Fabriquer un cabinet n’est pas mince affaire, encore moins pour un Premier ministre. Encore moins sous Emmanuel Macron, le président de la République qui a toujours mis un point d’honneur à garder un œil sur certaines nominations à Matignon. François Bayrou, qui cherche à démontrer sa liberté vis-à-vis de l’Elysée, s’en occupe depuis quelques jours, en marge des consultations avec les partis politiques et de la constitution de son gouvernement ; et s’entoure avant tout de personnes de confiance. Après Pierre-Emmanuel Portheret, un de ses anciens collaborateurs récemment nommé chef de cabinet, François Bayrou a trouvé son directeur de cabinet en la personne de Nicolas Pernot, un haut fonctionnaire qui l’accompagnait déjà au ministère de l’Education nationale dans les années 1990.
Avec une Assemblée nationale où il lui sera plus que difficile de manœuvrer, le Premier ministre était aussi en quête d’un chef du pôle parlementaire, sorte de conseiller tout particulièrement chargé des relations entre les députés, les sénateurs et Matignon. François Bayrou avait même trouvé la personne idoine pour ce poste : Augustin Augier, ancien de l’UDF et fils de l’ancienne ministre des Affaires européennes Marielle de Sarnez, figure incontournable du parti centriste, fidèle parmi les fidèles de François Bayrou, décédée en 2021. Mais Augustin Augier est surtout l’ancien bras droit de Marine Tondelier. Plus qu’un conseiller, un stratège à part entière de la cheffe des écolos, véritable porte-flingue qu’elle chargeait d’aller bavarder avec les journalistes autant que de discuter avec les autres partis de gauche lors des négociations du Nouveau Front populaire l’été dernier. Un “spin doctor” qui avait aussi dirigé la campagne malheureuse d’Eric Piolle lors de la primaire écolo en 2021.
Comportements inappropriés
Un profil que François Bayrou voulait recruter mordicus, avant que certains de ses proches ne lui déconseillent. Augustin Augier, contacté par L’Express, assure ne pas avoir eu de conversations “autres que privées” avec le Premier ministre. Certes, le stratège a-t-il passé ses dernières années à fustiger la politique d’Emmanuel Macron et de ses gouvernements successifs, auxquels a toujours participé le MoDem, mais il est aussi au cœur d’une polémique qui lui a coûté son poste de secrétaire général des Verts. Le spadassin de Marine Tondelier a été dispensé d’activité à la rentrée dernière après un signalement lui imputant des comportements inappropriés, dont des propos jugés “homophobes” et relevant du “harcèlement sexuel”. Dans un rapport du cabinet Pisan, chargé par la direction écolo de diligenter l’enquête interne, et que L’Express a pu consulter, il est écrit, dans un conditionnel prudent, que les faits reprochés à Augustin Augier “pourraient relever d’agissements sexistes” définis par la loi.
“Sur la forme et le fond, ce recrutement n’allait pas”, euphémise un proche du Premier ministre. Ce dernier a donc dû changer son fusil d’épaule : c’est finalement Séverine de Compreignac, ex-secrétaire générale du groupe MoDem à l’Assemblée nationale, elle aussi proche de François Bayrou, qui s’occupera du job à la tête du pôle parlementaire de Matignon.
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