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En Syrie, l’avancée fulgurante des rebelles face au régime de Bachar al-Assad


“Damas vous attend.” C’est par ces mots qu’Ahmed al-Chareh, le leader de HTS, groupe radical islamiste et membre de la coalition rebelle, s’est adressé à ses combattants ce samedi 7 décembre dans un communiqué. Les forces opposées à Bachar al-Assad et son régime continuent leur avancée fulgurante dans le pays. Ils ont ainsi affirmé avoir commencé à encercler la capitale, Damas, et sont également aux portes de Homs, la troisième ville du pays, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). Au moins sept civils ont été tués ce samedi dans des frappes russes et syriennes près de la ville, d’après cette ONG basée au Royaume-Uni qui dispose d’un vaste réseau de sources dans le pays.

Le 27 novembre, une coalition de rebelles, menée par le groupe islamiste radical Hayat Tahrir al-Sham (HTS) – considéré comme terroriste par l’ONU, les Etats-Unis et certains pays européens -, a lancé une offensive à partir de son fief à Idleb, au nord-ouest du pays. En quelques jours, elle s’est emparée de dizaines de localités et des villes stratégiques d’Alep, deuxième ville du pays (au nord), et de Hama (au centre). Soit l’avancée la plus spectaculaire en 13 ans de guerre en Syrie.

Les combats ont jusqu’ici fait au moins 826 morts dont une centaine de civils depuis le 27 novembre, et au moins 370 000 personnes ont été déplacées d’après l’ONU. Il est très difficile de vérifier de façon indépendante la situation sur le terrain. Si certains journalistes indépendants collaborant avec l’AFP se trouvent dans des zones tenues par les rebelles, l’AFP n’a pas de journaliste présent avec eux aux portes de Damas, où ils affirment se trouver.

“Renverser le régime” syrien

Ahmed al-Chareh, le leader de HTS, a affirmé ce vendredi auprès de CNN que “le but de la révolution” était “de renverser (le) régime” syrien. Selon des témoins, des manifestants ont renversé une statue de Hafez al-Assad, défunt père et prédécesseur de Bachar, à Jaramana, dans la banlieue de Damas.

Les forces rebelles ont “commencé à encercler” la capitale, a déclaré en début d’après-midi un important commandant de la coalition rebelle, Hassan Abdel Ghani, après avoir dit qu’elles étaient à moins de 20 kilomètres de l’entrée sud de Damas. Les forces gouvernementales se sont retirées de localités à une dizaine de kilomètres de la capitale, a affirmé l’OSDH, qui a ajouté qu’elles avaient aussi abandonné leurs positions dans la province de Qouneitra, qui borde le plateau du Golan annexé par Israël.

Le ministère de la Défense a toutefois affirmé que les informations selon lesquelles les forces armées syriennes, “présentes dans toutes les zones de la campagne de Damas, se sont retirées, ne sont pas fondées”. Quelque 2 000 soldats de l’armée syrienne ayant fui les combats sont entrés en Irak, ont indiqué ce samedi à l’AFP deux responsables de sécurité irakiennes, sans dire de quelle région venaient ces militaires. Des rumeurs ont même annoncé que Bachar al-Assad lui-même avait fui le pays face à la progression des forces rebelles. Des informations démenties par la présidence syrienne, qui a affirmé que celui-ci exerçait ses “fonctions” depuis Damas.

“L’ère du sectarisme et de la tyrannie” est “révolue à jamais”

Rami Abdel Rahmane, directeur de l’OSDH, a en outre déclaré à l’AFP que des combattants rebelles locaux contrôlaient désormais toute la province de Deraa, berceau du soulèvement de 2011 contre le gouvernement du président Bachar al-Assad, repassée sous son contrôle en 2018.

Peu avant l’annonce de la prise de Deraa par les rebelles, l’armée syrienne avait annoncé qu’elle se redéployait dans cette province, ainsi que la province voisine de Soueida, “après que des éléments terroristes ont attaqué des points de contrôle isolés”. Les forces gouvernementales “commencent à reprendre le contrôle des provinces de Homs et de Hama”, avait-elle aussi ajouté.

