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EXCLUSIF. Boris Johnson : “Donald Trump sera meilleur que vous ne le croyez”


“Je suis un peu inquiet du titre français.” D’emblée, Boris Johnson nous demande si Indomptable (Stock) ne trahit pas le titre anglais de ses Mémoires, Unleashed, autrement dit “déchaîné” – référence à sa personnalité ainsi qu’à son pays, qu’il aurait contribué à faire sortir des carcans de l’Union européenne. En voyant le profil de l’ancien Premier ministre britannique s’afficher dans la petite fenêtre de visioconférence de notre ordinateur, on ne peut s’empêcher de noter, néanmoins, que la référence à sa crinière savamment indomptée pour “choquer le bourgeois”, est bien vue.

Après un long silence, Boris Johnson fait son grand retour. Si, au Royaume-Uni, la presse de gauche l’a étrillée (“les mémoires d’un clown”, pour le Guardian), son autobiographie a largement dépassé les ventes de celles de David Cameron ou de Liz Truss. Loin de l’exercice compassé que représentent parfois les souvenirs d’anciens dirigeants, Boris Johnson enchaîne les scènes et anecdotes savoureuses sur Emmanuel Macron, Joe Biden ou Elizabeth II. Mais le livre donne aussi à voir des aspects plus idéologiques. L’ancien Premier ministre y développe sa philosophie politique, entre libéralisme économique et interventionnisme de l’Etat en matière d’infrastructures. L’homme, qui a longtemps hésité avant de se positionner sur le Brexit pour finir par en devenir le héraut, persiste et signe : “C’était la bonne chose à faire.” Le premier leader occidental à s’être rendu à Kiev après l’invasion russe maintient également que l’Ukraine est la clé dans la bataille que se livrent démocraties et régimes autoritaires.

Dans un entretien exclusif pour L’Express, Boris Johnson évoque la victoire de Donald Trump, l’avenir de l’Occident, le Brexit, Vladimir Poutine, Michel Barnier ou… Jean-Marc Ayrault. Multipliant les expressions en français et les effets d’éloquence, il est fidèle à son image : déchaîné.

L’Express : Vous avez été souvent comparé à Donald Trump. Revendiquez-vous l’analogie ?

Boris Johnson : Je ne doute pas que ces équivalences plaisent aux médias, mais elles sont trompeuses. Par exemple, je suis clairement en désaccord avec les tarifs douaniers que Trump promet. Je trouve cette approche des échanges commerciaux répréhensible et excentrique ; elle ne sera bonne ni pour l’Amérique ni pour le monde. Ensuite, vous ne trouverez pas un responsable politique britannique, et encore moins dans le parti conservateur moderne, qui soutienne ses positions sur le port d’armes à feu, ni sur l’interruption volontaire de grossesse. Ajoutons, enfin, que je n’ai pas du tout apprécié – et je l’ai dit quand j’étais Premier ministre – les événements du Capitole du 6 janvier 2021. Quand on perd une élection, on quitte la scène. Voilà [*], terminé. Tirez le rideau. Il ne l’a pas fait. J’ai trouvé cela très triste et immoral. Je le lui ai dit et l’ai souvent répété. Cependant, il y a des domaines dans lesquels je pense que les médias de gauche passent à côté de ce qu’il peut apporter au monde d’aujourd’hui.

Quels sont ces domaines ?

Le sujet qui domine tout à notre époque, la question cardinale, est de savoir comment nous défendons la démocratie et la liberté dans le monde, que ce soit au Moyen-Orient ou en Ukraine. La guerre en Ukraine est le test ultime pour nous tous – l’Europe, la France, la Grande-Bretagne – au XXIe siècle. Or, à l’heure actuelle, aucun de nous n’en fait suffisamment. C’est affligeant : des soldats nord-coréens s’en prennent aux Ukrainiens ; Poutine envoie des drones contre des civils… C’est du terrorisme contre une démocratie européenne entièrement innocente, et on tergiverse encore pour lui permettre d’utiliser les missiles Scalp ! Dans le cas de la France comme dans le nôtre, nous sommes loin d’en faire assez.

