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Cinéma : ces deux films sur des adolescents vulnérables à voir absolument


Au carrefour des tendances extrêmes se croisent en cette fin d’année cinématographique deux adolescents que tout oppose, dans deux films que tout sépare, et qui montrent les qualités extensibles du cinéma français non commercial actuel. Je résume. Totone (Clément Faveau) a 18 ans, un caractère de chien et une moto de 70 cm3. Pas grand-chose de plus. Son père vient de mourir dans un accident de voiture dont il peut se sentir, lui Totone, en partie responsable : il n’aurait pas dû aider son père, dans un état d’ivresse très avancé, à monter dans sa voiture pour rentrer chez lui. Il faut dire que Totone n’était pas clair non plus. Ne me demandez pas où est la mère, on n’en sait rien.

Ça se passe à la montagne, dans le Jura, un pays magnifique où on fabrique un excellent fromage, le comté. Totone se retrouve donc héritier d’une ferme en déroute et d’une petite sœur de 7 ans. Tout le monde compatit : “Qu’est-ce que je peux faire pour toi, Totone ? – Tu pourrais me prêter un peu d’argent ? – C’est que, en ce moment, c’est difficile. – Pourquoi tu me demandes, alors ?” Et ainsi de suite. Il est seul, et d’autant plus seul qu’il doit aller accompagner sa sœur à l’école. La seule issue raisonnable à tout ça : vendre le tracteur de son père et aller travailler à la fabrique de comté.

L’amour, cette saleté, va tordre le tracé d’une vie trop ordinaire pour ce blondinet impulsif. Pour le sexe, Marie-Lise (Maïwène Barthélémy) est vraiment accommodante. Patiente avec ce puceau, car ça ne marche pas terrible. Elle ne se demande pas pourquoi, ne se moque pas. Oui, il en existe des comme ça, même à la montagne et cernée par des queutards bagarreurs. C’est le premier long métrage de Louise Courvoisier qui, à sa manière, raconte sa vie, son pays, les gens et l’amour qui n’est pas forcément une saleté. Le titre, Vingt Dieux, est le seul défaut de ce beau film.

Noël à Monaco, c’est à se mettre une balle

A l’autre extrémité du territoire, au bord de la Méditerranée, là où ça n’est même plus la France tellement on s’y ennuie de fric, jusqu’à la laideur de tout ce qui devrait être beau : les bijoux, les habits, les palaces, même la mer a quelque chose de toc, et dans les galeries d’art spéculatif, les œuvres des plus grands artistes ont l’air fausses.

Virgil Vernier, le réalisateur de 100 000 000 000 000 (cent mille milliards) a choisi de filmer Monaco à Noël. Je connais un couple qui a donné le jour à leur enfant à Monaco pour lui assurer un avenir fiscalement avantageux. Noël à Monaco, c’est à se mettre une balle. Vernier filme ça très bien. Les villes sont souvent les personnages principaux de ses films. Dans celui-là, il a placé des adolescents. Trois filles et un garçon qui font métier de leur corps. Afine (interprété par Zakaria Bouti) a le même âge que Totone, il ne picole pas comme le petit montagnard. Il s’injecte du collagène dans les lèvres pour être encore plus beau, encore plus jeune, encore plus sensuel que la dernière fois. Encore plus baisable. Pourtant, la femme riche, d’un certain âge et en surpoids, elle s’en fiche de la taille de ses lèvres quand elle se fait embrasser sur la bouche au bord de la piscine. Elle se dandine. Il sourit. Ah comme elle est heureuse en compagnie de ce beau garçon qui lui porte ses sacs d’emplettes surnuméraires lors de cet interminable après-midi de shopping.

— Tu peux pas rester comme ça, Afine, le sermonnent ses collègues escortes. Faut que tu fasses quelque chose de ta vie.

Elles en ont de bonnes, elles. Il n’en sait rien de ce qu’il veut faire dans la vie. Il aime bien s’occuper de Julia. Elle a 6 ans, ses parents riches s’éclatent à Gstaad et l’ont confiée à sa nounou que ça n’amuse pas du tout, et qui a refilé la gamine à Afine, qui aime bien Julia, elle qui lui raconte des histoires. Peut-être qu’il n’a pas eu d’enfance, Afine. Le spectateur imagine ce qu’il veut. Pour moi, la Julia de Cent mille milliards et la Marie-Lise de Vingt Dieux forment un seul et même archétype : la marraine protectrice des ados vulnérables.




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