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Tensions Paris-Alger : Bruno Retailleau accuse l’Algérie de vouloir “humilier la France”


Le ton monte encore entre les deux pays. “L’Algérie cherche à humilier la France”, a estimé vendredi 10 janvier le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, au lendemain du renvoi en France d’un influenceur algérien qui avait été expulsé vers l’Algérie après une vidéo appelant à la violence. “Je pense qu’on a atteint avec l’Algérie un seuil extrêmement inquiétant”, a ajouté le ministre, qui s’exprimait lors d’un déplacement à Nantes.

“La France ne peut pas supporter cette situation”, a-t-il encore dit, en dénonçant une “situation inacceptable”. “En gardant notre sang froid […] on doit désormais évaluer tous les moyens qui sont à notre disposition, vis-à-vis de l’Algérie”.

Placé mardi en centre de rétention administrative (CRA) à Nîmes, “Doualemn”, influenceur de 59 ans, avait été interpellé à Montpellier, après une vidéo postée sur TikToK. Il avait été mis dans un avion jeudi après-midi, selon son avocat, mais a été renvoyé en France dès jeudi soir, l’Algérie l’ayant “interdit de territoire”, selon le ministère de l’Intérieur.

“Contradiction totale avec les règles”

“J’ai pris un arrêté d’expulsion et les autorités algériennes n’ont pas voulu le laisser débarquer sur le sol algérien en contradiction totale avec les règles”, a affirmé Bruno Retailleau, évoquant des textes du droit international selon qui “les pays sont comptables de leurs propres ressortissants”. Dans le cas de cet influenceur, “il n’y avait pas besoin d’avoir un laissez-passer consulaire puisque la preuve qu’il était un ressortissant algérien était établie au moyen d’un passeport biométrique valide”, a encore affirmé le ministre. “On a opposé un certain nombre d’arguments juridiques” aux policiers qui escortaient dans l’avion l’influenceur “sans jamais leur fournir précisément une preuve en termes de droit”, a encore dit le ministre.

Le maire socialiste de Montpellier et le préfet de l’Hérault avaient signalé samedi l’une des vidéos de “Doualemn”. Si la traduction a finalement établi que le terme “tuez-le” n’avait pas été prononcé, la vidéo en question “appelait en revanche à donner une sévère correction à un homme semblant résider en Algérie”, avait précisé mardi le procureur de la République de Montpellier, Fabrice Belargent. Il s’agit en tout état de cause d’un “appel à la torture” visant “un opposant au régime actuel en Algérie”, appel justifiant le retrait de son titre de séjour et son expulsion, avait déclaré jeudi matin le préfet de l’Hérault, François-Xavier Lauch.

Dans un contexte de tensions diplomatiques entre Paris et Alger, trois Algériens et une Franco-Algérienne ont été interpellés ces derniers jours en France après avoir posté en ligne des contenus appelant à des actes violents, souvent à l’encontre d’opposants au régime algérien. Selon plusieurs opposants algériens en France, interrogés par l’AFP, ces messages particulièrement violents se sont intensifiés après que la France, ex-puissance coloniale, a changé de doctrine sur le Sahara occidental. Le président Emmanuel Macron s’est aligné fin juillet sur l’Espagne et les Etats-Unis, estimant que l’avenir du Sahara occidental s’inscrivait “dans le cadre de la souveraineté marocaine”. Ce qui a causé un réchauffement avec Rabat et une nouvelle crise avec Alger, qui n’entretient plus de relations diplomatiques avec son voisin depuis août 2021.

Boualem Sansal toujours incarcéré

Autre sujet de tension entre les deux pays, sur lequel s’est exprimé Bruno Retailleau : le sort de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, 75 ans, incarcéré depuis mi-novembre en Algérie pour atteinte à la sûreté de l’Etat, et qui se trouve dans une unité de soins depuis mi-décembre. “Est-ce qu’un grand pays peut s’honorer de maintenir en détention pour de mauvaises raisons quelqu’un qui est malade et âgé ?”, a estimé Bruno Retailleau.

Le ministre a, par ailleurs, regretté que la France ne mobilise “pas suffisamment” la politique des visas dans le cadre d’une politique migratoire qu’il veut plus restrictive. “Les visas, bien sûr, c’est un élément de l’influence de la France, mais c’est aussi un élément de la maîtrise de l’immigration”, a-t-il déclaré. “Ça veut dire moins de visas”, a-t-il ajouté mettant en avant le fait que la France distribuait un quart du total des visas de l’Union européenne avec 2,5 millions délivrés en 2023. Alors que la politique de délivrance des visas est une compétence partagée avec le ministère des Affaires étrangères, Bruno Retailleau a appelé à davantage de “vigilance” des services du Quai d’Orsay. “Je souhaite qu’on puisse surveiller de très très près les 20 postes consulaires qui sont à l’étranger et qui distribuent l’essentiel du nombre des visas pour la destination France”, a-t-il plaidé.




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