Selon l’OSDH, les forces gouvernementales avaient envoyé “d’importants renforts” près de Homs, tandis que Damas et son allié Moscou ont lancé des frappes et des tirs d’artillerie sur les combattants. Devant l’avancée rebelle, le leader Hassan Abdel Ghani a invité “toutes les confessions à être rassurées, affirmant que “l’ère du sectarisme et de la tyrannie” était “révolue à jamais”.

“Ne nous en mêlons pas !”, dit Donald Trump

Le conflit en Syrie avait été déclenché après la répression d’un soulèvement populaire qui a dégénéré en guerre civile en 2011. Il a fait plus d’un demi-million de morts et morcelé le pays en zones d’influence, avec des belligérants soutenus par différentes puissances étrangères. Principal allié du pouvoir syrien, la Russie a appelé ses citoyens à quitter le pays, de même que les Etats-Unis et la Jordanie voisine. Autre soutien clef du régime, Téhéran a aussi commencé à évacuer son personnel militaire et des diplomates, selon le New York Times, citant des responsables iraniens et de la région.

Dans ce contexte, une réunion consacrée à la Syrie a eu lieu à Doha entre les chefs de la diplomatie turque, russe et iranienne, dont les pays sont partenaires depuis 2017 du processus d’Astana initié pour faire taire les armes. A l’issue de cette réunion avec ses homologues russe (Sergueï Lavrov) et turc (Hakan Fidan), le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, a estimé qu’un “dialogue politique” était nécessaire entre le gouvernement et l’opposition. Sergueï Lavrov a pour sa part jugé qu’il serait “inadmissible” de voir des “groupes terroristes” contrôler la Syrie, tandis que le Qatar a de son côté plaidé en faveur d’une “solution politique”.

Ankara, même si elle était partie prenante de cette réunion, semble de son côté sur une ligne bien différente. Recep Tayyip Erdogan a ainsi affirmé ce samedi “souhaiter” que la Syrie “trouve la paix dont elle rêve depuis treize ans” et le début du soulèvement écrasé dans le sang. “Nos frères et sœurs syriens méritent la liberté, la sécurité et la paix dans leur patrie”, a insisté le président turc, disant espérer “voir une Syrie où les différentes identités cohabiteront pacifiquement”. “Il existe désormais une nouvelle réalité politique et diplomatique en Syrie”, a-t-il ajouté, accusant Damas ne pas avoir saisi “la main tendue par la Turquie”, qui avait cherché ces derniers mois un rapprochement avec le régime syrien afin notamment de permettre le retour d’une partie des trois millions de Syriens réfugiés sur le sol turc.

Autre prise de parole non négligeable : celle de Donald Trump. Le futur président américain a affirmé que les Etats-Unis ne devaient pas “se mêler” de la situation. “La Syrie est un chaos, mais elle n’est pas notre amie, et les États-Unis ne devraient pas avoir affaire avec cela. Ce n’est pas notre combat. Laissons (la situation) se développer. Ne nous en mêlons pas !”, a-t-il écrit sur sa plateforme Truth Social.

L’implication limitée de la Russie

Le principal enseignement de ce soulèvement brusque, débuté le 27 novembre dernier, est l’implication plus que limitée de la Russie. Si les forces gouvernementales ont mené des raids aériens avec l’aide de Moscou, l’aide militaire russe avait été cruciale en 2015 pour inverser le cours de la guerre et permettre à Bachar al-Assad de reprendre une grande partie du territoire du pays. Mais les ressources de Moscou sont à présent mobilisées par son offensive en Ukraine, et le Kremlin ne semble pas pouvoir – ou vouloir – soutenir davantage le régime syrien.

Le Hezbollah et l’Iran avaient également apporté un énorme soutien militaire à Bachar al-Assad, mais ces deux acteurs sont considérablement affaiblis depuis la guerre dans la bande de Gaza et au Liban. Une source proche du Hezbollah a toutefois annoncé ce samedi que le mouvement avait envoyé 2 000 combattants en renfort dans la ville de Qousseir, proche de la frontière avec le Liban, pour la défendre en cas d’attaque des rebelles.

Si les rebelles s’emparent de Homs, la troisième ville du pays, seules Damas et la côte méditerranéenne seront encore aux mains des forces de Bachar al-Assad, dont la famille est au pouvoir depuis plus de cinq décennies. Un régime qui n’a peut-être jamais semblé aussi proche de tomber.




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