Quant au Etats-Unis, soyons juste avec Joe Biden : il a fait un boulot fantastique en fournissant une énorme quantité d’armement et de soutien financier. Sans les Etats-Unis, l’Ukraine serait maintenant un Etat esclave ! Elle aurait été conquise. Donc mettons cela au crédit de Biden. Mais cela ne suffit pas. Il faut à tout prix éviter que la pression ne s’intensifie sur les Ukrainiens pour qu’ils cèdent du territoire en échange d’une prétendue “paix”. Que se passera-t-il ? Un cessez-le-feu, et Poutine qui envahit l’essentiel de ce qu’il a déjà pris. Et on dira aux Ukrainiens : “Désolé, mais pour préserver votre pays, il vous faut accepter ça.” Sans aucune garantie de sécurité à long terme.

La raison pour laquelle je suis sympathisant – et je choisis soigneusement mes mots – avec l’idée de la politique étrangère de Donald Trump est la suivante : quand j’étais Premier ministre, j’ai vu qu’il pouvait se montrer très ferme sur certains de ces grands dossiers. Sur l’Ukraine, je pense que ses positions seront spectaculairement différentes de ce que tout le monde dit.

Pendant la campagne, pourtant, ses déclarations étaient tout sauf rassurantes pour les Ukrainiens. Mettre fin à la guerre “en moins de vingt-quatre heures” comme il l’a promis, c’est obliger l’Ukraine à signer la fausse paix dont vous parliez…

Oui, c’est juste, mais il faut écouter ce qu’il dit vraiment. J’en ai beaucoup parlé avec lui. De son point de vue, la cause ukrainienne pâtit de ses soutiens : ses défenseurs les plus enthousiastes sont Hillary Clinton et Justin Trudeau… Les lavettes libérales ! C’est ce qui rend fous les Tucker Carlson [NDLR : ancien présentateur de Fox News, aux positions prorusses] et compagnie. Et c’est désastreux pour l’Ukraine. Mais voici mon avis : Trump, avec tout son ego, toutes ses… vulnérabilités, avec tout son orgueil, sa fierté de l’Amérique, sa détermination à rendre sa grandeur à l’Amérique, va-t-il laisser la Russie humilier son pays ? Va-t-il inaugurer son mandat en laissant Poutine rendre sa grandeur à l’Empire soviétique ? Je ne pense pas. Par ailleurs, j’ai des indices qui me font me penser que Trump sera meilleur que vous ne le croyez, et peut-être meilleur, même, que les démocrates.

Quels sont ces indices ?

En 2019, il a donné des [lance-missiles] Javelin – soit l’arme fatale – à l’Ukraine. Et puis il s’est montré plus ferme que les démocrates quand il s’est agi d’expulser des espions russes. Sur d’autres dossiers, aussi, il a été plus ferme, de manière tangible, démontrable, qu’Obama et que Biden : il a pulvérisé les bases de Bachar el-Assad ; il a mis fin aux armes chimiques. Sur l’Iran, cause de tant de malheur et de tumulte – et qui est responsable des massacres du 7 octobre, ou du moins qui en a été l’instigateur – Trump a été très solide. Il a vaporisé Qassem Soleimani, le chef du corps des Gardiens de la révolution. Je crois que le monde d’aujourd’hui a besoin d’une Amérique forte. Et il y a une chance – je le dis en termes prudents – que, comme nous l’avons vu par le passé, Trump adopte une approche forte et stable de problèmes parmi les plus ardus que nous traversons. Qu’il se révèle considérablement plus ferme que les démocrates.

Un “Breturn” n’arrivera jamais.

A quoi est due principalement, selon vous, sa victoire ?

Trump a gagné parce que les gens se sont souvenus que l’économie semblait aller mieux et que le monde semblait plus stable lorsqu’il était au pouvoir. Il a gagné parce que des dizaines de millions d’Américains n’ont pas apprécié la manière antidémocratique dont la gauche progressiste a tenté d’utiliser des moyens juridiques pour l’écarter du scrutin. Il a gagné parce que des dizaines de millions d’Américains ont refusé d’être qualifiés d’ordures. Il a gagné parce que des dizaines de millions d’Américains ont estimé qu’il était ridicule de le qualifier de “fasciste” – et que c’était une insulte à la mémoire de ceux qui ont réellement souffert du fascisme. Il a gagné parce que Kamala Harris n’a pas réussi à se distinguer de Joe Biden. Il a gagné parce que la plupart des Américains sont profondément patriotes et ne sont pas particulièrement “woke”.

Les sondages au Royaume-Uni indiquent qu’environ 60 % des Britanniques considèrent aujourd’hui le Brexit comme “plutôt un échec”. Comment l’expliquez-vous ?

