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Donald Trump et la justice : pourquoi le président élu n’est pas sorti d’affaire


Ce mercredi 6 novembre, la satisfaction se lit sur le visage du républicain. Donald Trump s’apprête à signer son retour à la Maison Blanche. Une victoire d’autant plus savoureuse qu’en devenant le 47e président des Etats-Unis, le milliardaire espère bien se retrouver à l’abri de poursuites judiciaires pour les quatre prochaines années.

Visé par 88 chefs d’accusation, le président élu aurait dû comparaître quatre fois au tribunal en 2024. Mais en raison d’innombrables recours déposés par ses avocats et d’une immunité partielle accordée par la Cour suprême, seul l’un de ces procès s’est ouvert. Au lendemain de son élection, celui de l’affaire dite Stormy Daniels lui fait encore obstacle.

L’affaire Stormy Daniels

La nouvelle est tombée le 30 mai 2024. Le républicain Donald Trump est reconnu coupable de 34 chefs d’accusation de falsification de documents par la justice de l’Etat de New York. Une première pour un ancien président américain qui encourt jusqu’à quatre ans de prison. En cause : l’orchestration d’un paiement de 130 000 dollars effectué par son ex-avocat Michael D. Cohen, à l’actrice de films pornographiques Stormy Daniels dans les jours précédant l’élection présidentielle de 2016. Si cet accord officieux était bien autorisé et visait à acheter le silence de l’actrice sur une relation extraconjugale remontant à 2006, le maquillage de ce paiement en frais juridiques pour l’entreprise Trump Organization était, lui, illégal.

La peine, qui devait être prononcée le 11 juillet, avait été reportée au 18 septembre, en raison d’une immunité partielle conférée à Donald Trump. Dans une décision de 119 pages rendues par six juges conservateurs cet été, la Cour suprême a établi qu’un ancien président pouvait bénéficier d’une immunité partielle pour des décisions prises dans le cadre de ses fonctions. L’annonce de la peine a finalement été reportée au 26 novembre, pour ne pas influencer l’élection américaine.

Et au vu des résultats de la course à la Maison-Blanche, Donald Trump pourrait bientôt utiliser sa victoire électorale pour la retarder à nouveau. Entre autres, le 47e président des Etats-Unis pourrait faire valoir auprès du juge Juan Merchan que sa condamnation constitue une distraction majeure pendant la transition présidentielle, entravant sa capacité à exercer ses fonctions. Mais une chose est certaine : les poursuites ayant été intentées par les procureurs de l’Etat et non du gouvernement fédéral, le futur président ne pourra pas se gracier. À moins que d’autres ne le fassent à sa place. Selon le New York Times, la politique du ministère de la Justice est qu’un président en exercice ne peut faire l’objet de poursuites pénales ou d’une incarcération. Et bien que les tribunaux new-yorkais ne soient pas contraints d’obéir à cette règle, le quotidien américain estime qu’ils la respecteront.

La manipulation des résultats de l’élection présidentielle de 2020

Plusieurs procès sont également en suspens. Après avoir été entendu par le tribunal fédéral de Washington le 3 août 2023, Donald Trump a été inculpé pour avoir tenté de renverser le résultat de la présidentielle de 2020, remportée par Joe Biden. En cause : le célèbre assaut du Capitole par des partisans du républicain le 6 janvier 2021, motivé par un discours du président sortant. Mais pas seulement. Au total, quatre chefs d’inculpation sont retenus contre lui : complot frauduleux contre les Etats-Unis, complot pour priver les électeurs de leur droit de vote, complot pour faire obstruction à une procédure officielle et tentative d’obstruction à cette procédure. Entre autres, l’ancien président avait commencé à créer des listes fictives de grands électeurs dans certains Etats-clés, afin de les imposer aux assemblées locales, avant transmission au Congrès pour certification. Si la fraude avait abouti, Donald Trump aurait ainsi pu s’imposer à la Maison Blanche, au détriment de Joe Biden.

Le procès, qui devait débuter le 4 mars dernier à Washington, a finalement été reporté lorsque Donald Trump a hérité de son immunité partielle. Depuis, aucune autre date n’a été fixée. Désormais élu, le 47e président des Etats-Unis, qui encourt plusieurs dizaines d’années de prison, devrait prochainement essayer de se gracier, malgré la séparation des pouvoirs.

La tentative de fraude en Géorgie

Mais Donald Trump ne pourra pas se gracier de l’ensemble de ses poursuites. À commencer par celle portant sur sa tentative de fraude en Géorgie. Le 1er janvier 2021, le président sortant téléphone à un haut responsable de l’Etat de Géorgie, lui réclamant de trouver 12 000 bulletins de vote à son nom. Des bulletins indispensables pour remporter cet Etat-clé dans l’élection présidentielle de 2020. Le mois suivant, une enquête est ouverte et le républicain est inculpé en août 2023 en vertu d’une loi géorgienne sur l’extorsion et l’association de malfaiteurs, prévoyant des peines de 5 à 20 ans de prison.

Aujourd’hui, la date d’un éventuel procès est encore incertaine. La procédure judiciaire a subi un coup de frein lorsque la presse a révélé que Fani Willis, la procureure locale, entretenait une relation avec l’un des enquêteurs sur le dossier, Nathan Wade. Une aubaine pour les trumpistes qui se sont empressés de déposer une demande de dessaisissement. Le juge a également dû revoir le dossier après que l’immunité partielle a été accordée à Donald Trump, lui concédant 5 des 13 chefs d’inculpation à son encontre. Résultat : le procès est toujours en suspens, et la victoire du républicain ne devrait pas accélérer la procédure.

Le recel de documents classifiés

Pour couronner le tout, le milliardaire est accusé d’avoir mis la sécurité des Etats-Unis en danger. Une affaire qui remonte au départ du locataire de la Maison-Blanche en janvier 2021. Alors que Donald Trump laisse place au nouveau président des Etats-Unis Joe Biden, celui-ci emporte dans sa résidence floridienne à Mar-a-Lago, des documents classifiés. Le service des Archives nationales s’en rend compte quelques mois plus tard, au printemps 2021, et demande leur restitution. En janvier 2022, le républicain s’exécute et rend 15 cartons contenant 184 documents.

Mais après avoir ouvert une enquête, la police fédérale estime que l’ancien président détient toujours des manuscrits. En juin 2022, un deuxième lot de documents est remis aux Archives nationales, avant que le FBI ne perquisitionne la résidence de Donald Trump le 8 août 2022. Au total : plus de 11 000 documents gouvernementaux, dont 18 classés “top secret” et 103 frappés du sceau de confidentialité sont retrouvés. Pour rappel, une loi de 1978 oblige chaque président américain à transmettre l’ensemble de ses documents de travail aux Archives nationales dès la fin de son mandat.

Pour ce recel de documents classifiés, Donald Trump encourt une peine de prison. Mais le 15 juillet dernier, la juge Aileen Cannon a décidé d’abandonner les poursuites pénales contre le républicain, jugeant que la nomination du procureur spécial Jack Smith était inconstitutionnelle. Une décision à laquelle Jack Smith pourrait prochainement faire appel. À condition que le 47e président des Etats-Unis ne le limoge pas avant. Si l’horizon semble actuellement dégagé pour le vainqueur de l’élection, celui-ci pourrait bien s’assombrir dès la fin de son second mandat.




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