Personne ne s’intéresse aux trains qui arrivent à l’heure, selon un mantra journalistique. Sauf, peut-être lorsqu’il s’agit de classer les meilleures entreprises ferroviaires d’Europe. Lundi 9 décembre, l’ONG Transport and Environment (T&E) a publié un classement de 27 compagnies. Objectif : proposer un cadre de comparaison complet, mais aussi permettre aux compagnies de s’inspirer des bonnes pratiques pour progresser. S’il s’agit d’établir une feuille de route pour le consommateur, le but est également politique. “Un système ferroviaire performant est l’une des pierres angulaires du système de mobilité zéro émission”, écrit T&E.
Alors que seuls 59 % des voyageurs de l’Union européenne sont satisfaits de la ponctualité et de la fiabilité des chemins de fer, il est donc urgent de s’améliorer sur le rail. Au total, huit critères ont été passés au crible, avec des coefficients différents : le prix (compte pour 25 % de la note finale), la fiabilité, les programmes de réduction disponibles, les politiques de compensation, l’expérience voyageurs et l’existence de trains de nuit ou de places pour les vélos. Et le classement va à rebours de certaines idées reçues, sacrant numéro un l’Italienne Trenitalia et reléguant Eurostar en queue de peloton.
Commençons par les bons élèves : si Trenitalia excelle dans quasiment toutes les catégories, à l’exception de l’offre pour les vélos, elle est suivie de la compagnie nationale suisse SBB et de la compagnie RegioJet, qui exploite des trains en République tchèque et vers les pays frontaliers. De son côté, la compagnie autrichienne ÖBB arrive quatrième. Toutes récoltent une note globale d’au moins 7 sur 10.
La SNCF dans le top 5
Et à la cinquième place : cocorico ! Les médias français s’étonnent presque de voir la SNCF figurer dans ce top 5, alors que l’entreprise, encore dirigée par Jean-Pierre Farandou, est souvent critiquée pour ses grèves à répétition. Le rapport de T&E est cependant réaliste : s’il reste des “problèmes de fiabilité”, une politique vélo à améliorer et surtout des tarifs encore trop élevés, la SNCF arrive à décrocher la note de 10 sur 10 concernant l’expérience voyageurs et respectivement les notes de 6,7 et 7 sur la politique de remboursement intéressante et l’offre de trains de nuit (huit lignes en 2024).
Si l’on descend dans le classement, en passant par la Belge SNCB (12e position) et la Britannique GRW (22e position), on retrouve les mauvais élèves. A l’instar de Ouigo – filiale à bas coût de la SNCF – à la 25e position qui malgré des prix ultra-compétitifs – deuxième opérateur le moins cher d’Europe – pâtit d’une absence de tarifs réduits et d’une fiabilité médiocre. La compagnie – détenue majoritairement par SNCF Voyageurs – souffre selon le classement d’un manque de fiabilité qui alourdit sa note finale.
Eurostar, des prix deux fois élevés que la moyenne européenne
Puis arrive enfin Eurostar, l’entreprise franco-britannique fondée en 1990, à la 27e position. Pour justifier sa place derrière le Grecque Hellenic Trains, l’ONG Transport and Environment indique que les prix des billets sont deux fois plus élevés que la moyenne européenne, sans garantir la qualité de service. Et ce n’est pas la seule ombre au tableau. Sur sa politique tarifaire, Eurostar ne reçoit que 2,1 sur 10, défavorisée par l’absence de trains de nuit et d’espace pour les vélos. “Eurostar pourrait améliorer son score en mettant en œuvre quelques changements rapides, mais cela nécessite le soutien des autorités publiques, notamment de l’UE, du gouvernement britannique et des États membres dans lesquels elle opère”, préconise l’ONG.
“Les prix exorbitants des billets éloignent les passagers des trains. Pour libérer tout le potentiel du rail, nous devons rendre les billets plus abordables. Il s’agit d’une responsabilité partagée entre l’industrie et les gouvernements”, constate dans le rapport Victor Thévenet, responsable de la politique ferroviaire chez T&E. L’autre point à retenir est que des prix de billets plus élevés ne garantissent pas un meilleur service. Et pour illustrer ce qui semble être parfois une contradiction pour le consommateur, prenons l’exemple des compagnies britannique et tchèque – GWR et RegiotJet : elles ont des scores comparables de 6,6 sur des facteurs non-tarifaires, alors que le prix d’un billet GWR est six fois plus élevé que ceux de RegioJet.
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