Pour moi, le Brexit était absolument la chose à faire. J’adore le Brexit. Vive le Brexit ! Ce n’était pas bon pour nous de rester dans l’Union européenne, même si j’aime beaucoup l’UE…

Heu, vous qualifiez l’UE de “rêve freudien d’accomplissement du désir, une tentative permanente de redécouvrir l’enfance perdue de notre continent”…

Mais si, j’aime bien l’idéalisme qu’il y a dans l’Union européenne ! J’apprécie l’idéal. C’est une vision noble. Le problème, c’est que c’est antidémocratique. A mon sens, dans une économie mondialisée, les électeurs doivent savoir qui sont ceux qui les dirigent, et doivent être en mesure de les jeter dehors. C’est très, très important. Par ailleurs, les pays ont besoin de souplesse pour faire les choses à leur façon – notamment, pour rédiger de nouvelles lois au besoin. La catastrophe du Covid, pendant laquelle j’ai été Premier ministre, nous a fourni l’occasion, de manière soudaine et inattendue, de faire les choses un peu différemment quant aux vaccins, car nous étions déjà sortis de l’UE. Les Vingt-Sept – tenus qu’ils étaient par leur adhésion à l’Agence européenne des médicaments – ont dû attendre et attendre encore. Ils ont attendu des semaines avant de donner le feu vert à Pfizer, AstraZeneca, Moderna et les autres… Pendant ce temps-là, nous vaccinions. En mars 2021 nous avions déjà vacciné 45 % de la population du Royaume-Uni, et presque 100 % des plus de 80 ans, alors que dans l’UE, ils en étaient à 10 %. Quels qu’aient été les errements du gouvernement britannique pendant cette période par ailleurs – et je plaide coupable de tout – c’est nous qui avons déployé le programme de vaccination le plus rapide. Et ça, c’est en partie grâce au Brexit.

Mais pourquoi les Britanniques sont-ils maintenant en majorité opposés au Brexit dans les sondages ?

A vrai dire les sondages disaient déjà ça avant le Brexit [Rires]. Je ne pense pas que ça reflète l’avis général. Le Brexit est un processus, et il doit continuer. Je viens de vous donner un exemple sur les vaccins. Sans aucun doute possible, ça a sauvé des vies en 2021. C’était la chose à faire. Sur l’Ukraine, aussi – et vous entendez que cela me tient énormément à cœur –, le Royaume-Uni n’aurait pas eu l’indépendance qu’il a eue en 2022 si nous étions tenus par la PESC [NDLR : la Politique étrangère et de sécurité commune]… Au sein de ce programme, le dossier de l’Ukraine relevait du “format Normandie”, c’est-à-dire : la France et l’Allemagne. Or j’ai bien vu ce qu’il en était quand j’étais aux Affaires étrangères [de juillet 2016 à juillet 2018]. Mes interlocuteurs d’alors étaient Jean-Marc Ayrault et Frank-Walter Steinmeier pour l’Allemagne. Eh bien, ils ne me laissaient tout simplement pas participer aux discussions. Je vous assure : je suis allé à Kiev avec eux, ils étaient très copains. Tous les deux, vous savez… austères, de gauche, les cheveux blancs. Mais ils se méprenaient complètement – com-plè-te-ment – sur la menace posée par Poutine. Et ils refusaient catégoriquement de m’inclure dans les discussions. Véridique ! On se serait cru dans un Laurel et Hardy, avec moi qui leur courais après, et eux qui essayaient de me fuir.

Pourquoi vous fuyaient-ils ?

Parce que l’Ukraine était le pré carré de la France et de l’Allemagne. C’était le “format Normandie”, et tout le monde s’inclinait. Tout le monde les écoutait. Du bullshit, oui ! Du bullshit ! Vraiment. Une honte. Je me félicite que nous soyons sortis de ce système. Et que nous ayons pu avoir une approche complètement indépendante. Si vous parlez aujourd’hui avec certains pays d’Europe de l’Est ou de la Baltique, ils vous diront que cela a été très précieux de voir le Royaume-Uni taper soudain du poing sur la table. Ce qui, à mon avis, ne serait pas arrivé si nous étions restés.

