La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a annoncé ce lundi 3 mars un mécanisme de flexibilité pour éviter aux constructeurs automobiles, en retard sur les objectifs de réduction des émissions de CO2, de payer des amendes en 2025.
Ce mécanisme consistera à prendre en compte les émissions sur trois ans, de 2025 à 2027, au lieu d’une seule année, ce qui donnera un délai aux retardataires pour se rattraper, sans pénaliser les bons élèves qui disposeront de leur côté d’un crédit d’émissions, affirme l’exécutif européen. “Les objectifs restent les mêmes, mais cela signifie plus de flexibilité pour l’industrie”, a déclaré Ursula von der Leyen, à l’issue d’une deuxième réunion de concertations avec des dirigeants de la filière, dont des représentants de BMW, Renault, Stellantis (Peugeot, Citroën) et Volkswagen. Une première réunion avait eu lieu fin janvier.
Bruxelles doit présenter ce mercredi un plan d’action pour aider le secteur automobile en pleine crise. Mais la présidente de la Commission en a dévoilé ce lundi les principaux contours. Outre l’assouplissement sur les émissions, elle a évoqué la mise en place d’une alliance pour l’innovation automobile. En clair, l’UE va autoriser et soutenir la mutualisation de ressources pour le développement de logiciels et de technologies de conduite autonome, des domaines où les économies d’échelle sont cruciales. De tels partenariats sont traditionnellement limités par les règles de concurrence.
Ursula von der Leyen a aussi proposé un “soutien direct” aux producteurs de batteries et l’introduction d’exigences en matière de contenu européen pour les cellules de batteries et certains composants. Elle a enfin promis de nouveaux allègements réglementaires. Mais l’assouplissement de la réglementation CO2 pour éviter des amendes était une des principales revendications des constructeurs européens dans le contexte d’un marché automobile en berne qui voit l’arrivée d’une concurrence féroce des groupes chinois.
“Cadeau sans précédent à l’industrie”
L’ONG environnementale Transport & Environment a dénoncé ce lundi “un cadeau sans précédent à l’industrie automobile européenne”. “Si cette mesure est mise en place, elle retardera l’augmentation de la production de véhicules électriques en Europe et réduira la pression sur l’industrie pour déployer des modèles électriques moins chers en 2025”, a-t-elle estimé dans un communiqué.
Tous les constructeurs automobiles doivent respecter une moyenne annuelle d’émissions par voiture vendue en Europe. Cette norme dite CAFE (Corporate Average Fuel Economy) les oblige à vendre progressivement des véhicules de moins en moins polluants, avec en ligne de mire la fin des véhicules thermiques en 2035. La norme a été globalement respectée jusqu’ici par les constructeurs, mais le CAFE a franchi un nouveau palier en janvier 2025, à 93,6 grammes de CO2/km en moyenne.
Pour donner plus de temps aux constructeurs, la présidente de l’exécutif européen a promis un amendement au règlement sur les normes de CO2 avant la fin du mois, pour étaler les obligations sur trois ans. “Je suis sûre qu’un tel amendement ciblé pourrait être rapidement approuvé par le Parlement européen et le Conseil car, bien sûr, il n’a de sens que s’il est approuvé rapidement”, a-t-elle dit. “D’une part, nous avons besoin de prévisibilité et d’équité pour les pionniers, ceux qui ont bien fait leurs devoirs. Cela signifie que nous devons respecter les objectifs convenus. D’autre part, nous devons écouter les voix qui demandent plus de pragmatisme en ces temps difficiles”, a encore expliqué Ursula von der Leyen.
Au grand dam des ONG environnementales, plusieurs Etats s’étaient prononcés ces derniers mois contre des amendes, dont l’Allemagne, la France, l’Italie. Au sein de la Commission, le Français Stéphane Séjourné avait poussé pour cette approche pragmatique. “Nous ne pénaliserons pas l’industrie que nous devons aider. En effet, les bons élèves pourront capitaliser sur leurs efforts, ceux qui sont en retard auront plus de temps”, s’est félicité ce lundi le responsable français.
Les constructeurs automobiles sont actuellement freinés par la faiblesse des ventes de l’électrique. La part de marché des véhicules propulsés par une batterie, encore trop coûteux, a reculé pour la première fois en 2024, à 13,6 % sur l’année. Les constructeurs espèrent relancer les ventes grâce au lancement de nouveaux modèles plus abordables.
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