idée sur la question. Après quasiment trois ans d’une guerre totale, le président ukrainien doit composer avec une opinion publique critique et une opposition qui ne lui fait pas de cadeaux, l’accusant même d’autoritarisme. “A un moment donné, nous ne serons plus différents de la Russie, où tout dépend des caprices d’un seul homme”, avait déclaré, l’an dernier, Vitali Klitschko, le maire de Kiev.

Si les experts s’accordent à dire que l’Ukraine reste très loin d’un pays autoritaire, la guerre a indéniablement poussé à une concentration des pouvoirs autour du président et de son puissant et controversé chef de l’administration, Andriy Yermak. Aucune élection – présidentielle ou législative – n’a pu se tenir depuis le début du conflit, en raison de la loi martiale. En septembre, Volodymyr Zelensky a annoncé un remaniement-surprise, avec neuf nouveaux ministres, un moyen d’insuffler, selon lui, une “nouvelle énergie” à l’exécutif. Une façon, surtout, de resserrer les rangs autour de lui. Le ministre des Affaires étrangères Dmytro Kouleba en a fait les frais. Jugé trop autonome, il a été remplacé par Andrii Sybiha, un ancien diplomate proche du patron de l’administration présidentielle Andriy Yermak, qui chapeaute – officieusement – la politique étrangère du pays.

Garde-fous

Dès l’éviction du populaire général Valeri Zaloujny en février 2024, le président laisse entendre qu’un remaniement est dans les cartons. Il lui aura toutefois fallu plusieurs mois de tractations avant d’y parvenir. “Pour remplacer un ministre, il faut la majorité au Parlement, explique Oleksandr Salizhenko, analyste de l’organisation Chesno. Celle de Volodymyr Zelensky reste fragile.” A la Rada, les nouvelles nominations sont soumises à plusieurs votes, faute d’accord. “Le Parlement a repris sa fonction de contrôle”, conclut le politologue. Signe de ce changement, les plénières ouvertes à la presse ont repris, avec des questions au gouvernement, un format qui n’existait plus depuis février 2022.

Loin d’une chambre d’enregistrement, l’Assemblée demeure un lieu de dialogue, capable d’imposer des garde-fous. “Le Parlement a par exemple pris la responsabilité de parler publiquement des problèmes de la mobilisation et de lui donner un cadre normatif”, poursuit Oleksandr Salizhenko. Pendant des mois, les députés en ont débattu, malgré les critiques du commandement militaire qui désespère de remplir les rangs et de remplacer les soldats épuisés, blessés ou morts. “Dans les démocraties, la prise de décision est beaucoup plus longue, mais je pense que nous avons trouvé un certain équilibre, défend la députée Halyna Yanchenko, engagée dans la lutte contre la corruption. En Ukraine, les autorités ne peuvent rien faire sans un consensus de la société. Le président en a conscience. Il est d’ailleurs très sensible à l’opinion publique.”

La mobilisation, tabou ultime

Pas question d’aller au clash, ce qui explique, selon l’ancien officier ukrainien Evhen Dykyi, le tabou autour de la mobilisation. “Notre gouvernement civil évite ce sujet, qui n’est pas populaire, grince-t-il. Mais c’est bien la prérogative de Zelensky, en tant que commandant suprême, ce qui place l’armée aujourd’hui dans une situation très difficile.” Alors que la Russie progresse dans l’est du pays, les jeunes Ukrainiens ne sont pas assez nombreux à s’engager. Ceux qui le font sont souvent plus âgés et mal formés. “L’armée a besoin de plus de monde, elle aimerait mobiliser des plus jeunes mais le rôle du Parlement est de servir de filtre sur ce qui est acceptable ou non pour la société”, estime Halyna Yanchenko.

De leur côté, les médias et la société civile continuent de former un vrai contre-pouvoir. Les journalistes publient des articles dérangeants – notamment sur la corruption – qui débouchent sur des enquêtes et des condamnations. La semaine dernière, Volodymyr Zelensky a d’ailleurs organisé deux rencontres avec des journalistes et avec des représentants de la société civile pour leur expliquer son “plan de la victoire”, que certains jugent trop dépendant de l’aide étrangère. Le président a promis un “plan interne” sur ce que l’Ukraine devait faire. “En Russie, tout est beaucoup plus simple, car une seule personne prend les décisions, conclut Halyna Yanchenko. Mais ici, la démocratie fait partie de notre ADN. On ne peut pas faire autrement.”




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