Autre exemple – un exemple cher au cœur du palais de l’Elysée : l’accord Aukus [NDLR : le pacte de sécurité rassemblant les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l’Australie, qui a nécessité que cette dernière rompe sans préavis son contrat d’achat de 12 sous-marins avec la France]. Il est absolument certain que le Foreign Office ne m’aurait jamais autorisé à négocier cet accord si nous étions restés dans l’Union européenne. Ils auraient dit : “Non, non, non, nos bonnes relations avec Paris sont tellement précieuses, Emmanuel va en faire une jaunisse, ils vont jeter ce jouet dans la poussette, ce sera une catastrophe pour les relations anglo-françaises, vous ne pouvez pas faire ça.” Et pourtant, l’Aukus est formidable : il fallait le faire pour renforcer l’Occident, pour fortifier notre capacité collective à influencer le Pacifique. Et je suis sûr que la France finira par s’y associer d’une façon ou d’une autre. Parce que la France aussi est une grande puissance dans le Pacifique.

Que pensez-vous de l’hypothèse d’un “Breturn” ?

Je vous le dis : ça n’arrivera jamais. Même les sondages finiront par s’inverser. Parce qu’au moment de se décider, quiconque souhaitera le retour du Royaume-Uni dans l’UE devra convaincre les Britanniques de débourser en tout plus de 20 milliards de livres sterling par an pour avoir le privilège de renoncer au droit de contrôler nos frontières, de contrôler nos lois. Avec tous les inconvénients que je viens de citer, nous perdons toutes les libertés que je juge indispensables dans une économie mondialisée. Mais en plus, selon les règles de l’UE, nous serons obligés, si vous voulez “brenverser” le Brexit, de renoncer à la livre sterling et de passer à l’euro. Donc, c’est un débat abstrait. Ça n’arrivera jamais. Ce qu’il faut faire, avec le Brexit, c’est le gérer correctement. Et ne pas arrêter. Nous devrions être en train de négocier un accord de libre-échange avec les Etats-Unis. Voilà ce que nous devrions faire !

Avec Emmanuel, j’étais comme une sorte de prétendant éconduit.

En 2023, Suella Braverman, alors ministre de l’Intérieur, a déclaré que le multiculturalisme avait échoué. Et c’était avant le 7 octobre et le déchaînement d’antisémitisme et de haines identitaires. Etes-vous d’accord avec elle ?

Je ne suis pas sûr de comprendre ce que Suella a voulu dire. Dans l’ensemble, je pense que les relations raciales sont fantastiquement bonnes en Grande-Bretagne. Cela étant dit, oui, je vois d’un mauvais œil ce qui se passe depuis le 7 octobre. Moi, maire de Londres, jamais on n’aurait vu des choses comme les manifestations qui se sont déroulées dans nos rues au cours de l’année passée. C’est vraiment terrible. Injustifiable. Les Etats-Unis, la France, le Royaume-Uni et d’autres doivent faire face ensemble au défi que nous lancent les régimes antidémocrates, autocrates, quasi-fasciste, intolérants et racistes, qu’il s’agisse de la Russie, du Hamas, etc. Ces gens qui défilent dans nos rues en agitant des bannières pro-Hamas, ils ont perdu la tête ! Enfin quoi, qui soutenez-vous ? Qui soutenez-vous ?

Donc, pour résumer : je ne pense pas que le multiculturalisme soit un échec ; la Grande-Bretagne est une société magnifiquement forte et saine, et nous tirons un grand bénéfice de l’intégration qui s’y est déroulée, j’en suis fier, c’est une vraie réussite, mais sur certaines questions, les choses tournent très mal. Celle-là, en particulier.

Dans votre livre vous n’êtes pas toujours tendre ni avec Emmanuel Macron ni avec Michel Barnier, que vous avez bien connu quand il était négociateur en chef du Brexit pour l’UE…

Michel Barnier est un grand ami de mon père, et je lui souhaite toute la réussite possible ! Je m’entendais bien avec lui quand il était commissaire aux Finances à Bruxelles, et il était bon. Enfin, très profrançais… mais excellent ! Quant à Emmanuel, je crois que j’étais simplement… comme une sorte de prétendant éconduit. Je faisais tout pour le séduire. Et j’avais l’impression de me faire rembarrer à chaque fois. Ce n’est pas faute d’avoir essayé… Si vous lisez le livre, vous verrez que je cherchais sans cesse de nouveaux moyens de faire naître une amitié, la grande entente cordiale. Et on me répondait que nous étions encore dans le frigo. [Rires.] Que vouliez-vous que je fasse ? Sérieusement, avec Emmanuel, nous avons eu des hauts et des bas. C’est ainsi. Comme entre l’Amérique et la France, entre le Royaume-Uni et la France. Parfois, dans ces relations, l’amitié entre les nations transcende la politique de leurs représentants individuels. Et donc, en fin de compte, la France et le Royaume-Uni auront toujours bien plus de points communs.

