La déclaration a fait l’effet d’une petite bombe à gauche. En s’ouvrant à des négociations pour le prochain gouvernement avec macronistes et LR au nom de la “responsabilité”, Olivier Faure a engagé le Parti socialiste sur une étroite ligne de crête, plongeant le Nouveau Front populaire dans la crise. Ce vendredi matin, à quelques heures de sa rencontre à l’Elysée avec Emmanuel Macron, le patron du PS s’est dit prêt à discuter avec le bloc central et la droite sur la base “de concessions réciproques” en vue de la formation d’un nouveau gouvernement qui aurait un “contrat à durée déterminée”. Avant de poser des conditions, à son arrivée pour rencontrer le chef de l’Etat : “Un Premier ministre de gauche” et un “changement de cap”. Mais il est prêt à de larges discussions. Laurent Wauquiez, le chef de file des LR, “peut venir autour de la table”, a-t-il reconnu.
Il y a quelques jours encore, ses proches rejetaient pourtant fermement la proposition de Gabriel Attal d’un accord de non-censure allant des LR au PS. En gage de bonne volonté, le patron du PS a évoqué ce vendredi “un gel” de la réforme des retraites, et non plus une abrogation immédiate – pourtant la principale revendication de la gauche – expliquant la nécessité d’organiser “une conférence de financement”. “Quand je veux 100 et que j’obtiens 50, ça s’appelle faire un pas. J’aimerais par exemple qu’on rétablisse un ISF qui rapporte plutôt 15 milliards que trois, mais on verra”, a-t-il résumé. En échange de ces concessions, les socialistes espèrent donc décrocher un gouvernement de gauche qui ne serait pas censuré par le bloc central à l’Assemblée.
Mais côté Insoumis, on s’étrangle. “Olivier Faure a tué le NFP (Nouveau Front populaire) pour discuter avec Attal et Retailleau”, a taclé le député LFI Paul Vannier, lieutenant de Jean-Luc Mélenchon. “Gouverner avec ceux qui pensent qu’il y a en France ‘des Français de papier’ et que ‘certains régressent vers leurs origines ethniques’ ? Eh oh, réveillez-vous ! Respectez-vous ! Respectez les électeurs !”, a renchéri le coordinateur de LFI Manuel Bompard en référence à des déclarations du ministre démissionnaire LR Bruno Retailleau. “Je ne reçois jamais de mandat de Jean-Luc Mélenchon”, a balayé Olivier Faure après son entretien avec Emmanuel Macron, au cours duquel il a plaidé pour que le chef de l’Etat appelle également les communistes et les Ecologistes.
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Mise en garde écologiste
Car même chez les Ecologistes, parti qui est habituellement un point d’équilibre entre la gauche radicale de LFI et celle, plus sociale-démocrate du PS, la sortie d’Olivier Faure a provoqué des froncements de sourcils. Les Verts avaient tendu dans la semaine la main au bloc central, mais n’avaient pas inclus les LR dans le cercle possible des négociations, leur reprochant leur attitude à l’égard du front républicain pendant les législatives. “Attention. Vigilance”, a conseillé Marine Tondelier à Olivier Faure sur BFMTV. “Emmanuel Macron souhaite sûrement la mort du NFP mais le Parti socialiste ne peut pas tomber dans ce piège”, a prévenu la cheffe des Ecologistes en reprochant au PS de “mal commencer ses négociations” en lâchant trop de lest. “Tondelier se retourne contre le PS. Ils ont voulu nous isoler mais c’est le PS qui va s’isoler”, savoure un cadre LFI.
Jusqu’à jeudi, par leur refus net de tout compromis avec le bloc central, les Insoumis étaient en effet dans une position minoritaire au sein du NFP. “Tout le monde a conscience de la gravité de la situation. Ça confère une responsabilité particulière. Donc oui il faut discuter”, temporise cependant le sénateur et porte-parole communiste Ian Brossat auprès de l’AFP. En s’engageant aussi franchement sur le chemin de la discussion, Olivier Faure se retrouve une nouvelle fois dans des situations inconfortables, lui qui est déjà tiraillé entre l’alliance avec les Insoumis et l’aile droite de son parti, qui souhaite rompre les ponts avec LFI.
Alors que le congrès du PS, qu’il avait gagné de justesse la dernière fois, se profile pour 2025, beaucoup lisent aussi dans ses prises de position comme des gages donnés à son aile réformiste. “Il est sous pression et veut gagner son congrès mais il va tout perdre. Son congrès et sa crédibilité”, pronostique le cadre insoumis.
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