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Les startupeurs à succès sont-ils tous psychopathes ?


Longtemps, les startupeurs ont rêvé de faire partie du célèbre “30 Under 30” de Forbes, ce classement qui liste les jeunes talents jugés les plus prometteurs. Mais depuis quelque temps, ce classement fait l’objet d’autant de convoitises que de quolibets. Car plusieurs de ses lauréats s’avèrent peu dignes de la récompense. Le mois dernier encore, le FBI a accusé l’une d’entre elles, Joanna Smith-Griffin, fondatrice d’AllHere Education, d’avoir commis une fraude envers ses investisseurs pour un montant de près de 10 millions de dollars. Elle risque une peine de prison maximale de vingt ans si elle est reconnue coupable. Joanna Smith-Griffin avait été distinguée dans la liste Forbes de 2021. L’année précédente, elle aurait pu y côtoyer Charlie Javice, fondatrice de Frank, une start-up aidant les étudiants à financer leurs études, acquise par JPMorgan Chase pour 175 millions de dollars. Sauf que les cinq millions d’étudiants que l’entrepreneuse revendiquait comme clients n’étaient en fait que 300 000. Son procès aura lieu en février 2025 et elle encourt une peine maximale de trente ans.

La liste Forbes est devenue l’objet de moqueries récurrentes car ces deux cas ne sont pas ses seuls ratés. Elle a également distingué Sam Bankman-Fried, le fondateur de la plateforme crypto FTX par la suite condamné à vingt-cinq ans de prison. Mais aussi Martin Shkreli (MSMB Capital Management) condamné pour monopole et banni à vie de l’industrie pharmaceutique. Ou encore Trevor Milton, fondateur de Nikola Motor, un camion électrique dont la vidéo de démonstration était tournée en descente, caméra inclinée, pour donner l’impression qu’il roulait par ses propres moyens. Condamnée à passer onze ans derrière les barreaux, Elizabeth Holmes (Theranos) n’a quant à elle jamais figuré sur la liste des “30 de moins de 30 ans”, mais elle a été la tête d’affiche du Forbes Under 30 Summit.

De multiples commentaires ont été faits sur la propension de psychopathes chez les créateurs d’entreprise et, plus globalement, les dirigeants. En 1941, le livre de référence de Hervey Cleckley, The Mask of Sanity [NDLR : Le Masque de la raison] a défini les psychopathes comme un type distinct de personne identifiable selon 16 traits de personnalité et comportements. Le psychopathe est charmant mais insincère, intelligent mais sans remords. Il ment sans vergogne et agit de manière impulsive. Le plus troublant est qu’il est indifférent à la douleur des autres et éprouve peu d’émotions lui-même. Il a tendance à avoir une estime de soi exagérée. Environ 1 % des personnes pourraient répondre aux critères d’une psychopathie totale même s’il faut rappeler que, quatre-vingt ans après sa définition, la psychopathie n’est pas un diagnostic officiel dans le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux de l’Association américaine de psychiatrie.

Une diabolisation qui n’est pas sans risque

En 2010, Robert Hare, un psychologue spécialiste des criminels, qui a établi un lien entre la psychopathie et la violence, publie une étude intitulée “Corporate Psychopathy : Talking the Walk”, qui estime que près de 4 % d’un groupe de 203 managers ont des traits psychopathiques. Les médias ont largement relayé ces résultats. Et des livres de développement personnel surfant sur l’intérêt pour le sujet sont apparus. Le psychopathe archétypal du XXIe siècle est apparu comme le criminel en col blanc, de Bernard Madoff à Bill Hwang. Les séries populaires retraçant la vie d’hommes d’affaires, telle que Succession avec les personnages de Logan Roy et ses enfants, ont eu tendance à mettre en avant ces traits de caractère. L’idée du psychopathe carriériste, dont le terme a dérivé en sociopathe dans une forme de version atténuée, est devenue si répandue que l’habitude a été prise de diagnostiquer ainsi toute personne qui a réussi en étant antipathique, comme Donald Trump ou Elon Musk.

Cette diabolisation des fondateurs et dirigeants d’entreprise présentés comme des malades mentaux n’est pas sans risque. L’assassinat début décembre du PDG d’UnitedHealthcare, Brian Thompson, par Luigi Mangione le rappelle. Au lendemain de cet acte prémédité, de nombreux Américains ont défendu l’acte de Mangione, estimant que Thompson, patron d’une importante compagnie d’assurance-maladie, était lui-même le psychopathe, complice de refus ou de report de soins nécessaires. Dans un contexte d’accroissement des inégalités salariales, notamment aux Etats-Unis, la popularité de ces thèses n’est pas près de faiblir.




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