Les démocraties libérales l’emporteront, car c’est nous qui avons les bonnes idées.

Dans votre livre, vous développez ce qui sous-tend, dites-vous, votre philosophie politique : le “levelling up”. Pouvez-vous en dire plus aux lecteurs français ?

La France a la grande chance d’avoir Lyon, Marseille, Bordeaux, etc., c’est-à-dire un grand nombre de villes secondaires qui sont très productives, qui accueillent de grandes entreprises technologiques, de bonnes universités, une forte croissance économique… Au Royaume-Uni, c’est plus déséquilibré. Londres et le Sud-Est représentent une part bien supérieure de l’économie nationale, et l’écart de productivité avec le reste du pays est énorme. Londres et le Sud-Est sont pratiquement les régions les plus productives de toute la zone européenne. Malheureusement, ce n’est pas le cas du pays de Galles, ou de certaines parties du Nord-Est et du Sud-Ouest, dans des endroits qui étaient au XIXe siècle le cœur battant de la révolution industrielle, de l’empire britannique, etc.

Donc, mon idée de levelling up – en français cela se traduit par nivellement par le haut je crois – est très simple. Elle est née de mon expérience et de mes observations quand j’étais écolier, puis étudiant, et j’y crois passionnément : on trouve le génie partout, chez tous les êtres humains. Vraiment. On ne peut pas prévoir quelles familles vont produire le génie, ou le talent, ou l’énergie, ou l’enthousiasme. Par conséquent, la tâche du gouvernement est de donner des opportunités à chacun. Et, permettez-moi cet optimisme : je crois vraiment que ce nivellement par le haut est en train d’advenir : à Manchester, Leeds, Sheffield, Birmingham, Liverpool ou dans certaines zones périurbaines, le nivellement par le haut est en marche ! J’ai connu beaucoup de défaillances en politique, je le reconnais humblement. La plus importante est que je n’ai simplement pas pu consacrer assez de temps au levelling up. Je n’ai eu que trois ans, dont l’essentiel pendant le Covid. Mais je continue de penser que c’est ce qu’il nous faut.

Dans Indomptable, vous semblez dire que les risques d’une troisième guerre mondiale sont exagérés. La démocratie libérale triomphera-t-elle à la fin ?

Absolument, car je pense que c’est nous qui avons les bonnes idées. Pourquoi les gens veulent-ils tous venir dans nos démocraties ? Parce qu’elles sont fondamentalement libres et libérales. Et parce qu’on peut y vivre sa vie plus ou moins comme on le veut, à condition de ne faire de mal à personne. Parce qu’on peut s’y exprimer comme on le souhaite et que, dans ces sociétés, on a plus de chances de promouvoir l’innovation et le génie. Je le pense. Les gens intelligents ont plus de chances de vouloir y aller, les enfants en ascension sociale d’entrer à l’université dans ces sociétés. C’est particulièrement vrai aux Etats-Unis, où je viens de passer un peu de temps ! On parlait de nivellement par le haut : toutes les grandes villes, tous les Etats ont une grosse activité dans la tech ou une grande université, et je pense que le siècle à venir, le temps de nos enfants et petits-enfants, aura toujours les Etats-Unis comme locomotive.

Mais pour que cela donne les meilleurs résultats, nous devons être forts. Nous devons reconnaître les menaces, et si nous voulons éviter d’autres conflits dans la zone euro-atlantique, éviter que Poutine en fasse davantage à nos frontières en Europe, que ce soit dans les Etats baltes ou ailleurs ; éviter les conflits dans les mers de Chine du Sud, avec la Chine et Taïwan. Il nous faut revenir au point de départ de cette conversation : nous devons être fermes à propos de l’Ukraine. Les Ukrainiens doivent absolument gagner.

[*] Les mots en italiques sont en français dans le texte.

Indomptable, par Boris Johnson. Trad. de l’anglais (Royaume-Uni) par Odile Demange, Christel Gaillard-Paris, Renaud Morin, Florence Noblet et Pierre Reignier. Stock, 740 p., 29,90 €. Parution le 14 novembre.




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